Je n'ai jamais vu la lueur du soleil. Je n'ai jamais senti l'air pur. Je n'ai jamais fait ruisseler de l'eau sur mon corps. Je ne me suis jamais vu dans la glace, je ne sais même pas à quoi je ressemble. D'aussi loin que je puisse m'en souvenir, le nombre de personne que j'ai côtoyé, ou même croisé, peu se compter sur les doigts d'une main. Ma vie n'est autre que noir et blanc.
J'ai lu des livres. Oui. Ça, je connais. C'est d'ailleurs l'une des seuls choses que je n'ai jamais vus. Certains raconte la fin du monde, d'autres la fin de la race humaine. Je ne sais pas ce qui s'est passé. Ce qui est sûr, c'est que je ne suis pas seule. Pas la dernière. Il y en a d'autres, des personnes comme moi. C'est certain.
Certain de ces livres sont différent des autres. L'un d'eux ne parle pas d'une fin mais d'un début. Je ne sais pas si l'histoire qu'il raconte est imaginé ou réel. Mais c'est tellement réaliste, tellement tragique, tellement vrai.
C'est l'histoire d'une vie paisible, merveilleuse et à la pointe de la technologique, chose que je ne connaissais même pas avant de la lire. La population en voulait toujours plus, voulait aller toujours plus loin. Cette vie agréable se dégradait petit par petit. Cette vie sombrait dans l'enfer sans même que quiconque s'en rende compte.
Non. Bien sûr, certaines personnes le savaient, comme l'écrivain de ce livre, mais à mon avis, et je pense, non j'en suis sûr, que ce n'est qu'une infime partie de la population terrestre.
Ces personnes qui ordonnaient plus, exigeaient au gouvernement de nouveaux territoires. De nouvelles terres à cultiver, de nouveaux espaces à s'approprier. La population souhaitait, le gouvernement faisait. Ils décidèrent donc de déclarer la guerre au pays voisin, une grande surface, beaucoup de paysans et peu de soldats. Les ennemis idéals. Encore et toujours, les gens en voulaient toujours plus. Les soldats en souhaitaient plus.
Les savants se démenaient pour trouver l'arme de guerre parfaite, celle qui tuera le plus d'individus ennemis en un temps minime. Tous trouvèrent la solution. Les scientifiques créèrent l'arme biologique, capable d'ôter la vie à des milliers de personnes en quelques secondes. Un virus, La Fauce. Ils le conçurent et l'envoyèrent dans les lignes ennemies sans prendre le temps de créer un antidote, un vaccin. C'est ce qui causera la mort de millions et bientôt de milliards d'êtres humains, comme moi, sensibles et innocents.
Néanmoins, vers le début de ce qui semblait la fin du monde, les scientifiques pensaient que cela allégerait le poids des souffrances que portait cette planète. Trop d'habitants pour si peu de ressources... Il fallait bien qu'une catastrophe arrive pour prendre en son cœur quelques vies, aussi misérables et médiocres que des grains de sable.
Ce virus semblait incontrôlable. Il commençait à tuer leurs inventeurs, puis continuait sa route vers de nouveaux pays, de nouveaux climats, de nouvelles personnes. Il prit ses aises, il prit le monde, il prit le contrôle de la vie.
Tous les pays, sans exception, stoppèrent les guerres avec une énorme difficulté. Leur seule excuse était « la survie de l'Humanité compte plus que tout, plus que la guerre ». Ils s'unirent donc pour chercher le vaccin qui nous sauvera tous. Malheureusement, tous, sans exception, échouèrent lamentablement.
Ils décidèrent donc, pour protéger le plus de monde possible, de tuer toutes les personnes ayant des symptômes de la Fauce et de bâtir trois grands bunkers. Ceux-ci seraient construits de sorte que 90.000 personnes puissent y vivre. Et que chaque famille soit séparée d'un mur épais.
Dès l'âge de 16 ans, âge où lequel l'enfant peut se débrouiller seul, les autorités l'isoleront et lui interdiront de revoir leurs parents afin de limiter les contacts. Depuis, les règles ont changé. Ce n'est plus à 16 mais à 8 ans qu'ils séparent et détruisent ces familles. Soit la moitié de l'âge qu'il avait prévu au départ.
Une pièce est équipée d'un matelas à même le sol, d'un petit lavabo, d'une étagère intégrant une centaine de boîtes de conserves et de livres, d'un système chauffant et d'une petite ampoule qui n'éclaire qu'environ dix heures par jour et d'un port de communication. Eh oui. C'est ma demeure, mon grand château. Non. C'est sinistre chez moi. Je déteste mon monde de fer, gris, mon monde sans fenêtre, gris, mon monde tout entier tourne autour de gris. Ah... le gris... cette couleur si angoissante... tant de nuance pour évoquer la même chose. La monotonie ; le malheur ; la tristesse ; le désespoir ; la peur ; la mort.
