𝑬́𝒅𝒊𝒕𝒐𝒓𝒊𝒂𝒍 - Le Tour de France

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Chaque année, le mois de juillet en France rime avec Tour de France. L'épreuve sportive berce les après-midis où il fait trop chaud pour sortir ou trop humides pour être dehors. Il accompagne également ceux qui aiment le sport ou le cyclisme & les amateurs de paysages.

Mais il a quoi de si particulier, ce Tour de France ?

Crée en 1903, le Tour de France est l'une des principales épreuves sportives mondiales. À la base, il a été créé pour augmenter les ventes du journal L'Auto par les responsables de celui-ci et l'on peut dire que ce fut une réussite, la course se déroulant chaque année depuis à l'exception des deux guerres mondiales. Il s'agit désormais du troisième événement sportif le plus regardé dans le monde après les Jeux olympiques et la Coupe du monde de football. Eh oui, regarder des cyclistes suer pendant cinq heures dans des cols de montagne les fesses posées sur une selle de vélo rassemble du monde !

Si lors de la première édition elle avait lieu uniquement sur une semaine et faisait réellement le tour de la France, cela fait désormais bien longtemps que les parcours ne se contentent plus de cela. Les départs se déroulent même régulièrement à l'étranger pour des questions géopolitiques. Chaque année, le tracé est d'ailleurs l'objet de nombreux débats et mécontentements dans les zones non sélectionnées, tandis qu'on jalouse les Alpes, lieu incontournable de l'épreuve qui a la chance de voir les cyclistes se battre avec ses terribles cols tous les ans.

Mais pourquoi tant de succès ?

Parce que le Tour de France, c'est peut-être la seule épreuve sportive qui est bien plus que ça. Alors qu'année après année, le sport devient de plus en plus commercial, chacun est encore libre de regarder l'intégralité des épreuves sur une chaine publique. Nouveauté d'ailleurs depuis l'année dernière et le premier Tour de France féminin, plusieurs de ses étapes sont également diffusées en intégralité, avec un dispositif tout aussi important. Ainsi, pour la première étape ce dimanche 24 juillet, le départ du Tour hommes n'a été lancé qu'une fois celui féminin arrivé.

Alors que tout est payant (ou presque) dans le sport de haut-niveau, le Tour de France est libre d'accès. Chacun peut le matin décider qu'il a envie d'aller le regarder, partir, s'installer sur le bord de la route et attendre pendant des heures sous le soleil ou la pluie que la caravane puis le peloton passe enfin. Plusieurs heures d'attente pour cinq petites minutes à regarder passer un peloton à vive allure.

Mais c'est aussi le sport des campagnes. Celui où elles sont mises à l'honneur. Alors que le sport se trouve souvent dans les villes, dans des stades ou gymnases, le Tour de France est la fête des campagnes et de la ruralité. Le peloton traverse village après village, les paysages sont composés de montagnes, de prairies et de champs. Dans des endroits où rien ne se passe jamais, avoir le Tour de France peut être l'événement de la décennie sans grande préparation pour le village traversé.

Si certains s'installent devant leur télévision pour vibrer pour un cycliste préféré, ou dans l'espoir de voir pour une fois l'échappée sortir vainqueur et non rattrapée par le peloton, d'autres le font pour découvrir la France et ses paysages au fil des déplacements de sportifs.

Et puis parfois, le Tour de France, c'est un peu l'irrationnel, comme quand un inconnu s'échappe à un kilomètre de l'arrivée et vole la vedette aux favoris. Ou quand des dizaines de milliers de personnes se rassemblent dans une montée dans les Vosges, la transformant en un véritable col des Alpes pour fêter les adieux du cycliste du pays qui les a fait rêver depuis des années.

Car peut-être que contrairement à certains sports, dans le cyclisme, c'est l'espoir d'une victoire à un moment au cours des cinq heures de course ou au milieu du tour alors qu'il porte le maillot jaune depuis plusieurs jours qui procure encore plus d'émotions que la victoire elle-même et on aime les sportifs qui tentent mais malheureux.



Il n'est bien sûr pas épargné par les critiques. Quid de l'environnement avec les déplacements de nombreuses voitures et cars pendant trois semaines ? Des actions sont déjà menées pour la récupération des déchets qui autrefois jonchaient le bord des routes dans des zones de collecte, mais la caravane, notamment publicitaire, reste problématique. Néanmoins, les parcours sont normalement fait pour ne pas avoir à prendre l'avion en cours d'épreuve, les déplacements se faisant dans les bus d'équipe, avec de véritables questions sur la récupération des sportifs.

La dangerosité de la discipline et le manque d'actions de protection de l'organisation, notamment dans les descentes de cols et sprints massifs, est également parfois critiquée. Pour la première fois cette année, des matelas de protection ont été installés dans ceux les plus dangereux pour éviter de voir l'un d'entre eux tomber dans le ravin. Cela faisait suite au décès de Gino Mader dans le Tour de Suisse durant le mois de juin. Temps gelés en haut de col en cas d'arrivée en bas d'une descente, vérification des trajets, un groupe de travail a été organisé et ses actions ont été saluées par les premiers intéressés.

Et puis reste la question du dopage planant sur l'épreuve et le sport depuis le scandale des années 2000. Une ombre projetée sur chaque vainqueur un peu trop fort, sur chaque montée un peu trop rapide. Pourtant, nombreux sont ceux à l'oublier quand le sport se transforme en spectacle parce qu'au fond, chacun rêve à un cyclisme propre tout en sachant que la bulle peut à chaque instant exploser. Et les exploits, bien que parfois incompréhensibles ne suffisent pas à s'en détacher si le combat est beau.

Peut-être parce qu'à côté de ça, les cyclistes sont courageux, finissant leurs étapes ensanglantés ou blessés. Peut-être parce qu'ils sont fair-play, vantant les louages de leurs adversaires et beaux dans la défaite. Peut-être parce que c'est un sport d'équipe gagné par un unique leader pour qui chaque individu s'est battu. Peut-être que c'est pour l'entente dans le peloton, où l'on se prête des bidons et s'arrose les uns les autres quand le soleil vient à trop cogner. Peut-être  parce que même s'ils savent qu'ils ne gagneront pas, certains essaient tous les jours d'attaquer au kilomètre 0, et parfois, ils réussissent. Peut-être aussi parce que les doutes sont les mêmes sur les autres sports où chacun est libre de faire ce qu'il veut parce qu'il n'y a pas de contrôle et qu'il n'y a donc pas de raison de boycotter uniquement le vélo. 


« La chance, c'est comme le Tour de France : on l'attend longtemps et ça passe vite. »
Jean-Pierre Jeunet


⸻ article écrit par  azra_128

Wattactu n°20 - Juil. 2023Où les histoires vivent. Découvrez maintenant