L'odeur Des Feuilles Mortes

Chapitre 1

Un bruit strident traversa la pièce, se répercutant sur les murs étroits de la petite chambre de Soé qui se réveilla brusquement. Il grogna et abattit nonchalamment son poing sur son vieux réveil noir. Le jeune homme aimait son réveil vieillot autant qu'il le détestait pour le réveiller chaque matin en sursaut. Le blondinet se redressa sur son lit et balança ses jambes dans le vide heurtant le parquet de ses pieds nus. Soé se frotta les yeux puis posa sa tête sur ses poings plongeant son regard endormi dans le vide. Il regarda sans vraiment regarder son petit bureau bordélique en bois sur lequel était posé son ordinateur portable encore allumé. Il avait écrit jusque tard hier soir -ou plutôt jusque tôt ce matin- le manque de sommeil se faisait ressentir dans tout son corps et le garçon savait que son humeur matinale risquait d'être massacrante. La chaleur du jour n'arrangeait absolument rien et sa peau luisait de sueur. Il se leva donc et fila dans la salle de bain, passant par le petit couloir qui longeait sa chambre. Il enleva son caleçon et pénétra dans la petite cabine de douche laissant couler l'eau sur son corps. L'eau froide eût pour effet de le réveiller un peu, lui ainsi que ses muscles endoloris, et il lâcha un soupir de bien être mélangé à une petite plainte presque silencieuse dû au choc thermique sur sa peau brûlante. Soé adorait l'eau, et prenait le plus souvent des douches froides, parce qu'il savait que c'était bon pour beaucoup de choses, et qu'il aimait la sensation que l'eau froide lui procurait. En été c'était encore plus grisant. Il aimait aussi se baigner dans les rivières ou les mers froides bien plus que dans celles tempérées.

Le jeune homme sortit de la douche quelques minutes plus tard, saisissant une grande serviette dans le petit placard blanc au dessus de l'évier. Il se sécha énergiquement, enroula maladroitement la serviette autour de ses cheveux mi-long et reprit le chemin de sa chambre afin de s'habiller. Il enfila en vitesse un caleçon, un tee-shirt noir et un jeans bleu marine pris au hasard dans son armoire, puis s'assit sur son lit le temps de mettre une paire de chaussettes basses. Le blondinet attrapa ensuite quelques livres sur son bureau, quelques cahiers et son ordinateur portable, et les fourra dans son grand sac noir. Il descendit alors les petits escalier en colimaçon et se retrouva rapidement dans le salon-cuisine. Le jeune homme alluma la télé zappant les chaînes jusqu'à tomber sur les infos du jour puis attrapa la banane et le bol de céréales préparé au préalable par sa mère. Il versa un peu de lait dans son bol avant de se laisser choir sur le grand canapé en velours rouge écoutant attentivement ce que le présentateur avait à dire. Quand il eût terminé son petit-déjeuner, le blondinet éteignit la télévision et remonta les escaliers afin de se laver les dents et de prendre son sac. Il sortit enfin de chez lui en soupirant, n'ayant absolument pas envie d'entamer cette nouvelle année, et ferma la porte à clé en se demandant si sécher n'était pas une option possible. Mais il se ravisa en pensant à l'image qu'il donnerait de lui-même si il ne se présentait même pas le jour de la rentrée alors qu'il s'agissait de sa dernière année pour empocher le bac et se barrer enfin de ce village maudit. Il traversa la route et s'assit sur le banc de la station de bus qui se trouvait juste en face de chez lui, pour son plus grand bonheur. Environ cinq minutes plus tard le bus arrivait et le garçon montait dedans le cœur lourd. Le bus prenait environ vingt minutes pour arriver à son établissement qui se trouvait, fort heureusement, dans la ville voisine ; si l'établissement s'était trouvé à Port bleu, le garçon n'aurait pas pu le supporter. Soé vissa ses écouteurs dans ses oreilles laissant la musique le bercer et amoindrir la boule qui se formait déjà dans son ventre. Une petite demi-heure plus tard, le blondinet se retrouvait devant la grande et vieille grille en fer noir de son lycée. Plus il avançait, plus il avait envie de faire un demi tour sur lui même et de retourner chez lui dans son lit pour finir sa série. Pourtant il franchit le grand portail qui annonçait le début de cette nouvelle année et s'engouffra dans la grande cours dallée comme un condamné avance vers la potence. Il trouva facilement ses amis qui se trouvaient comme d'habitude au coin fumeur vers le fond de la cours sous un petit préau entièrement fait de bois. Soudainement, des bras lui agrippèrent les épaules par derrière et le blondinet sursauta tout en essayant de se visualiser le visage de son pseudo agresseur. Il se retourna finalement sur une petite tête rousse et de grand yeux noisette.

- Hey mon Soso, tu as passé de bonnes vacances ?

- Hey Coralie ! Mouais si on veut. Je me suis fais chier dans mon blède comme d'hab, mais sinon rien à signaler.

La jeune fille souris et Soé grimaça.

- Ça va ! Je le trouve bien moi ton « blède » comme tu dis. Et puis si tu te faisait tant chier que ça tu aurais pu m'inviter !

Soé soupira, il aurait pu en effet l'inviter, mais le jeune homme avait commencé à se douter que les sentiments de Coralie à son égard n'étaient plus seulement amicaux et il voulait à tout pris éviter de lui donner de faux espoirs. Il aimait énormément Coralie, et lors de leur rencontre en première ils étaient très vite devenu amis, mais juste avant que les vacances d'été n'arrivent, la jeune fille était devenue beaucoup plus tactile et se mettait parfois à rougir aux remarques de Soé. Et même si cela lui avait plût au début -tout le monde aime se sentir aimé- il s'était très vite rendu compte qu'il ne ressentait pas la même chose et qu'il aurait été cruel de rentrer dans son jeu et de lui faire croire que c'était potentiellement réciproque alors qu'il n'en était rien. Soé avait donc préféré s'éloigner un peu d'elle répondant brefemment à ses messages et évitant toute rencontre en tête à tête. Cela l'attristait énormément car il mettait aussi leur amitié en péril, mais le blondinet se voyait mal mettre les choses au clair alors que la jeune fille ne lui avait même pas encore avoué ses sentiments.