- "Tu n'es qu'un bon à rien ! Un menteur ! Dégage et ne reviens plus jamais !"
La porte se claque à quelques centimètres de mon visage seulement, me provoquant un réflexe de clignement à la menace. J'aurais dû répondre. Et j'ai des choses à dire en plus.
Je fixe un instant la porte close devant moi puis le sol. Je me retourne ne laissant qu'un soupire sur le palier. Il parait que c'est difficile de se défaire d'une réputation. Surtout si elle est mauvaise. Je peux vous le confirmer. Je pense que j'avais ma chance ici. Un travail simple, pas trop mal payé, des horaires acceptables et une équipe qui semblait soudée. Peut-être trop soudée pour accueillir un nouvel employé ? On ne saura jamais la vérité je pense...Quoi qu'il en soit, j'ai besoin de souffler un peu. Cette semaine a été éreintante. Je me dirige d'un pas lent vers le casino de la ville en comptant mes pas trois par trois. Un frisson me parcours et j'éternue dans mon coude. J'en profite pour regarder l'heure sur ma montre. 18h47. Il fait frais pour une soirée de juin. Je remonte mon foulard presque jusque sur mes yeux et soupire. Chienne de vie.
Je passe la porte automatique du Casino et salue l'agent de sécurité. Je compte la jouer discret. Je rentre, je fais ce que j'ai à faire et je retourne chez moi. Mais Charles en a décidé autrement apparement...
- "C'est quoi cette tronche ? T'es malade ?"
Mes yeux se tourne vers le vigile et je secoue la tête. Non, je ne suis pas malade.
- "Encore un entretien qui a foiré, hein..."
J'hausse les épaules. Il peut bien se la garder, sa pitié. Je fais un pas en avant pour démontrer que je ne veux pas continuer de parler, mais il enchaine.
- "... Tu sais que tu n'es pas bien accueilli ici. Pourquoi tu insistes ?"
Je soupire et le regarde dans les yeux. Je n'ai pas envie de discuter pour le moment. Et il le comprend, visiblement. C'est bien.
- "Fait attention à ton p'tit cul. J'ai entendu du bruit... Y'en a qui veulent se faire ta peau. Parait que tu triches. Et pas qu'un peu."
Je roule des yeux et retire ma veste. Je retrousse les manches de mon polo bleu acier et retourne les poches de mon jeans. Je plante alors mon regard dans le sien. Tu vois bien que je n'ai rien sur moi pour même essayer de tricher, non ?
Charles rit un peu et me donne une tape sur l'épaule qui me fait presque basculer en avant.
- "Toi ! T'a pas froid aux yeux. Allez, y'a une place à la table quatorze, tu peux y aller. Courage !"
je le regarde en fronçant un peu les sourcils. Il m'a fait mal cet imbécile. D'un petit pas rapide, je rejoins la table numéro quatorze. Que des nouvelles têtes. Trop facile.Je peux entendre le clocher sonner les 22h au moment où je quitte le Casino. Les mains dans les poches, je fais courir mes doigts le long des liasses. 4'000 euros. C'est pas mal. Satisfaisant.
Comme je ne suis jamais tranquille que chez moi, la nuit tombe et les ombres sortent. Je me retourne face à l'une d'elle qui semble me suivre depuis quelques minutes maintenant. Djego.
Sans rien lui dire, je roule des yeux et lui tend un doigt d'honneur bien droit, l'invitant à aller se faire mettre.- "C'est comme ça que tu salues ton vieil ami ? Hey, dis-moi. Combien ta triche t'a rapportée ce soir ? T'a pigeonné des p'tits nouveaux il parait, hm ? Et moi, mon argent volé, tu comptes me le rendre quand ? ça tombe bien, ce que tu as dans tes poches ça me suffit ne t'en fais pas."
- "Je ne triche pas." la buée qui sort de ma bouche quand je parle me fait remonter mon foulard sur mon nez.
- "... C'est tout ? Bon d'accord. L'argent maintenant." il me sourit. Je ne le lui rend pas. Je préfère me retourner et m'en aller. Oui... Maison, un thé, dodo, au chaud... Bonne nuit.
- "J'ai pas de patience ce soir, pas de pot mon chou. Massacrez-le." Ha ça y'est. les autres ombres se montrent enfin. Le cliché typique du méchant corpulent à l'air hautain entouré de ses hyènes rieuses et maniaques. Je monte mes mains devant mon visage et fait mine de les prendre en photo. Tchic.
Là, tout de suite, une vague d'adrénaline me gagne. Je dois courir. Et vite. J'ai bien mis 2 secondes avant de comprendre qu'ils sont vraiment sérieux cette fois. Peut-être que l'arme pointée sur moi m'a donné un petit indice. Au hasard.Et là je cours. Je cours depuis dix bonnes minutes et je sens mes poumons qui brûlent, ma gorge qui sèche, mes mollets se raidir et surtout ma vision se troubler. Encore. Cours encore putain. Ils vont quand même pas m'éclater la gueule comme ça ? Je pourrais m'arrêter, on pourrait discuter. J'accélère en puisant mon énergie de je ne sais où. Cours putain cours. J'ose un oeil par dessus pour épaule pour voir mes poursuivants. Mauvais timing. Mon tibia gauche percute de pleins fouet la borne à incendie sur le trottoir. Je trébuche. La chute. Mon genou lacéré en pleine surchauffe m'empêche de me relever aussi vite que je l'aurais voulu. une autre douleur aux côtes cette fois-ci me fait oublier ma blessure. Un autre coup, au même endroit me fait m'effondrer au sol. Je me recroqueville et passe mes bras par dessus ma tête en serrant les dents.
- "On l'a rattrapé !"
Non sans dec ?
- "Tabassez-le les gars, et prenez l'argent"
Je ferme les yeux et sens les coups me déchirer de douleur. Ils sont 4 acharnés, assoiffés de sang. De mon sang. Défend-toi allez, putain. Fais quelque chose !
Un bruit anormal parvient à mes oreilles. Mes côtes se brisent, l'air me manque. J'ouvre les yeux pour voir Djego debout au dessus de moi, en train de comprimer ma poitrine de tout son poids. Ses quatre sbires me tiennent fermement chacun de mes membres. La pression entre le bitume et ses cent-dix kilos va me faire éclater. Il ne me faut pas plus de cinq seconde pour arrêter de me débattre. Je ne peux rien faire. Alors je le fixe droit dans les yeux. S'il compte me tuer, je veux que mon regard ne le quitte jamais.
Je sens ses gars me faire les poches et ne peux réprimer un léger sourire en coin. Ils ne trouveront rien. J'ai pris soin d'égarer mon pactole pendant la course poursuite. Ils peuvent fouiller ils ne trouveront rien.
- "Patron ? Y'a pas la thune !"
- "Comment ça ? te fous pas de ma gueule" les voix s'éloignent.
- "Nan je jure ! on vient de tout fouiller, y'a pas..." Ma vision se trouble
- "Putain ! Regarde encore !" Tout ralenti...
- "Eh ! Où est-ce que t'a foutu ton fric, fils de pute ?" je prend une grande inspiration et lui crache au visage avant d'afficher un large sourire et de sentir mon corps définitivement me lâcher.
Un brouhaha lointain est tout ce que mes oreilles ne peuvent plus que percevoir..*.
- "Restez avec nous ! Monsieur, vous m'entendez ? Ho mon dieu il ouvre les yeux... Monsieur ?"
Une lumière blanche inonde mon esprit et j'ai l'impression que tous mes souvenirs me reviennent d'un coup. J'ai un petit sursaut et je regarde avec peine l'infirmière au dessus de moi. Je place ma main au dessus de mon visage et la regarde, jouant avec son ombre sur mon visage en laissant filtrer la lumière aveuglante à laquelle je m'habitue peu à peu.
Soudain, une vive douleur me parcours le corps. Un goût de sang dans la bouche. Ça y'est, je me souviens de tout. Djego et ses hommes. Apparement je n'y suis pas resté ? Je souris un peu, presque fier de savoir que leur plan aura foiré de A à Z. Peut-être qu'ils me ficheront la paix pour une fois. Moi 6, Djego toujours 0.L'ambulance s'arrête après quelques minutes de route encore. L'infirmière me demande comment je me sens, un peu par principe car au vu de mon état la question est complètement rhétorique. Le brancard descend de l'ambulance et elle repart. Une étrange sensation de déjà vu occupe mon esprit pendant une poignée de secondes. Je n'arrive pas à savoir d'où ça vient. Je souris un peu en regardant le véhicule s'éloigner. Marrant, l'ambulancier a les cheveux rouges...
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Univers Parallèles : Les héros de Chasme
Short StoryRecueil de nouvelles concernant les héros de nos différents RP