Recueil de nouvelles

On trouve ce que l'on cherche

Elle entendait des voix ténues. Certaines comparaient à de la religion, certaines criaient au scandale d'une torture et d'autres parlaient d'exécution de criminels.

Mais la jeune femme ne sentait que la douleur. La douleur des pieux enfoncés dans ses mains, la douleur des pieux enfoncés dans ses pieds, la douleur du contact rêche du bois sur son dos ou coulait encore le sang d'entailles non refermées, la douleur que lui imposait la gravité alors qu'elle était attachée sur une vulgaire et grossière croix de bois.

Pourquoi une croix ? Simplement pour gâcher le moins de bois possible lors de l'exécution.

Quelle exécution ? Celle d'une criminelle recherchée de probablement partout, celle d'une personne qui avait grandi bien trop vite, celle d'une adolescente d'à peine seize ans.

Son exécution devait se faire dans la douleur la plus pure, dans l'humiliation la plus atroce. Pourquoi ? Pour la punir de tous les morts qu'elle avait causé. Elle savait que des dizaines de personnes la regardaient à présent tandis qu'elle souffrait.

Elle gardait les dents serrées, refusant de crier. Au contraire, un sourire mauvais se dessinait sur ses lèvres blessées. Ça allait être du grand spectacle, un spectacle inouï, un spectacle qui allait la faire rire comme jamais. C'est la vérité, la crise de folie pointait, altérant complètement ses capacités de jugement. Elle avait seize ans et le cataclysme allait se créer.

Elle entendait le juge prononcer une sorte de sentence, parler fort, parler dans le vide, à ses yeux. Quand il employa le terme "monstre venu tout droit des Enfers", la terre se mit à trembler affreusement. Le sol commença à se fendre, laissant entrevoir une fissure d'un rouge éclatant et d'un noir profond. On entendait le son de marche, des cris de damnés, des chants de guerre, mais des cris, toujours plus de cris, de la douleur, de la terreur. Des mains commençaient à sortir de la fissure, laissant entrevoir démons et chimères.

Des monstres à la peau de différentes couleurs, des cornes de t'aimes diverses et variées, des créatures en parfait mélange de plusieurs animaux, véritables hybrides aux pouvoirs tous plus terrifiants les uns que les autres. Tous étaient organisés, telle une armée, tels les pires dangers. D'étranges volutes de fumée noire et d'étranges vents s'échappèrent de la crevasse. L'air était lourd et "l'extérieur" se transforma en véritable tempête mêlée de rouge.

La jeune femme éclata de rire, un rire horrible, cruel, fou. Son corps se métamorphosa : sa peau devint blanche, laiteuse, un de ses yeux se colora de rouge sang, cerclé de noir. Ses cheveux foncèrent et des cornes poussèrent sur sa tête. Son sang, pourtant déjà anormalement foncé, devint un sang couleur ébène et ailes et queue apparurent dans son dos. À présent, elle était non seulement Éris, la combattante humaine, mais elle était aussi Shiitai, la démone, l'Enfant de la Folie.

À présent, tout était devenu plus simple. Elle se libéra de sa croix, reprenant contenance avec une étrange fluidité de geste, dès qu'elle tomba au sol, elle se redressa. Une étrange lame sembla se matérialiser quand elle saisit quelque chose dans le vide, derrière son dos. Dès qu'elle leva la lame fine en direction du ciel, les monstres levèrent la tête dans sa direction, se stoppant dans leur début de massacre. Elle parla une langue étrange, les créatures paraissaient l'écouter, lui obéir, puis le massacre commença pour de bon.

Les bêtes des Enfers semblaient en épargner quelques-uns, mais les autres finissaient massacrés, torturés, dévorés, sans aucun remord. Éris déchaînait un véritable massacre, elle gênerait un immense cataclysme. C'est comme ça qu'elle était, quand elle était en colère, elle semait mort et destruction sans que personne puisse l'en empêcher.