Le prince ensanglanté

Chapitre 11: Ezra

                    Le mariage remontait à il y a plus de deux semaines déjà, je n'avais néanmoins pas passé un instant avec mon épouse. On ne s'était plus parlé depuis que je l'avais laissé seule la nuit de nos noces. Quelquefois, j'étais passé en coup de vent dans nos appartements, mais uniquement lorsque je savais qu'elle ne s'y trouvait pas. Plusieurs nuits, j'étais allé me faufiler dans notre lit alors que Kiara dormait ou faisait semblant de dormir. Je partais toujours le matin très tôt avant qu'elle ne puisse se réveiller. J'avais tout fait pour que l'ont ne se retrouve pas face à face, mais étrangement j'avais depuis peu eu le besoin quelques soirs de me retrouver proche d'elle, d'une certaine façon se recrée l'ambiance de la certaine nuit que l'on avait partagé. Mais Kiara ne c'était pas tourner une seule fois vers moi, toutes les fois où j'étais venu dans la chambre, elle restait au bord du lit laissant suffisamment d'espace dans le lit pour que je n'aie aucune raison de la frôler.

Il était prévu que demain, nous partions pour Hamedan, j'étais parvenu à rendre ce voyage possible enfin. Il y avait une certaine chose que je ne pouvais pas laisser pour notre retour. J'étais le genre de personne à ne rien laisser à plus tard, je faisais ce qu'il y avait à faire au moment où je le devais. Or, depuis que je connaissais Kiara, je n'avais cessé d'être un lâche. Elle ne savait pas à quel point elle avait vu juste en m'insultant de ce mot précisément. Son cadeau de mariage attendait toujours que ma femme l'ouvre; Aslan Morris un petit duc qui avait la main sur une assez grande partie du port de Dakin. Arranger son enlèvement n'avait pas été des plus simples, mais il fallait que je lui donne au moins cela avant ce que je m'apprêtais à lui faire.

Cela faisait une bonne dizaine de minutes que j'attendais dans les fins fonds des cachots que Kiara soit escortée ici. Elle arrivait suivie de près par Dasdan qui se trouvait juste derrière elle. Lorsqu'elle fut à mon niveau, elle observa les couloirs dans lesquels nous nous trouvions avec une pointe d'impatience. Elle ne semblait pas à l'aise, ce que je comprenais car même en pleins jours, comme c'était le cas, les cachots étaient sordides, très pratiques si vous ameniez un prisonnier ici; l'atmosphère en soit était un outil de pression suffisant pour délier les langues s'il le fallait.

"C'est donc ici que vous passez le plus claire de votre temps, prince. Le cadre vous va à merveille, " persifla-t-elle.

Elle avait raison de ne pas avoir confiance en moi, j'allais lui offrir un cadeau, mais lorsque le moment arrivera je lui prendrais tout sans reculer. Alors si je peux gagner sa sympathie par un geste qui ne me coutais pas grand chose, je n'allais pas hésiter.

"Suis-moi," me contentais-je de répondre.

Kiara ne bougea pas, jusqu'au moment où j'ouvris en grand la porte devant laquelle on se trouvait. Elle finit par s'approcher doucement de l'homme qui était attaché au milieu de la pièce, sur une chaise. Aslan n'était pas dans le meilleur état possible, il avait gardé les traces du soir de mon mariage; je m'étais légèrement emporté et déchaîner sur lui. Mais les semaines qui étaient passées avaient estompé la plupart de ses mutilations. C'était un homme de presque une soixantaine d'années, ses cheveux avaient légèrement blanchi sur les côtés, et il avait une moustache fournie qui recouvrait légèrement sa lèvre supérieure.

Kiara était bien plus proche de lui qu'elle ne l'était de moi à présent, elle souleva la tête de l'homme et chuchota quelque chose, son nom, il me sembla. Il ne répondit pas, il était bâillonné, mais il marmonna tout de même en retour.

"Ezra," disait Kiara en se retournant vers moi.

La luminosité dans cette partie du château n'était pas la meilleure, je ne pouvais pas voir son visage clairement comme je l'aurais voulu. Je l'imaginais perdu, elle ne devait pas réaliser tout ce qui se passait devant ses yeux. Elle ne savait pas ce qu'elle devait faire.