MOTEL

Le masque.

- " Qui es-tu ? ".

- " Danielle Umbretto, je vous l'ai déjà dit. Et vous ? Qui êtes-vous ? ", demanda-elle, l'air visiblement angoissée.

- "Je suis celui que tu voudras que je sois, nous ne vivons uniquement que dans le regard des autres, tu fais un métier qui nécessite de comprendre cette loi élémentaire.", répondis-je, persuadé qu'elle comprenait mes allusions

Elle semblait s'interroger. C'était excitant d'avoir affaire à une femme qui pensait, vraiment. Je commençais à penser à repousser mes pulsions physiques pour assouvir mes psychologiques.

Ce serait un défi à ma hauteur de la détruire mentalement, je sentais qu'elle était forte. Très forte. C'était une pute, mais je devais être prudent. Je sentais le danger, elle était.. différente.

- " Vous êtes un scientifique, n'est-ce pas ? ", demanda-elle soudain.

- " Disons plutôt que j'expérimente certains comportements humains, je teste les limites physiques, mentales de mes.. volontaires. ", fis-je, amusé.

- " Vous n'allez pas me baiser, hein ? Je le sens. Vous me faites peur. "

Effectivement, sa peur était palpable. C'était le but, prendre le dessus psychologique. D'ailleurs, j'avais déjà commencé en la tutoyant alors qu'elle était réduite à me vouvoyer.

Cela peut paraître minime, mais la façon dont on s'adresse à quelqu'un définit d'entrée de jeu qui mène la danse. N'avez vous jamais été agacés par un interlocuteur qui vous tutoie alors que vous le vouvoyez ?

Moi, jamais.

Car je suis cet interlocuteur. Je prends le dessus, d'emblée.

- " Dîtes, vous ne m'avez pas répondu.. qui êtes-vous ? ", murmura-t-elle.

- " Tais-toi, c'est à moi de poser les questions, chacun son tour. ", soufflais-je, agacé.

Elle blêmissait au fur et à mesure de ma domination verbale. Elle sentait que ce n'était pas un jeu de rôle. Décidément, il était temps que je tombe sur une femme plus futée que les autres, mais je ne me faisais pas trop d'illusions, c'était une femme, rien de plus.

- " Alors, qui es-tu ? ", dis-je en insistant.

- " Mais.. Da.."

- " RÉPONDS-MOI ! ", hurlais-je.

Voilà. Je la sentais. La peur indicible. Elle était effrayée, mais une chose clochait : Elle continuait de me regarder droit dans les yeux, et je n'avais jamais eu affaire avec ce type de victime.

- " Qui es-tu vraiment ? Qu'est ce qu'une fille de bonne famille, diplômée en droit et héritière, fait dans ce motel à se faire baiser par des gros tas ? "

Elle écarquilla les yeux une seconde, avant de reprendre ses esprits.

- " C'est donc ça que vous faisiez sur votre ordinateur. "

Son regard se durcit soudain, et elle me toisa d'une façon absolument insupportable.

Elle me défiait.

- " Réponds-moi .", dis-je en contenant ma rage.

- " Tu n'es pas le seul à porter un masque, te penses-tu supérieur en cachant ton identité et en m'ayant attachée ? Je sais qui je suis, c'est pour ça que je sais me nommer. Et toi, comment te nommes-tu ? ", souffla-t-elle en me toisant d'un air supérieur.

Mon poing s'encastra sur sa tempe. Elle s'était évanouie dans la seconde.

Mon sang se glaça. Elle avait repris le dessus. Elle m'avait forcé à la frapper. Elle avait commencé à me tutoyer, elle m'avait provoqué.

Elle était très forte.

Il fallait que je me reprenne avant qu'elle ne se réveille, il fallait que je garde mon calme. J'avais déjà fait une erreur, je ne pouvais plus recommencer.