Un grognement presque sourd lui échappa lorsqu'il observa la couleur grisâtre du firmament, du seuil des portes coulissantes du magasin où il se tenait. Le voile nébuleux s'étendait à perte de vue, cachant derrière ses vastes couches de vapeur cotonneuse les quelques étoiles qui avaient daigné embellir le dôme céleste au côté de la lune en ce soir de mi-automne. Le petrichor embaumait l'air de sa senteur musquée et fraîche, et les gouttes s'écrasaient par centaine de milliers sur le sol, forçant les quelques volets encore ouverts à se rabaisser. Sous le feu des vieux lampadaires clignotants, le chant de la pluie perçait le silence accablant de la nuit.
Cela faisait près d'une semaine que le ciel était capricieux, ternissant l'humeur de la plupart, les obligeant tous à supporter les tonnes de litres d'eau qui se déversaient continuellement sur la terre, privés des caresses du soleil et de sa chaleur réconfortante. Ils se réfugiaient dans des vêtements chauds et restaient prisonniers de leurs maisons, n'ayant - par malheur ou par obligeance - d'autres choix que de prêter oreille aux lamentations de l'étendue bleue. Après un été et un début d'automne marquée par une sécheresse sévère, voilà maintenant que le froid montrait ses dents acérés. L'hiver s'annonçait rude cette année.
La semelle de sa chaussure piétina et écrasa subitement l'herbe s'abreuvant de l'eau qui tombait par multitudes au moment où il se décidait à quitter l'entrée du magasin. Non sans proférer quelques jurons laissant ainsi deviner son mécontentement car dépourvu d'un quelconque parapluie, Naruto Uzumaki rejoignit le trottoir, faisant balancer au rythme de sa démarche précipitée les deux gros sacs en plastiques qu'il tenait en mains. Leurs tailles et leurs poids conséquents lui donnaient du fil à retordre à chacun de ses mouvements. Plus d'une fois, son pied avait glissé sur les plaques d'eau et il s'était rattrapé de justesse, évitant à son postérieur d'atterrir sur le bitume et salir son pantalon cargo ainsi que son sweat-shirt à capuche trempés et moulants, même si d'une certaine façon, ses vêtements l'étaient déjà.
Tout en sachant que le geste était futile, le jeune homme ralentit sa marche et secoua vivement la tête pour chasser les gouttes perlant sur ses mèches blondes. Ses yeux bleus papillonnèrent, aveuglés par le rideau de pluie tandis que sa tête pivotait vers le ciel.
Ce qu'il détestait les jours pluvieux ! Il en avait horreur depuis son plus jeune âge. Si pour certains une averse était synonyme de beaux temps, elle signifiait pour lui le début des hostilités, les prémices de sa descente aux enfers. La pluie alimentait les démons de la nuit, leur donnant la puissance qui leur permettait de créer une brèche entre le monde des songes et la réalité. Il perdait alors ses repères spatio-temporels et succombait à la noirceur de son propre esprit. Oui, ça ne faisait pas très viril d'avoir peur de l'orage, mais il n'y pouvait rien.
Naruto éternua subitement. Fébrile à l'idée de tomber malade, le jeune homme accéléra le pas, n'hésitant pas une seule seconde à patauger dans la boue. Il préférait encore salir ses grosses baskets plutôt que de rester au lit pendant quelques jours. Par habitude, le blond profita de la quiétude de la route. Il ne se lassait jamais d'admirer le contraste flagrant entre le jour et la nuit dans son modeste quartier situé assez loin du centre-ville de Konoha. Le concert des Klaxons, le ronflement des moteurs assourdissants, les discussions animées et les cris des enfants dans les aires de jeux mouraient, dévorés par un silence macabre, une fois le soleil couché. C'était ainsi la majeure partie du temps, sauf quand les disputes éclataient et que les bouteilles de verres volaient à travers les vitres des fenêtres des immeubles environnants. Dans ces cas là, Naruto s'attardait très peu et courait jusqu'à chez lui, la tête baissée pour ne pas se prendre un objet en pleine figure.
Le tonnerre frappa soudainement, arrachant au jeune homme une complainte. Il ne donnait pas cher de la peau de Tête d'ananas, son ami trop flemmard, trop agaçant, trop chiant. Car c'était de sa faute s'il se trouvait là, à subir l'aigreur du ciel noir. Il ne serait pas entrain de marcher le long du trottoir désert avec une quantité énorme d'alcool et de snacks sous le bras si lui et les autres ne s'étaient pas incrustés à son rencard avec Hinata, prétextant vouloir se réunir une dernière fois tous ensemble avant de se séparer. Shikamaru, en tête du groupe, était parfaitement conscient de gâcher ses plans et il ne s'en gênait pas.
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Les ombres du passé 2 {PAUSE}
Fanfiction[Spoiler Alerte] De l'eau avait coulé sous les ponts depuis cette nuit fatidique, loin des regards indiscrets de la population de Konoha. Beaucoup de choses avaient changé. Enfin, pas tant que ça. La quiétude était revenue se faufiler dans les ru...