Les ombres

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Ces nuages gris, tellement gris qu'ils paraissent noirs. Ils se promènent au-dessus de moi, épient mes moindres mouvements. Dès l'occasion présente, ils déferlent leurs déchirants torrents sur moi. Ces nuages coulent sur ma tête; s'infiltrent à l'intérieur. La couleur s'efface; fuit. Le soleil disparaît et la folie prend place. Les torrents d'ombres mélancoliques s'acharnent. Mes yeux ne voient plus. Ils ne voient que le noir; que l'ombre qui s'est emparée de moi. La lumière tente de survivre, mais l'obscur est puissant. En quelques temps, les ténèbres ont éteint toutes formes de vie en moi. Je meurs. Puis je reviens, mais avec cet ombre. Cette partie des ténèbres ne me quitte pas. Mes yeux voient, mais projettent sombrement. Tout n'est plus que supplices et caprices, misères et tonnerres, venin et dédain. Mon ombre ne cesse de me vider, de m'exténuer. Je regarde mes mains noircirent alors que le mal finit son travail. Je lui appartient. L'énorme nuage me suit, tel mon ombre. Plus j'avance, plus il grossit; plus il est lourd; moins j'existe. Il m'a tout enlevé. Ma joie, mon bonheur, mes valeurs, mes émotions. Mes couleurs. L'obscurité me retient prisonnier. Prisonnier de moi-même. Je suis devenu un corps amorphe; sans vie, sans couleurs. Il me retient tel un boulet attaché à ma cheville. Le grondement des torrents s'alourdit. J'entends ces cris stridents, ces appels à l'aide, ce bourdonnement agressant. Je me plis comme un naissant. Un naissant plein de couleurs. Mais mon ombre étouffe son emprise sur moi. Je me relève et subi le déferlement de l'enfer. Je laisse les malicieuses ombres me contrôler. Le bourdonnement me rend fou. Je suis fou. Je suis un fou sans couleurs. Je n'en peu plus, mais je ne peux pas me défendre. Mes couleurs sont mortes. Crac. La tempête se calme. Mon corps tombe au sol comme une poupée de chiffons. Je sens le vent de plus en plus faible de la tempête sur ma nuque. Ce vent si chaud, brûlant, qui assèche la vie mais qui apporte un certain réconfort. L'étreinte de mon ombre se relâche tranquillement. Je peux enfin respirer. Je me relève, encore. Je sens les couleurs revenir. Mais, il me manque quelque chose. Les ombres m'ont pris quelque chose. Je sens que mon ombre n'est pas partie. Je cherche je cherche, mais je ne la trouve pas. Elle s'est cachée. Maintenant relevé, les couleurs reprennent possession de mon corps. Mais je la sens encore. Elle est dans ma tête. Elle va me rendre fou. Je suis déjà fou. Mon ombre n'est que ma réflexion; Je suis donc une ombre. Un corps vivant de couleurs camouflé parmi le néant. Un fou parmi le monde.

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