Depuis presque une décennie, le port de communication n'est devenu qu'un haut-parleur. A mon avis, nous commençons à manquer de courant. Même le chauffage, plus si jeune, ne suffit plus pour me tenir chaud la nuit, lorsque j'essaie de dormir.
Ils nous sermonnent d'excuses plus douteuses les unes que les autres. Ils nous disent depuis plusieurs années que nous pourrons bientôt sortir de ce trou mais nous ne sommes pas encore dehors. Ils racontent que cela fait environ 390 ans que la population ne peut plus vivre sur Terre sans y être contaminés. Moi, ça fait 18 ans aujourd'hui que j'ai vu pour la première fois l'enfer qu'est devenu le monde et cela fait 10 ans seulement que je n'ai pas revu ma famille. Ma mère, mon père et ma petite sœur. Ma petite sœur... Aujourd'hui, elle devrait déjà être en isolement. Elle qui était si frêle, si fragile, je ne sais pas si elle va s'en sortir. Je le souhaite de tout mon cœur. Je crois que c'est mon souhait le plus cher, reste en vie, faite qu'elle reste en vie.
Moi qui suis enfermé dans une cellule depuis bien trop longtemps, ai l'impression de devenir folle.
Pour garantir une descendance, mais pas la surpopulation, le gouvernement avait décidé de tirer au sort, tous les ans, des femmes et des hommes aillant entre 18 et 21 ans. Ils sont tous dans le devoir de concevoir 2 enfants. Depuis 11 ans maintenant, il y a 50 femmes et 50 hommes élus pour 10.000 personnes.
Normalement, nous devrions être 30.000 mais les faibles, les personnes qui ont tenté de fuir, les morts naturelles et de maladie ont tous périt. Tous sans exception. Les deux tiers de la population pour presque 400 ans d'isolement n'ont pas survécu.
Le prochain tirage au sort sera demain. Puisque je viens d'avoir 18 ans, il y a 50 % de chance que je ne sois pas élu. Je le souhaite de tout cœur. Et 50 % de malchance que je le sois. Ça, je ne le souhaite pas. Je ne veux pas me marier, telle est la procédure avant de pouvoir avoir une descendance, et avoir des enfants avec un inconnu. Je trouve cette loi d'une atrocité. Je devrai en plus vivre avec lui pendant une éternité. Toute ma vie, et la sienne.
Voici le jour du verdict. Serai-je mère ? Aurai-je un mari ? Si oui, s'aurai-je le supporter ? Et lui, le pourra-t-il ? L'enceinte s'allume, grésille, fait un son familier, puis se met à parler :
« Bonjour citoyen du bunker. Comme chaque année, vous aurez 100 nouveaux parents ! Acclamez-les tous en cœur ! Voici les heureux élus : Ashley 075 avec Aaron 120 ! ... »
Eh oui ! Nous avons des numéros. Il y a 7 sections. Une section équivaut à un prénom fille et un prénom garçon. La personne en tête de notre section à un prénom bien à lui : c'est Charles. Quant à lieu un mariage, les femmes se déplace : elles sont emmenées dans la pièce de l'homme. Dans ma section, les filles s'appellent Corine et les garçons Louis.
« ... Emy 311 avec Jayson 401 ! Phoebe 011 avec William 144 ! Emy 125 avec Kyle 023 ! Phoebe 289 avec Lewis 179 ! Rose 542 avec Kyle 651 ! Cindy 029 avec Andrew 412 ! Marley 011 avec Alex 201 ! Edelyn avec Aaron 001 ! ... »
Le sol s'écroule sous mes pieds. J'ai la tête qui gonfle tellement j'ai le tournis. Ma langue en feu me brûle la gorge. Mon cœur bat tellement vite qu'il va finir par sortir de ma cage thoracique. J'ai l'impression que je vais exploser.
Quelqu'un entre pour la première fois depuis 10 ans dans ma pièce, le lieu où j'ai grandis, le seul endroit que je connais et que je n'ai jamais quitté. Cette personne me tord le poignet, me fais mal, je me débats mais moi, qui n'est jamais connus le sport, me fatigue vite, trop vite. Ce même lieu que je déteste tant, bizarrement, je le défends. Je ne sais pas si je le fais pour cette cave ou pour moi-même mais je fais tout pour me battre. Ne pas m'avouer vaincu, ne pas m'avouer vaincu, ne pas m'avouer vaincu.
Ses bras si puissants mettent les miens endoloris. En une demi-seconde, je sentis une douleur terrible à la fois vive et aiguë au niveau de ma nuque. Il m'a injecté un produit. J'essaye de m'échapper de son étreinte mais trop tard. Je tombe. Je m'écroule. Je sombre.
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La Fauce
Teen FictionImaginez un monde où tout est ravagé. Un monde où la population ne cesse de s'amoindrir. Un monde où même les plantes, les animaux et les ressources disparaissent. Enfin ça, c'est ce qu'ils me raconte. Ce qu'ils nous racontent. Plongez-vous dans l...