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Riverside, Californie, 6h24.

Un pied au sol, l'autre contre le cale-pied de ma moto. La grande étendue d'eau devant moi me fait un bien fou. Je retire mes gants, non sans faire attention à mes phalanges écorchées. Mais la douleur n'est rien face à la beauté du paysage. Depuis un mois, au petit matin, je suis là. Après une pauvre nuit de sommeil, je ne m'apaise que lorsque j'arrive ici.

J'ai découvert cet endroit après une bonne heure à rouler sans but précis. Je voulais simplement évacuer toute cette peine et ces pensées qui m'empêchent de fermer les yeux. Son sourire me manque. Ma joie de vivre s'est envolée en même temps que lui.

Je baisse la tête en direction de ma montre. Sept heures. Déjà. J'enfile rapidement mes gants, baisse ma visière et démarre à toutes allures. Je rejoins à vive allure les routes à grandes lignes droites et je laisse l'adrénaline m'envahir. Lorsque l'aiguille atteint les 320 km/h un rictus apparaît au coin de ma bouche et je ralentis la cadence, apercevant les premiers bâtiments de Riverside.

Je me dirige en direction du campus de l'UCR, l'université de Riverside. Les cours commencent dans moins d'une semaine et je n'ai toujours pas de colocataire pour cette première année. En même temps, je viens d'arriver en ville et malgré le taux d'étudiants élevé, la ville semble vide.

Tout me semble vide depuis son départ.

Mon téléphone vibre dans la poche arrière de mon pantalon, ce qui me fait sortir de mes pensées. Maman, j'imagine qu'elle souhaite des nouvelles, mais comme à mon habitude, je verrouille mon téléphone et laisse sonner.

Je n'ai pas la tête à l'écouter se plaindre de son énième petit-ami qui lui aura fait faux-bond. Depuis petite j'ai toujours eu l'impression d'endosser le rôle de mère. Mais quand on a 7 ans et que l'on voit débarquer un homme différent chaque soir qui vous dit " sois sage et rentre dans ta chambre", on assimile très vite les choses, voire un peu trop vite.

Je gare ma ninja h2r dans un garage privé non loin du campus. En même temps, au vue du bijou que j'ai entre les mains, vaut mieux ne pas l'exposer aux yeux de tous. Je marche vers l'entrée du campus et retrouve l'escalier pour monter sur le toit du bâtiment F, le plus haut du campus.

Les pieds dans le vide, un joint à la bouche, les yeux rivés vers les bâtiments en face de moi. La bibliothèque toujours allumée prône au milieu de tous. Ses grandes baies vitrées laissent apercevoir le nombre incalculable de livres mis à disposition. Ses étagères en bois vieilli brun et ses longues tables rendent l'endroit terne.

Comme à leur habitudes, le peu d'étudiants déjà en place sur le campus se réveillent et s'activent. La vieille Madame Chyst allume le bureau à l'entrée, le groupe de footballeur sort des vestiaires et commence leurs tours de terrain, le couple qui n'ose pas l'avouer à leur amis se retrouvent derrière la grande fontaine et toujours cette même fille et son carnet qui s'assoit au même banc et regarde en ma direction avant de détourner les yeux timidement.

Un poussée d'adrénaline (ou juste mon joint qui fait effet) emmène mon corps jusqu'aux escaliers afin d'aller dans sa direction. Mais en sortant du bâtiment, volatilisée. Encore. Ça fait une semaine que je suis arrivée sur le campus, elle est arrivée deux jours après moi. Je l'ai aperçue toujours au même endroit depuis que je monte sur le toit. Mais je ne l'ai jamais vue ni croisée sur le campus.

Je sens mon téléphone vibré dans ma poche mais je n'y prête pas attention et me dirige vers la machine à café dans le hall de la bibliothèque. Je prends mon café noisette et me dirige vers ma chambre universitaire. J'entends de l'agitation dans les couloirs. Les chambres universitaires sont dans les bâtiments B et C. Le bâtiment B est réservé aux filles et le C aux garçons.

BATS-TOIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant