Ann-Elizabeth marchait d'un pas vif dans l'avenue qui remontait jusqu'à l'immeuble de son père, le téléphone à l'oreille. Le temps de novembre était venteux et une légère pluie obligea la jeune femme à déplier un élégant parapluie.
- Non mais franchement, Katie, je m'évertue à te donner une allure présentable, mais toi tu ne fais pas d'efforts ! J'hallucine.
Malgré la météo, la jeune femme progressait sur ses Manolo Blahnik avec aisance.
-Bon, on a rendez-vous avec le styliste au showroom dans une heure. J'ai déjà sélectionné ma robe mais j'ai des retouches à faire. J'ai fait mettre différents modèles de côté pour toi. Là-bas, on aura aussi le coiffeur et l'esthéticienne qui nous feront des propositions pour voir ce qui nous convient en rapport avec le choix de nos robes.
Ann avançait d'un pas décidé tandis que les passants s'écartaient de son chemin, trop heureux de ne pas se faire écraser par le bulldozer en talon. Elle devait encore passer voir son père pour une histoire de sécurité rapprochée. Il avait insisté pour qu'elle prenne le temps de venir jusqu'à ses bureaux malgré son emploi du temps chargé.
- Si je te faisais confiance, tu irais à cette soirée avec une robe de prêt à porter trouvé dans le premier Kiabi venu. Non, tu y vas avec moi, va falloir que tu fournisses un effort.
Elle s'arrêta brusquement devant l'élégante entrée d'un immeuble haussmannien et tendit son parapluie dégoulinant au jeune homme en costume qui se trouvait près de l'entrée sans lui accorder un regard.
- Écoutes, on se rejoint directement devant la boutique. Et ne vient pas en basket, je t'en supplie!
Elle ne laissa pas le loisir à son interlocutrice de répondre qu'elle raccrocha son téléphone. Toute une éducation à refaire ces jeunes...
Elle fonça plus qu'elle ne marcha vers les ascenseurs, faisant claquer ses talons sur le sol impeccable et se mouvoir derrière elle une belle chevelure noire ondulée. Son regard gris coula vers la standardiste qui lui fit un signe de tête tout sourire. L'implant lui indiquait clairement que le geste était feint. Le sourire qu'elle affichait faisait réagir les battements de son cœur comme lors d'un mensonge éhonté. Mais Ann ne s'en formalisait pas. Le petit personnel de son père ne l'intéressait pas, et ce qu'il pensait d'elle coulait sur elle comme de l'eau.
Elle pénétra dans le bureau de son père sans aucune discrétion, ouvrant la porte sans prendre le temps de frapper, le coupant dans sa discussion avec un homme qui lui tournait le dos. Il se leva doucement, ouvrit un bras vers elle pour lui intimer de se rapprocher et l'accueillit d'un;
- Ah, nous t'attendions ma fille.
Ann-Elisabeth, qui s'attendait à pouvoir passer en coup de vent, fut surprise que sa présence soit espérée par un autre que son père.
Ses derniers temps, il lui semblait un peu étrange. Il s'inquiétait de tout, en particulier de l'avenir et le travail paraissait lui peser. La fatigue le rendait même un peu paranoïaque puisqu'il avait fait brouiller les signaux pour qu'on ne puisse pas lire à travers lui grâce à l'implant. Une prouesse qui avait dû coûter quelques milliers d'euros, mais que ses ingénieurs avaient réussi à mettre en place en à peine une journée.
De surcroît, Elle n'avait jamais eu besoin d'assister à la moindre de ses réunions, ni même à rencontrer aucun de ses collaborateurs alors pourquoi l'avait-il fait venir ?
- Nous ? releva-t-elle suspecte en déboutonnant le long manteau blanc cassé
Elle avança jusqu'à l'énorme bureau qui trônait devant l'imposante carrure de son père et l'embrassa tendrement sur la joue. La silhouette de cet homme moustachu, ventru et immense contrastait avec celle de sa fille, plus petite et plus menue.
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Protège moi (de mes sentiments)
RomanceAlors qu'elle mène la vie rêvée d'une parfaite petite héritière parisienne, Ann-Elizabeth se voit affublée d'un garde du corps sous les ordres de son père, un magnat de l'industrie pharmaceutique atteint par la maladie. D'abord réticente à l'idée de...