On était seul.
Mais à deux.
On semblait si complice mais si différent. Nous étions tel deux aimants, si proche que l'on se repoussait et malgré cela, nous étions toujours là l'un pour l'autre, et ce, depuis aussi longtemps que je m'en souvienne.
Ce jour-là, il pleuvait. Il était encore tôt, le ciel n'était pas assez clair pour laisser passer la lumière du jour à travers les épais nuages de printemps. Mon sac sur l'épaule et mon parapluie à la main, je marchais d'un pas nonchalant vers le campus. Il y a encore quelques années de cela, je le découvrais encore. Je savais où mon ami se trouvait, comme il se trouve chaque jour au même endroit avant la première sonnerie. Derrière le bâtiment B, se trouvait un chêne immense qui déployait ses branches fièrement et, à ses pieds, le sol était couvert de nombreux trèfles avec, en son centre, un vieux banc en bois.
Il prit un certain moment avant de m'apercevoir. Il était sagement assis, un livre entre les mains et un parapluie sur l'épaule. Son expression était sérieuse tandis qu'il concentrait son attention sur les pages jaunies par le temps. Il n'a pas vraiment le profil d'une personne fan de bouquin et pourtant, il lisait de manière régulière, sans que ses potes n'en sache jamais rien.
Lorsqu'il m'aperçut, il eut un sourire complice, se leva aussitôt et s'élança dans ma direction après avoir fourré dans son sac sa lecture. Il me prit par les épaules dans une étreinte si énergique que nos deux parapluies s'entrechoquèrent et tombèrent au sol. Nous nous mîmes à rire de notre bêtise tous les deux en nous dirigeant vers notre salle de cours, un sourire gravé sur le visage. Lui et moi, on se connaissait depuis l'enfance. Je n'ai toujours vu que lui presque tous les jours depuis qu'on s'est rencontré. Si je ne le voyais pas un jour par hasard, ma journée n'était plus pareille, presque gâchée.
J'ai toujours été près de lui. On était deux meilleurs potes aimant s'amuser. Pour moi, nous étions dépendants l'un de l'autre tandis que les liens qui nous liaient étaient incassables, du moins, c'est ce que j'ai cru pendant l'entièreté de notre amitié. On faisait la paire, mais, lui pourtant préférait toujours les autres à moi. L'une de ses plus grandes qualités, et celle que je lui reproche le plus, est d'être trop sociable. Tout le monde le connaissait dans le campus et beaucoup l'appréciait, mais à la moindre occasion, c'est à moi qu'il tournait le dos. Avoir été à ses côtés toute notre enfance fait partie, pour moi, de ce qui me décris le plus et fait de moi ma propre personne alors le voir s'en aller d'une telle façon m'a fait ressentir quelque chose de bizarre, de nouveau. Ce sentiment se propageait dans mon être et dans mon esprit tel un feu de forêt. De sombres pensées émergèrent de celui-ci. Je ne pouvais plus accepter de le voir s'éloigner de moi sans même m'adresser la moindre explication. Je pense... Je pense que cette "amitié" à commencer à me monter à la tête.
Je perdais au fur et à mesure la raison alors que les mois défilaient. Je déambulais fatigué dans les couloirs, à présent seul, observant les autres élèves s'amuser et rire si fort qu'ils m'en donnèrent un mal de crâne. Je cherchais à l'apercevoir dans cette foule, au tournant peut-être d'un couloir ou même à la bibliothèque, mais rien. Il avait disparu de mon quotidien, il ne venait plus près du chêne les matins. Nous devînmes des étrangers l'un pour l'autre si soudainement, moi qui pensais être suffisant pour lui en tant qu'ami, je me rendis compte que j'avais été trop naïf.
Il m'avait laissé et avait disparu sans laisser de traces.
Ce jour-ci, il pleuvait. Alors que mes pas me portèrent par habitude en direction du vieux chêne, mon esprit était complètement vide. Mon sac pendouillait à mon épaule, menaçant de tomber. Ainsi, quand mes jambes se stoppèrent face au banc, je revins à mes sens. Le regard perdu sur l'objet, les souvenirs joyeux que nous avions vécu repassèrent en boucle dans ma tête. Le peu de temps que nous avions m'était très cher. Avant même que je n'en prenne conscience, mes jambes se dérobèrent sous mon poids, las. Je tombai à genoux dans le champ de trèfle, mouillant le bas de mon jean et mon sac par la même occasion. Mes larmes commencèrent à rouler le long de mes joues, rougies par l'émotion, se mêlant elles même à la pluie tandis que mon parapluie gisait désormais au sol également. Je n'avais plus la force mentale nécessaire pour me retenir. Je pleurai toute ma tristesse refoulée tandis que le regret me rongea. Je n'avais pas eu la force de le convaincre de rester ni de lui avouer mes sentiments si profonds à son égard. Il était le seul que je voyais, le seul que j'aimais.
La solitude et le froid me serrèrent le cœur d'avantage de même que ma respiration se fit plus saccadée, je souffrais de son absence. Je voulais tant l'enlacer une dernière fois. Je m'imagine encore à ses côtés pourtant, en allant en cours, il croiserait à nouveau son groupe d'amis et, se tournant vers moi, un air désolé sur le visage, il me dirait qu'on se reverra plus tard. J'accepterais tant bien que mal, car je veux son bonheur, mais un jour, plus tard, n'arriva plus.
Dorénavant, je suis seul. J'ai mal.
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A little flower Under The Rain (one shot)
RomanceQuelques histoires que j'ai imaginé, peut-être courtes ou longues je sais ne pas encore. Je ne compte pas avoir un rythme régulier. J'espère que vous apprécierez.