Il(e) désert(e)

Prologue

La mer grondait.
Le ciel était sombre et rempli de gros nuages noirs.
La tempête faisait rage au dehors.
Les coups de vent étaient de plus en plus violents.

Soudain, une vague plus puissante que les autres déstabilisa le bateau. Surprise, Emma perdit l'équilibre et tomba au milieu de la salle, sous les ricanements de plusieurs de ses camarades.
Heureusement, Cassie, sa meilleure amie lui tendit la main, pour l'aider à se relever.

En plus des éléments déchaînés, d'inquiétants craquements retentissaient partout dans le navire.
Quelque chose explosa soudainement au fond du bateau, produisant un horrible bruit.
À peine une minute plus tard, une sirène se fit entendre. Tous les passagers reconnurent aussitôt l'alarme d'évacuation. La panique gagna chacun, et tous se mirent à courir désespérément, dans l'espoir de retrouver leurs proches et d'être ainsi avec eux dans les cannots de sauvetage.

Emma était toujours en train de se relever.

- Cours ! lui hurla Cassie.

Sans lui laisser le temps de répondre, elle lui attrapa la main et partit le plus vite possible.
Elles coururent jusqu'à ce qu'Emma s'arrête soudainement. Elle était à bout de souffle.

- Je...je crois que je ne vais pas pouvoir aller plus loin... J'ai besoin de faire une pause, haleta la jeune fille.

- On ne peut pas ! Si on s'arrête, les cannots de sauvetage vont partir sans nous et on coulera avec le bateau !

- Je ne peux plus courir je te dis ! Je crois que je me suis fait une entorse en tombant tout à l'heure. Ça me faisait déjà mal avant de courir, mais maintenant c'est pire...

- Essaye de tenir s'il te plaît ! Il faut absolument qu'on réussisse à partir d'ici...

Elle reprit la main de son amie pour ne pas la perdre et recommença à courir, fendant la masse compacte que formait les passagers affolés. La pauvre blessée était épuisé et sa cheville lui faisait atrocement mal.
Soudain elle tomba, lâchant la main de sa meilleure amie.
Celle ci se rendit compte qu'elle avait perdu Emma à peine quelques secondes plus tard, mais assez de secondes pour qu'elle se soit déjà fait engloutir par la foule. Cassie tenta désespérément de retrouver Emma, l'appelant de toute la force de ses poumons.
Mais en vain. Il y avait tellement de personnes au même endroit, que le brouhaha couvrait les cris de la lycéenne. Le mouvement de masse la força à avancer, l'éloignant de plus en plus de l'endroit où elle avait perdu sa meilleure amie.

Pendant ce temps là, Emma était écroulée sur le sol. Elle ne parvenait pas à reprendre sa respiration, et était incapable de se relever.
Elle attendit quelques minutes que les battements de son coeur ralentissent, avant d'essayer de se remettre debout.
Elle y arriva finalement en s'appuyant sur les derniers meubles qui l'entouraient.
En effet, le paquebot penchait de plus en plus, ce qui faisait, lentement mais sûrement, glisser le mobilier luxueux.

Emma se rendit compte qu'il n'y avait plus personne autour d'elle.
Tous les passagers devaient déjà avoir fuit.
Soudain reprise de panique, la jeune fille avança du mieux et le plus vite qu'elle pouvait vers la sortie.
Son chemin fut lent et pénible. Elle prit plus du double du temps qu'elle mettait habituellement pour se rendre sur le pont.
Arrivée là bas, elle regarda tout autour d'elle. L'arrière du bateau où elle se trouvait il y a une quinzaine de minutes était désormais sous l'eau.
L'explosion entendue un peu plus tôt avait dû créer une avarice dans la coque du paquebot. Cela devait être du à une machine défaillante, car la salle des machines se trouvait juste au dessous de la partie à présent immergée dans la mer.

Sortant de ses pensées, Emma se rendit compte après avoir traversé tout le bateau qu'il ne restait plus personne à bord. Elle aperçut au loin les petits cannots gonflables qui servait à évacuer le navire en cas de problème.

«Ils sont partis sans moi ?»

La jeune fille sentit les larmes lui monter aux yeux.
Une goutte d'eau salée coula sur sa joue.

«Non je dois trouver une solution pour m'échapper !»

Elle chercha du regard quelque chose qui pourrait l'aider, une bouée ou n'importe quel objet flottant qui pourrait lui permettre de rester à la surface de l'eau. Ayant trouvé une petite table en longueur où elle pouvait tenir allongée, elle partit fouiller rapidement les cabines vides des passagers.
Elle y trouva un bon nombre de choses utiles laissées par leurs anciens propriétaires qui n'avaient ramassé que le strict nécessaire dans leur précipitation.
Après avoir rassemblé un couteau suisse, une lampe de poche, une batterie mobile, des vêtements au hasard, une trousse contenant probablement des crayons, quelques stylos et un carnet, dans une caisse en bois, Emma fonça vers les cuisines pour essayer de récupérer un maximum de nourriture. Elle prit tout ce qui pouvait rentrer dans sa petite caisse et déposa le tout dans son rangement de fortune.

L'eau avait progressé de moitié, et engloutissait maintenant les trois quarts du bateau.
Il était temps pour la jeune fille de partir.

Elle vérifia tout de même qu'elle avait bien son téléphone portable sur elle, bien qu'il ne lui servirait probablement à rien au milieu de cette étendue d'eau qui lui paraissait infinie, avant de mettre à la mer la table et la caisse qu'elle avait relié par une corde, et de s'installer sur son embarcation bancale.
Elle resta plusieurs minutes devant le bateau, le regardant couler doucement.

C'est ainsi qu'Emma, une lycéenne de dix-sept ans, se retrouva au beau milieu de nul part, dérivant dans l'immensité de l'océan Pacifique, avec pour seules affaires des objets trouvés dans des cabines abandonnées, et des vivres pour une ou deux semaines.