-Tu ne m'aimes pas, elle souffle, ses lèvres si proches des miennes.
-Tu sais bien que si. Réponds-je, mon corps se pressant un peu plus sur le sien. Elia sais que je ment, mais ne peux s'empêcher de croire à ce mensonge, ce si doux mensonge. Je repense à ce matin, où nous ne nous connaissions pas encore. À la manière dont elle me regardait, bien différente de celle dont elle me regarde maintenant. Elle m'embrasse, je sens ses lèvres douces sur les miennes, et remonte ma main vers ses cheveux. Après une poignée de secondes, je romps le baiser en me reculant et met mon doigt sur sa bouche. Avec mon autre main je m'allume une cigarette, prends une inspiration et lui rejette la fumée au visage.
-Je vais devoir y aller, princesse, je lui susurre à l'oreille, c'était très sympa. Elle me regarde, déçue.
-Tu part déjà? Me demande-t-elle.
-Oui, j'ai des choses à faire, je reviendrais te voir.
-Et c'est tout? Tu t'en vas, comme ça?
Je soupire, lève les yeux au ciel puis me penche vers elle pour prendre son menton dans ma main, ma cigarette toujours allumée dans l'autre. Je l'embrasse une dernière fois et lui promet de revenir vite. Dès que j'ai fermé la porte je me met à dévaler les escaliers de l'immeuble quatre à quatre. Une fois dehors, je marche d'un pas décidé dans la semi-obscurité du crépuscule. Je me dirige vers mon propre appartement afin de pouvoir troquer mon short et mon tee-shirt contre une mini-jupe et un crop-top. Je monte rapidement les marches de mon immeuble et entre dans mon appartement. Je me change et redescends les marches à la même allure qu'à la montée. Je marche dans les rues, flâne un peu, c'est l'été et il fait doux. C'est alors qu'au détour d'une rue, je le vois. Et je reste tétanisé.e sur place, incapable de bouger, les larmes me montant aux yeux. Il me voit, me toise, rigole avec les gars qui sont avec lui. Je n'arrive plus à réfléchir correctement. Quel idiot.e j'ai été de lui envoyer un message. Je me sens transperçé.e par son regard, comme si j'étais nu.e. Il connaît toutes mes faiblesses, toutes mes peurs. Ses amis les connaissent sûrement aussi. Je ne me suis jamais senti.e autant en danger, comme s'ils étaient les prédateurs et moi la proie. Il s'avance vers moi, je tente de reculer mais mon corps ne répond pas.
-Hey, deadname, comment tu vas depuis le temps princesse?
Je me maudit de m'être présenté.e sous mon deadname par message. Je n'ose pas le regarder en face. Il prend alors mon menton dans sa main pour me forcer à le regarder. Et je réalise que je lui ressemble, que je fais la même chose que lui, que je ne vaut pas mieux.
-Alors, princesse, on a perdu sa langue? Me susurre-t-il à l'oreille.
-La ferme. Je me surprends moi-même à prononcer ses mots à voix haute.
-Pardon?
-La ferme, je répète, je t'ai dit de la fermer.
Il semble aussi surpris que moi mais se ressaisit vite et me dit:
-Ah, on se rebelle? Toi qui implorait mon attention un an auparavant... Qui aurait pu le prévoir?
Je ne veux pas entendre la suite. Je me dégage de sa prise et part en courant vers l'appartement d'Elia, les larmes aux yeux. Je l'entends crier derrière moi que je reviendrait forcément vers lui. Il a peut-être raison, mais je veux tout oublier actuellement. Arrivé.e à l'immeuble d'Elia je monte les marches aussi vite que possible jusqu'à son appartement. Je sonne plusieurs fois, mes larmes coulant seules sur mes joues sans interruption. Quand elle ouvre enfin la porte, je m'effondre dans ses bras, m'excusant de la déranger. Elle me rassure, m'amène jusqu'à son lit.
-Raconte moi, Nymphé, me dit-elle, je suis là.
Je la regarde et pleure encore plus. Je sens sa main sur ma tête et entend sa voix qui me rassure. Je me sens tellement coupable, elle est si gentille avec moi et je ne considère pas mériter cette gentillesse. Je finis par m'endormir dans ses bras, l'odeur d'encens qui caractérise Elia embaumant la pièce. Je me réveille plusieurs fois dans la nuit suite à des cauchemars et elle me rassure toujours, passant sa main dans mes cheveux et me murmurant des paroles réconfortante. Elle me paraît être un ange, perdu dans ce monde si cruel et malveillant. Je finis par me réveiller aux alentours de cinq heure du matin, Elia s'est endormie. Elle ressemble d'autant plus à un ange ainsi. Je me dirige vers la fenêtre ouverte, profitant de la fraîcheur matinale. J'observe la ville s'éveillant doucement et les premières personnes pressées qui s'affèrent. J'allume une cigarette et fume ainsi jusqu'à ce que le soleil se lève. Quand ses rayons commencent à entrer dans la chambre je dépose un dernier baiser sur ses lèvres et part de l'appartement, la lumière de l'aube illuminant le visage d'Elia et le morceau de papier déposé à son chevet où il y a marqué quatre mots : "Merci, je t'aime".
VOUS LISEZ
Nymphé
Short StoryJe suppose qu'on peut dire que je vis la nuit. La nuit est mon royaume, je souffre d'insomnie et je reste souvent tard le soir à réfléchir (et fumer, accessoirement). Vous allez pouvoir découvrir des tranches de ma vie, j'espère que vous aimerez. E...