La chute des masques

Chapitre 2

Mercredi 24 novembre 20XX, Hôtel de police,  6:34 P.M.

Emma tapotait vigoureusement les lettres de son clavier, rédigeant pour la énième fois un rapport sur l'une de ses enquêtes. Ses doigts bougeaient au rythme de ses mots, et ses yeux bordés de longs cils suivaient les lignes qu'elle écrivait, encrant sur son visage cette perfection sans faille qu'elle avait l'habitude d'assumer. Elle était enquêtrice en criminologie depuis quelques mois maintenant, et avait déjà élucidé de nombreuses affaires pour une novice dans le milieu. Elle s'était habituée à cette vie bien remplie, à la fois prise par son travail et par son rôle d'épouse, bien que son compagnon soit tout bonnement adorable vis-à-vis d'elle. A vrai dire, ça lui plaisait. Mettre la lumière sur les meurtres, les méfaits incompris par la société, qu'elle elle pouvait résoudre. Elle aimait ressentir ce sentiment de fierté en elle lorsqu'elle exposait le coupable dans un article de presse, et ces regards admirateurs qui l'enviaient quand elle réussissait brillamment comme elle y était tant habituée. 

Un lourd dossier venait justement de tomber sur son équipe de choc, visiblement un meurtre à Harajuku, encore une fois commis par la fameuse Yuzuha Shiba, qui devenait de plus en plus célèbre pour ses terribles crimes. Ses méfaits étaient reconnaissables par une croix jaune sur le mur, cependant cette fois-ci les médecins légistes avaient garanti après une autopsie des plus minutieuses que la victime avait été abattue par un homme. Serait-ce un leurre ? se demanda-t-elle en mettant son activité en pause afin de se consacrer à la réflexion. Impossible, elle a bien été aperçue dans les alentours quelques minutes ensuite selon un signalement de civil. Peut-être a-t-elle un complice ? Ce serait la seule solution probable, pourtant elle a pour habitude d'agir seule... Remarque, elle a récemment été aperçue en compagnie d'un groupe suspect, contenant d'ailleurs principalement des hommes. Sans doute l'un d'entre eux, ou encore le grand classique de celui épris de la beauté venimeuse prêt à tout pour satisfaire ses ardeurs. Après tout, Shiba est une séductrice de renom connue et appréciée des hommes. En un mot, cette femme joue de ses charmes à ses propres fins : manipulatrice. Il me suffirait de dresser son profil psychologique pour déduire l'identité de l'homme, en somme ce n'est pas une affaire si complexe qu'on me l'avait rapporté.

Plongée dans ses pensées, la jeune femme n'entendit pas les pas souples de son collègue favori se rapprocher d'elle et fut quelque peu surprise de l'étreinte qu'il lui offrit ensuite sans crier gare.

-Draken ! Comment vas-tu, pas trop occupé ?

-Ma chère femme est surchargée de travail à ce que je vois, chuchota-t-il en calant son menton dans son cou afin de lire ce qu'elle avait noté dans ses brouillons. Hm, un meurtre bien simple pour un génie de ta trempe, d'après ce que je peux déduire.

-Le coupable était évident, ça sautait aux yeux. Il suffisait d'observer sa posture pour voir qu'il cachait quelque chose, et de prendre en compte le fait que son eau de toilette favorite était vide afin de l'incriminer. Bref, du gâteau. 

-Tout le monde ne possède pas les mêmes capacités cérébrales que toi, ma belle. T'as bientôt terminé d'écrire ton rapport ?

-Théoriquement, oui. 

-Un restau ce soir, ça te dirait ? Je t'invite.

-Avec plaisir ! Viens me chercher quand tu auras faim.

-ça marche. A plus tard alors, je dois entraîner les malinois, là. On se voit ce soir, je t'aime. dit-il avant de se pencher sur ses lèvres pour les embrasser tendrement. Elle caressa le long de sa mâchoire et lui adressa un sourire sincère avant de lui retourner un : "Je t'aime aussi", et il partit à grandes enjambées, un air bien niais et heureux sur le visage.

Ken Ryuguji, son mari, était un homme aussi dévoué qu'attachant. Sa tresse blonde lui donnait une allure charmante, tandis que le tatouage de dragon qu'il avait sur la tempe ajoutait un effet un peu plus mauvais garçon. Ils avaient célébré leur union quelques années plus tôt, et avaient depuis vécu les plus beaux jours de leur existence aux côtés l'un de l'autre. Ils travaillaient tous les deux pour la police, bien que ce soit dans des domaines différents, et avaient la conviction qu'ils servaient la justice de par leurs actions ou de même par le simple fait d'offrir l'espoir à la population.