Chapitre III : Entre Aspirations et Réalités

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« L'orage transperce les nuages,
Blesse le Ciel, blesse la Terre.
La pluie recouvre doucement et soigne les blessures amères. »
Le Chant de la pluie, Livre I

Le premier réflexe de Lyra fut d'annoncer l'excellente nouvelle à Elwynn, ce dernier ne put dissimuler sa joie et la félicita chaleureusement. Il savait qu'elle décrocherait un entretien, au fond de lui, il n'en avait jamais douté.

Cependant, et même s'il se refusait à l'admettre, une part de lui souhaitait qu'elle ne reçoive jamais cette lettre. Une part plus vulnérable, peut-être même plus égoïste de son cœur, s'affligeait à l'idée que cette lettre puisse réellement annoncer le départ de Lyra. Il ne souhaitait, en aucune façon, la voir s'éloigner. L'idée de son absence, de la voir quitter Parnassie était un fardeau qu'il portait en silence.

Il s'efforça de taire ce désir égoïste. Comment aurait-il pu entraver les ambitions de Lyra ? Il étouffa ce conflit intérieur, offrant à la jeune femme un sourire sincère, bien que son cœur fût tiraillé entre la fierté qu'il ressentait pour elle et la crainte douloureuse de la perdre.

Lyra passa le peu de temps qui lui restait avant l'entretien, à préparer son départ. Elle suivit les recommandations de la lettre et s'assura que tout soit en ordre, dans l'éventualité qu'elle soit prise pour le poste.

Elwynn lui promit de veiller à ce que sa maison soit entretenue régulièrement et qu'elle serait toujours prête à l'accueillir.

« Si tu obtiens ce poste, tu seras logée directement à la demeure des d'Ormeron... commença Elwynn.

- Mais je pourrais venir vous rendre visite à Parnassie n'est-ce pas ? demanda Lyra inquiète.

- Si le Comte est un bon maître de maison, il devrait te laisser quelques jours dans l'année pour retourner chez toi. Nous le faisons toujours avec notre personnel.

- Si c'est un bon maître... Et s'il ne l'est pas ? Si je ne peux jamais revenir ici ? Si je... Sa voix et ses mains se mirent à trembler, elle n'arriva pas à achever sa phrase.

Les yeux d'Elwynn, d'ordinaire d'un vert clair, s'assombrirent, le ton de sa voix devint grave :

- Alors je compte sur toi pour m'écrire, je viendrai te chercher sans tarder.

Lyra n'avait jamais pensé à cette éventualité. Loin de chez elle, loin de ses amis, elle n'aurait personne vers qui se tourner. Elle ne connaissait pas la famille d'Ormeron et malheureusement, la réputation du Comte ne faisait que la conforter dans ses craintes.

Finalement, elle prit une profonde inspiration et acquiesça :

- Oui, c'est promis Elwynn. Merci. »

Elwynn lui sourit tristement. Il ne voulait pas que Lyra le remarque, mais lui aussi était inquiet.

Le jour du départ arriva, la famille Prerya prêta une voiture à Lyra pour qu'elle puisse se rendre dans le comté d'Aédorval, où se situait le Domaine d'Ormeron.

La baronne avait fait préparer un petit panier avec quelques provisions pour la jeune femme. Tous lui souhaitèrent bonne chance. Elwynn l'aida à monter dans la voiture, au moment de lâcher sa main, il lui murmura d'une voix si faible qu'elle n'aurait pu l'entendre :

« Ne pars pas...»

Il referma doucement la porte, Lyra croisa son regard derrière la vitre. Elle lui adressa un sourire tendre, comprenant la préoccupation muette dans ses yeux. Le fiacre prit la route, emportant avec lui les incertitudes et les adieux douloureux.

Le Chant De La Pluie : Livres I et IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant