II - Corbeaux

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TW - Harcèlement, suicide

Les corbeaux étaient en position de force. Elle ne pouvait rien faire et cela les remplissait de joie. 

Seule, seule, seule contre nous.

Elle ne peut rien, rien, rien contre nous.

Elle ne peut pas se battre, battre, battre contre nous.

Elle doit rester, rester, rester avec nous.

Ils étaient une dizaine à lui distribuer coups de bec et de serres, à lui crier toutes les insultes qu'ils pouvaient, de celles qui indifféraient avec le temps à celles qui touchaient toujours juste, le tout avec une frénésie macabre.

Joie, joie, joie. Elle doit rester avec nous et récolter de la douleur plus qu'il n'en faut. Mais la difference n'en a jamais assez, elle reste, reste, reste quoi que l'on fasse, et nous ne pouvons que continuer à la blesser indéfiniment. 

Ils étaient une vingtaine à lui reprocher son anomalie et à la punir à cause d'elle. Cette divergence était un parasite dangereux qui ne pouvait que provoquer des catastrophes dans leur monde où tous étaient semblables.

Peur, peur, peur. La différence est dangereuse, il faut l'éradiquer avant qu'elle ne se propage telle la maladie meurtrière qu'elle est. Il faut la redouter. Elle est un fléau, une discordance dans la symphonie mélodieuse de notre perfection uniforme.

Ils étaient une trentaine à défouler sur elle leur colère brûlante à l'idée qu'elle pouvait briser leur équilibre harmonieux de perfection uniforme. Ils la haïssaient pour sa différence maudite, cette particularité qui rongeait leur utopie de l'intérieur comme un cancer meurtrier, et cette haine entendrait une rage sans nom. 

Rage, rage, rage. Elle détruira notre perfection fragile si on la laisse faire. Elle n'a encore rien fait volontairement, mais déjà son anomalie nous insupporte, nous gêne, nous énerve, et son premier geste destructeur ne saurait tarder, et il sera suivi de centaines de milliers d'autres, et il sonnera le début de la fin de notre utopie commune, et il marquera l'avènement d'une période monstrueuse et inhumaine.

Ils furent une cinquantaine à continuer de la suivre lorsqu'elle se leva. 

Où vas-tu comme ça, petite proie ? Nous allons te détruire, morceau après morceau, jusqu'à ce qu'il ne reste rien de toi et de ta maudite différence. Tu es anormale, et tu mérites de mourir pour cela. 

Ils étaient une centaine à s'acharner contre elle alors qu'elle marchait entre les arbres aux silhouettes effrayantes dessinant de gigantesques monstres aux longues serres effilées.

Tu ne peux pas nous échapper. Tu es prise au piège. Nous ne te laisserons que lorsque tes os blanchiront sur le sol, lorsque nous auront dévoré chaque millimètre de ta chair pour éradiquer l'anomalie que tu représentes. Où que tu ailles, nous te suivrons, nous nous obstinerons, et nous te détruirons.

Ils étaient des milliers à la suivre alors qu'elle sortait du bois pour marcher sur une étendue d'herbe jaunie et desséchée par la chaleur. 

Nous te suivrons où que tu ailles, du plus brûlant désert à la banquise la plus glaciale, de la jungle la plus touffue à l'étendue rocheuse la plus déserte, de la plaine la plus plate à la montagne la plus escarpée. Tu ne peux pas te débarrasser de nous. Tu n'y arriveras jamais.

Renonce. 

Ils étaient des millions à la blesser sans cesse alors qu'elle quittait les herbes sèches pour continuer son chemin sur une étendue de terre gelée. 

Nous finirons par t'user et tu te casseras comme la machine défectueuse que tu es. Regarde-toi. Tu es blessée. Tes pieds ont à peine quitté les herbes sèches et piquantes qu'ils se glacent sur un sol gelé. Tu finiras par ne plus avoir de forces, tu t'écrouleras par terre et nous nous déchaînerons. À quoi bon retarder ta mort ? 

Ils étaient des milliards à la griffer lorsqu'elle escaladait une paroi rocheuse, l'air autour d'elle saturé de cendres et puant le soufre. 

Maintenant, ce sont aussi tes mains qui se font entailler par les pierres tranchantes. Tu n'as même pas besoin de nous pour te blesser. Tu te détruis seule, et tu détruiras le monde avec toi par ta différence. Nous sommes le remède contre le cancer que tu représentes dans notre société. Tu es comme une fausse note dans la sonate harmonieuse de notre communauté uniforme. 

Tu n'aurais pas dû naître. 

Tu ne mérites même pas de vivre.

Ils furent une infinité à s'arrêter avec elle lorsqu'elle stoppa en haut d'une falaise et se mit à écrire.

Qu'écris-tu donc, petite proie ? Peu importe. Cela ne te sauvera pas.

Ils furent une infinité à se laisser tomber avec elle du haut de la falaise.

Nous te suivrons partout... Quoi que tu fasses... Où que tu ailles... Nous serons là...

Ils furent une infinité à couler, paniqués, condamnés.



Image en média : symbole des Dregs. Just because Six of Crows is all my life. Et parce que ce fanart est beaucoup trop stylé. Donc aucun lien avec le chapitre, sauf le corbeau, et encore, les Dregs ils sont pas aussi méchants d'abord >:( (à lire avec une voix de gamine un peu boudeuse.)

À plus, petits foldingues !

Serres d'argentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant