_ Ne m'approche pas. Pose ce couteau que tu brandis vers moi.
_ Je n'en peux plus Miss, tu veux me rendre fou, entendit-on répliquer son mari.
_ Je te défends de faire un pas de plus, cria celle-ci l'air apeuré. Tu en doutes encore? De ta folie? interrogea t-elle sans complaisance. Et tu oses encore m'appeler par mon surnom? lui cracha t-elle presque.
_ Pour la dernière fois, mesure tes paroles. Tu t'entends. Tu vas trop loin. Je t'interdis de m'accuser de tous tes maux sinon tu risques de le regretter, contra le mari apparemment dans tous ses états.
_ Je t'ai vu cette nuit là, accusa de nouveau la femme qu'un rire nerveux venait de secouer. Je te reconnaîtrais entre mille. C'était toi. Je pourrai te dénicher même dans la nuit la plus profonde. Serais-ce pour ça que tu souhaites te débarrasser de moi? Surtout, compte sur moi pour ne pas te faciliter la tâche, INGRAT, LÂCHE, VAURIEN, lui assèna t-elle avec force.
_ Tu penses toujours que je suis coupable si tu as fini par faire une fausse couche? Que j'ai fait exprès de te faire peur cette nuit là en t'épiant et en t'espionnant? Femme indigne. Tu as une vision défaillante et tu déformes toujours la réalité quand elle devient trop lourde à porter. C'est toi qui devrais exprimer des regrets et te repentir. Au lieu de cela, tu m'accables encore et encore. Je n'en peux plus, concéda d'une voix éplorée l'époux consterné prêt à commettre le pire.
_ Tes menaces voilées me sont sans effet. Hors de ma vue, articula difficilement Miss dont on percevait maintenant la respiration lourde et entrecoupée. N'avance pas? Je te dis, supplia t-elle.
_ Je t'aurais prévenue, fit le mari éhonté. Bien que je me sente diminué à cause de ce foutu accident qui m'a tout fait perdre en un clin d'œil, je suis encore capable de te maîtriser si tu as le malheur de me confronter ouvertement. Prends garde à toi, vociféra t-il.
_ Tu ne t'en sortiras pas cette fois-ci, argua sa femme péniblement, la voix brisée par les larmes. Penses-y à deux fois avant de commettre l'irréparable. Ils seront nombreux à pouvoir témoigner de mon comportement exempt de toutes reproches durant toutes ces années passées à tes côtés. Tu les entends derrière la porte? Ils hésitent encore à entrer parce qu'ils ont peur de toi mais je suis sûre qu'ils ne me laisseront pas mourir de ta main haineuse et sale.
_ Ce n'est pas de la peur mais du respect. Tu ne sais même pas distinguer les deux. À vrai dire, je ne savais même pas qu'il m'en restait: du RESPECT. Tu m'as tout pris. Je n'ai même plus de dignité propre. Tu penses qu'ils ne le savent pas: que tu m'as trahi, déshonoré dans toute la ville? Ces gens là ne sont pas que des serviteurs pour moi. Pour certains, ils m'ont vu grandir. Pour d'autres, j'ai grandi avec eux. S'ils cognent ainsi avec persistence à la porte, c'est qu'ils souhaitent venir à ma rescousse. Moins que du respect, c'est de la pitié que je leur inspire à force de te laisser faire. Tant tu es mauvaise et indigne.
_ Je vais te tuer, entendit-on crier avec rage.
_ Vous bougez, je vous tue avec tout le respect que je vous dois, Madame, intonna une voix rauque bien connue, celle du superviseur de la ferme, mentor et ami fidèle du mari cocu qui s'était rué seul dans la chambre du couple, armé jusqu'aux dents.
_ Ainsi, vous vous liguez contre moi, constata avec mépris l'épouse démasquée qui voulait commettre un crime et le faire passer pour de la légitime défense.
_ À lui aussi, tu as fait des avances, n'est-ce pas? demanda le mari debout au milieu de la pièce. C'est vraiment mal le connaître. Miss! Miss? Regarde-toi? Tu n'as plus aucune valeur aux yeux des personnes vivant dans cette maison. Il n'ya que moi qui te supportais encore mais là, c'était le coup de grâce. Y'en a marre. Tu ne t'en sortiras pas cette fois-ci. J'y veillerais personnellement. Prends-lui ce couteau, ordonna le mari bafoué à son superviseur qui obtempéra sans mot.
_ Ne t'avise pas de me toucher, l'avertit Miss acculée de toute part. Pauvre idiot, lança t-il à l'intention de son mari. Tu lui fais confiance.
_ La partie est terminée, Miss, rétorqua calmement celui-ci. Tu t'es prise à ton propre jeu. Combien de rôles t'es-tu imposés durant toutes ces années où nous avons vécu ensemble. Quand est-ce que tu t'es découverte des talents d'actrices. Jouer à la fois à l'épouse parfaite, aimante et soumise et être à la fois la pire traînée que ce monde ait engendré. Dis le moi? Cet enfant était de qui? J'ai besoin de savoir.
_ Tu veux vraiment savoir. Serais-tu prêt à faire face à la réalité dans ta situation actuelle. Tu es si diminué, tu pourrais en mourir, lâcha t-elle ironiquement. Bon!D'accord. Je vais te le dire, fit-elle avant de tomber raide au sol, respirant péniblement.
_ Mon Dieu, Miss. C'est du sang. Tu saignes pour de vrai. Ton cœur saigne, s'alarma, le mari, en le prenant doucement dans ses bras comme s'il allait lui faire plus de mal en le touchant tout simplement. Pourquoi? Pourquoi, cria t-il en se tournant vers son superviseur dont l'arme fumait encore.. L'odeur acre narguant dangereusement leurs narines à tous deux.
_ Pauvre idiot, articula difficilement Miss qui se vidait littéralement de son sang. C'est lui, celui que tu appelles ton fidèle ami qui m'a enceintée et promis monts et merveilles au point que je veuille me débarrasser de toi. Content. Tu me remercieras en ENFER, prédit-elle en poussant son dernier souffle, entourée des bras aimants de son mari, prêt à livrer sa dernière bataille. Quitte à tuer...pour elle.