La déception.
Je l'ai connu à de nombreuses reprises et sous toutes ses formes.
Elle est inhérente à toute chose, à toute relation quelle qu'elle soit.
La preuve irréfutable que toute chose a une fin. Car c'est elle, tel un catalyseur provoque la fin d'une expérience chimique ; foireuse en l'occurrence. Laissant derrière, certe un goût amer mais un souvenir. Celui d'une expérience nouvelle, preuve d'une existence autre qu'insipide. Et celui qu'une nouvelle tentative serait bien mieux que cette défaite quand bien même rien ne présage explicitement la réussite de celle-ci à part la promesse d'un nouveau défi.
Décevante.
Je l'ai été plusieurs fois et je ne connais que trop bien ce sentiment d'être à l'origine du malheur d'une personne à qui l'on tient. Rien de gratifiant et de rassurant. Mes regrets et la culpabilité mordante qui me suivent encore aujourd'hui sont les témoins de la déception que j'ai pu causer autour de moi.
Il est presque inhérent que rien ici bas ne se solde d'une belle déception, ressentiment d'un échec. Croyez moi toute chose tôt ou tard devient décevant.
Décevoir.
De n'être pas la seule à avoir déçu un jour est plus ou moins réconfortant.
Toutes les déceptions ont pour unique responsable l'humain. En effet, comment être déçu si ce n'est par le fait de son semblable. Décevoir est incontestablement le propre de l'Homme, de tous ceux qui nous entourent et à qui par malheur nous tenons.
Je peux donc le dire par expérience, aimer c'est s'attendre à être déçu. Une preuve essentiel de l'imperfection humaine. Parce que reconnaissons-le, l'homme est imparfait, capable du meilleur comme du pire.
Cela dit, peut-on le lui reprocher sans bafouer sa nature immuable ? Autant reprocher à un putois qu'il put.
Et comme la dualité en toute chose, en déception, il y a incontestablement le décevant, le coupable et le déçu, la victime. Cependant il arrive que la victime soit en même temps son propre coupable. J'ai été assez déçu de moi-même pour le savoir ; qu'il n'y a personne d'autre à blâmer pour son propre fait. Cette auto-déception est d'avantage douloureuse que les autres. Car il faut le reconnaître, blâmer les autres pour nos malheurs est moins affligeant que se tenir soi-même responsable de ceux-ci.
J'ai beau être consciente de tout cela, je suis incapable de faire abstraction de ce sentiment de déception, de cette douleur qui me tiraille les entrailles à l'instar de coups de poings dans le ventre et qui fait un mal de chien. J'ai le cœur qui se fissure d'avantage à chaque fois que ma conscience me rappelle la raison de cette douleur. Et ma respiration devient plus lourde à chaque fois que je tente de pleurer ma peine, incapable de trouver la force et le souffle d'extérioriser ma souffrance, ma colère, ma haine et ma honte.
Comme si elle me tenait également coupable de cette déception.
Affalée et affaiblie par ma dérive émotionnelle, mes yeux fixent inlassablement les flammes dansantes de la cheminée. Seule source de lumière qui éclaire la pièce comme chaque soir depuis que j'ai sombré. N'ayant plus aucune notion du temps qui s'est écoulé depuis que je leurs ai claqué la porte au nez.
Eux...
Eux, que j'aimais si fort.
Eux, à qui j'aurais donné mon âme sans aucune hésitation.
Eux, qui m'ont pourtant trahis sans aucune vergogne.
Eux, qui était ma famille et mon repère.
Ma haine n'en grandie que d'avantage.
Cet appartement n'a jamais été aussi vide que ces derniers jours. Je ne compte plus le nombre de fois où mon portable ainsi que le fixe ont sonné.
Imperturbable dans ma souffrance, j'ai fini par faire abstraction du monde autour de moi comme si à force d'être frappé de plein fouet par le souvenir de cette trahison je suis arrivée à m'enivrer de cette déchirure qui fait saigner mon âme. Nul doute que j'en avais besoin de cet isolement au risque de devenir destructrice.
Et pourtant, je n'en ressens aucun soulagement. Parce qu'au fond je sais que j'ai indéniablement besoin de tout détruire pour me libérer.
Mon corps épuisé et sale, - depuis des jours - allongé devant le guéridon qui se trouve près de la cheminée, est parcouru d'un énième frisson signe que mon corps supporte de moins en moins que je le traîne sur le carrelage froid chaque jour.
À ce rythme je risque de tomber gravement malade en plus d'être au vingt cinquième sous sol émotionnelle.
Cela dit, ce ne serait sans doute pas plus mal que j'en finisse une fois pour toute. Ils seraient débarrassés pour de bon du poids que je représente pour eux depuis mon enfance, ils n'auraient plus à risquer autant pour moi...et tout est bien qui finit bien non ?
Parce qu'il faut que je l'admette, j'ai ma part de responsabilité dans toute cette histoire. Sans le savoir et même le vouloir j'ai été l'instigatrice de cette affaire. Quelque part j'ai gâché leurs vies quand bien même ce soient eux qui ont détruits la mienne pensant qu'ils me protégeaient.
Sauf qu'ils se sont trompés. Ils auraient dû se protéger eux-mêmes du danger que je constituait pour leurs vies.
Soudain ses paroles à lui me reviennent encore à l'esprit.
« - Tu détruis plus que tu n'apaise... Tu es comme cette nicotine. Au premier coup, on a l'impression d'avoir trouvé ce qui nous manquait, ce qui apaise, notre antidote. Alors comme des idiots on en fait notre dose salvatrice du quotidien jusqu'au jour où on se rend compte qu'en fait... c'est surtout un cancer des poumons que tu nous as apporté... Tu es un poison, pas un remède. »
Hypocrite, venant d'un fanatique de la nicotine.
Si au départ je me suis refusée de croire à ses mots, aujourd'hui ils prennent tout leurs sens dans ma tête. Une évidence. Je ne suis pas un remède, pas une fleur, encore moins un ange.
Ah ça, non.
Je suis un poison, parce que j'ai le malheureux don de pourrir l'existence de ceux qui me laisse y entrer.
Pas une fleur, plutôt une épine. Celle qui pique et écorche les curieux qui s'approche un peu trop de sa pointe acérée. Je n'embellis pas, non. Je dégrade la beauté de la rose.
Un ange encore moins.
S'il avait fallu que je le sois, sans doute aurais-je été déchu dès le premier jour. Mes ailes m'auraient été arrachées à coup de sci et sans la moindre hésitation.
Toutefois je ne me serais pas laissée faire aussi facilement. Parce que, j'ai beau avoir une largesse d'esprit et être émotionnellement flexible, je me connais ce côté sombre et tenace qui m'aurait boosté à me battre.
Jusqu'à mon dernier souffle.
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Until My Last Breath
RomanceAlors qu'elle tente vainement de reconstituer les fragments éparses d'un fameux souvenir que sa mémoire aurait sournoisement soustrait à sa conscience, Moon fait la rencontre d'un sombre jeune homme qui semble se complaire dans l'épave de son âme no...