Under the neon lights [TaeGi - JiKook]

Tokyo by Night

Taehyung desserra d'un mouvement le nœud de sa cravate alors qu'il sortait enfin de l'immeuble de bureaux. Cette journée l'avait achevé, il n'en pouvait plus.

Il était presque minuit et son patron l'avait retenu jusqu'à maintenant, lui demandant de nouvelles modifications dans sa traduction à chaque fois qu'il lui envoyait le fichier corrigé.

— Sale enfoiré, râla-t-il en se dirigeant vers l'entrée de métro la plus proche.

Taehyung travaillait depuis presque deux ans à Tokyo en tant que traducteur. Il maîtrisait le coréen - sa langue maternelle - le japonais, le thaï, l'anglais et l'hindi. Quand il était sorti de l'université, son diplôme en poche, plusieurs entreprises prestigieuses lui avaient fait les yeux doux, lui promettant un bon salaire et une belle perspective de carrière. En choisissant celle-ci, il ne s'attendait pas à tomber dans un service dont le chef était un cinquantenaire raciste qui passait ses nerfs sur les hafu et les gaijin. 

[Hafu : métisse japonais. Gaijin : étranger au Japon]

Presque chaque vendredi soir c'était le même scénario: son patron lui envoyait des documents à traduire "de toute urgence" et refusait plusieurs versions avant de le laisser enfin partir. Taehyung vérifia l'heure sur sa montre : 23h50... Beaucoup trop tard pour rejoindre Namjoon et Jin au cinéma.

Il aurait dû s'en douter, pourquoi avait-il promis à ses amis qu'il pourrait sortir avec eux ce soir ?

Seul dans la rame de métro, Taehyung se laissait emporter au loin par ses pensées. Depuis combien de temps n'avait-il plus appelé ses parents ? Il devrait essayer de les joindre ce week-end. Dans les moments de fatigue physique et mentale comme celui-ci, repenser à la Corée, à Daegu et aux champs de sa jeunesse lui donnait un peu de réconfort. Il avait voulu changer de pays, voir le monde en commençant par le Japon tout en gagnant plus que correctement sa vie. Ce travail lui permettait d'aider ses parents financièrement et ces derniers étaient très fiers de lui. Il devait se souvenir de cela pour tenir le coup et ne pas envoyer une bonne claque dans la gueule de son enfoiré de chef.

Quand la voix automatique annonça la station de Shin-Okubo, le quartier coréen, il se rendit compte qu'il n'avait pas encore dîné et qu'il mourrait de faim. Ce n'était pas son quartier, mais penser à ses parents lui avait soudain donné envie de manger un plat de chez lui. Il descendit du métro pour monter les marches menant à la surface, d'alléchantes odeurs lui titillant déjà les narines.

La plupart des magasins et échoppes étaient fermés à cette heure, mais certains restaurants affichaient encore une pancarte "열려 있는" (ouvert) et les clients étaient légions. Bien sûr, un vendredi soir, les gens voulaient sortir, fêter la fin de la semaine...

Taehyung passa devant plusieurs établissements brillamment éclairés sans voir un seul siège libre à travers les vitrines. Il tourna à un angle pour pénétrer dans une rue plus étroite, bordée de néons multicolores.

Il poussa la porte d'un petit restaurant qui ne payait pas de mine, demandant poliment s'il leur restait de la place pour une personne. Malheureusement la jeune serveuse lui indiqua bien vite qu'il n'y avait plus de siège libre, mais qu'il pouvait commander à emporter s'il le souhaitait.

Ce que Taehyung souhaitait, c'était s'installer à une table, un bar ou même sur une caisse en bois et pouvoir déguster un plat coréen, peu importe lequel, dans une ambiance chaleureuse. Inutile que quelqu'un lui fasse la conversation, tout ce qu'il voulait, c'était ne pas se sentir seul.

Il entra dans deux autres restaurants pour se faire répondre la même chose à chaque fois. Dépité, Taehyung pensa qu'il essayait encore une fois avant de se résoudre à acheter son plat à emporter pour le réchauffer chez lui plus tard. Il pourrait toujours regarder un drama coréen sur son ordinateur portable, ça ferait illusion. Comme quand il était au lycée.