Chapitre 1

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« And if you don't love me now,

You will never love me again,

I can still hear you saying,

You would never break the chain »

Fleetwood Mac – The Chain

Comme tous les ans depuis une décennie au manoir Saint-Jean, résidence d'une des plus vieilles familles d'Annecy, était organisée la plus grande vente de charité de la région. Toute personne ayant quelque chose à vendre était la bienvenue. Tableaux, objets de collection ou pas, même certains vêtements de marques avaient déjà trouvé preneurs. Le but étant d'amasser suffisamment d'argent pour la fondation Snaveli. Créée dans les années 70, elle restaure et conserve notamment d'anciennes œuvres d'art. Certaines avaient pu être sauvées du grand incendie de 1952 ayant ravagé une partie du château d'Annecy. D'autres avaient été retrouvées après la guerre.

Ce soir, le clou du spectacle était la révélation d'un livre perdu depuis des années et ayant soit disant appartenu à Madame de Snaveli, propriétaire du manoir au 18e siècle. A l'intérieur, elle y raconterait sa vie au manoir et sa fabuleuse histoire d'amour avec son mari, le Comte de Snaveli. Mais personne ne l'avait jamais vu, si bien qu'il était de coutume de penser que ce n'était qu'une légende. Pourtant, quelqu'un semblait l'avoir enfin trouvé.

Après la soirée, était prévu un bal afin de remercier les « donateurs ». Avec le temps, c'était davantage devenu l'occasion pour le gratin annécien de se retrouver et de parler affaire en ayant l'impression de faire une bonne action. Mêler l'utile à l'agréable dirons-nous. Le procureur Chappaz avait été convié, histoire de faire connaissance avec le nouveau procureur fraîchement arrivé. Fraîchement parce que cela faisait déjà deux fois qu'il déclinait, une troisième aurait été mal reçue. Il avait bien tenté d'embarquer Cassandre mais, petit fils oblige, elle avait refusé.

- Ah ! Monsieur le procureur je suis ravie d'enfin vous rencontrer ! J'ai bien cru devoir essuyer un nouveau refus de votre part. Plaisanta une femme.

- C'eut été impoli. Répondit-il sur le même ton. Madame ?

- Savigner. Cécilia Savigner. Organisatrice de la soirée. Se présenta-t-elle finalement en lui serrant la main. Alors, la soirée vous plaît ?

Que répondre à une telle question ? Ironisa-t-il intérieurement.

- Beaucoup. Vous avez du beau monde. On en oublierait presque que c'est une vente de charité.

- Je croirais entendre une pointe de sarcasme ?

- Du tout.

- Entre nous, ce sont encore eux qui donnent le plus. Ah excusez moi, le devoir m'appelle, j'ai été enchantée.

- De même. La salua-t-il en feignant un sourire. « Une soirée sympa » tu parles, je la retiens la Cassandre. Et avec qui j'vais danser moi ? Se plaignit-il.

Le problème ne se posa pas. Quand vint le moment des enchères, une dizaine de lots partirent puis un cri fendit l'air et glaça le sang de tous ceux qui l'avaient entendu. Au bout de quelques secondes qui parurent durer une éternité, une jeune femme en pleurs sortit d'une pièce adjacente et couru à travers la salle.

Proche de la porte en question, Chappaz se précipita avec curiosité vers la source de terreur, suivi de plusieurs autres personnes. Au sol, comme endormie, Madame Savigner était étendue et ne bougeait plus. Le procureur s'empressa de vérifier le pouls qui ne répondit pas à l'appel. Par précaution, il prit également le poignet mais l'absence de vie se confirmait. Il était minuit vingt et Cécilia Savigner était morte.

Les éclats du coeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant