Dégoût & des Saveurs [TodoBaku]

Chapitre 10 : La ballade

Un gobelet Starbucks en main, Katsuki remonte lentement l'avenue, Shoto à ses côtés. Le soleil est haut dans le ciel et ses rayons les chauffent doucement, sans qu'il fasse trop chaud.

Après s'être plus ou moins avoués leurs attirances mutuelles en acceptant que cette sortie soit considérée comme un rencard, un silence gênant s'était installé entre eux tandis qu'ils se tenaient toujours devant la peinture. Alors que jusqu'à maintenant, ils n'hésitaient pas à s'envoyer des balles perdues, à cet instant, ils ressemblaient plutôt à des collégiens avouant leur premier amour.

Heureusement, une femme, apprêtée d'une belle combinaison noire et de talons hauts, aux cheveux blancs striés de mèches rouges et remontés en un chignon, s'était approchée d'eux et s'était présentée comme la sœur ainée de Shoto, Fuyumi. À partir de là, la gêne disparut progressivement pour laisser place à de cordiales présentations. Bien sûr, elle connaissait déjà Katsuki en tant que cuisinier, mais, l'inverse n'était pas vrai et son intervention permit d'alléger l'atmosphère.

Katsuki apprit donc qu'elle était galeriste, exposant et vendant les œuvres d'artistes qu'elle dénichait elle-même, et la deuxième de la fratrie. D'après Shoto, son caractère enjoué faisait d'elle le rayon de soleil de la famille.

Tout en sortant de la galerie après avoir dit au revoir à Fuyumi, ils avaient continué de discuter de leurs familles respectives. Katsuki apprit également que Toya, l'aîné des quatre, était chirurgien plasticien, notamment pour les grands brûlés et les personnes avec une malformation. Quant à Natsuo, le troisième, ce fut pour le domaine de la viticulture qu'il se passionna, devenant un œnologue plutôt reconnu.

- Et vous, vous faîtes quoi dans la vie ? demande Katsuki, en renvoyant le ballon d'un enfant.

Ils ont quitté l'avenue pour un parc arboré de grands arbres où des familles font du vélo, des couples pique-niquent sur la pelouse et une jeune femme joue de la flûte traversière pour un public admiratif.

- Je suis trader.

Surpris, il recrache la gorgée qu'il vient de prendre, toussant ses poumons.

- Vous...trader ?

- Oui. C'est si étonnant ?

Katsuki ouvre de grands yeux avant de hocher la tête.

- Ouais ! J'ai du mal à vous imaginer crier et spéculer à la bourse. C'est à l'exact opposé de votre...tempérament.

Sous cette remarque, le rire de Shoto résonne alors à ses oreilles. Il est encore plus adorable que tout à l'heure.

- C'est vrai. Mais, je ne travaille pas souvent à la bourse. Je gère les investissements de Todoroki & Co surtout, directement d'un bureau.

- Je vois.

Katsuki se fait tout de même la réflexion que c'est inattendu et que Shoto ainsi que ses frères et sœurs ont des métiers assez...prestigieux. De tels parents, une éducation stricte sur les convenances, de hautes études...c'est étonnant qu'il ait accepté que leur escapade devienne un rencard.

- Le prenez pas mal, mais...vos parents semblent plutôt vieux jeux, vos...préférences ne vous attirent-elles pas leur désapprobation ?

Lui jetant un regard amusé, Shoto s'avance et décide de s'asseoir sur un banc libre sur leur gauche, son gobelet toujours en main. Il l'invite alors à le rejoindre et c'est ainsi, assis côte à côte, qu'ils regardent les habitants passer.

- C'est vrai. Mes parents sont des gens stricts, qui mettent un point d'honneur à ce que nous sachions nous tenir en société. Pour eux, nous devions faire de bonnes études, avoir un bon métier afin de subvenir à nos besoins sans devoir dépendre de leur fortune. Cela n'a pas toujours été facile durant notre enfance, mais, nous n'avons jamais manqué de rien.

Son regard vairon se porte au loin alors qu'une légère brise s'engouffre dans ses cheveux bicolores. Il fait si posé ainsi, presque hypnotisant, songe Katsuki. Depuis qu'il a accepté la possibilité que ses sentiments soient plus amoureux qu'autre chose, il le trouve magnifique.

- Néanmoins, ce sont des gens très ouverts d'esprit et pour eux, nous avons le droit d'aimer qui nous voulons. Ils connaissent mes préférences, comme vous dites, et les acceptent. Cependant, jusqu'à maintenant, je ne leur ai présenté personne...ce qui pourrait bientôt changer, ajoute-t-il alors, en lui jetant un regard.

Katsuki se pince les lèvres, légèrement embarrassé par la réponse, mais tout de même flatté. Il n'avait pas envisagé aussi loin, or, à bien y réfléchir, cela ne le dérangerait pas.

- Pourquoi ?

Et Shoto comprend parfaitement la signification de cette question.

- Parce que, jusqu'à présent, personne n'en valait la peine.

Face à cette révélation dite avec tant de franchise et d'aplomb, la respiration de Katsuki manque de s'arrêter et son cœur loupe un battement. Pour la première fois, les rôles sont inversés : il pique un vrai fard, lui donnant des bouffées de chaleur. Y'a pas idée de lui dire des trucs comme ça, si...calmement ! Il devient bien trop sensible face à lui, va falloir y remédier.

Le blond voit alors Shoto triturer son gobelet de ses doigts, semblant visiblement vouloir rajouter quelque chose.

- J'ai un aveu à vous faire.