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Victor
Je vous en prie, asseyez-vous, je vous invite, ne l'oubliez pas.
Hugo
Et bien je vous remercie, mais je ne suis pas un grand amateur de vin, ceci dit, je prendrai quand même un verre puisque les goûts, eux, changent à chaque instant.
Victor
Dites-moi Hugo, êtes-vous religieux ?
Il y a quelque chose dans vos manières qui me le laisse penser.
Hugo inspectant le rouge de son verre
Oh, vous savez, Jésus disait aimer, l'Église dit payé; cela ne me donne guère envie de faire partie de cette confrérie.
Victor intrigué, extasié
Vous n'aimez ni la poésie, ni le vin, ni la religion. Alors que je ne connais rien de mieux que la poésie et un bon vin pour réchauffer l'esprit et apaiser les mœurs.
Qu'aimez-vous ? Là est ma question.
Hugo passionné
La science, le progrès, voilà en quoi je place ma foi.
Victor attendri
Faites attention, le progrès et le monstre ont les mêmes racines.
Hugo joueur
La poésie n'a donc pas une part de vice caché sous ses vers ?
Victor feignant l'outrage
La poésie, c'est tout ce qu'il y a d'intime dans tout.
Du vice ?
Le poète ne doit avoir qu'un modèle, la nature; qu'un guide, la vérité.
Victor désespéré
Sans cesse le progrès, roue au double engrenage, fait marcher quelque chose en écrasant quelqu'un.
Qui écrasez-vous, Hugo ?
Hugo souriant
La logique
Victor impressionné
Lorsqu'on peut tout savoir, il faut aussi savoir tout taire.
Hugo pensif
Savoir, penser, rêver. Tout est là. Vous avez tout, tout ce que je n'ai pas.
Victor exaspéré
Vous savez penser, vous savez rêver, vous connaissez des choses que moi-même ignore. Vous avez tout Hugo.
Car jamais dans l'Homme l'espérance n'est vaine.
(L'Église sonna, l'instant se dissipa)
Hugo se levant
Comme il est agréable de parler avec vous, mais l'instant touche à sa fin.
Victor rêveur
Nous reverrons-nous ?
(Hugo était déjà sorti, seul un verre à pied vide et un papier chiffonné ornait la table).
