Le Roi étoilé et la Princesse perdue

1. Un air envoûtant

L'air joué par le piano survolait la pièce comme une abeille parmi les fleurs ; il se faufilait à travers les discussions mondaines, les poignées de main sérieuses, les fiertés exposées et les formules de magie noire susurrées. La musique semblait traverser tout cela, sans se soucier de la moindre remarque, les notes continuaient et continueraient jusqu'à la fin de la soirée sans exception, et c'était ceci que Regulus Black appréciait. Il avait assisté tout au long de son enfance et maintenant adolescence à ces réceptions entre familles de sang-pur, et rien ne l'avait jamais plus intéressé que la musique, en particulier lorsqu'il s'agissait du piano.

Le jeune homme soupira, il avait réussi à échapper quelques minutes à ses parents insupportables ; à peine avait-il eu dix-sept ans que la recherche d'un bon parti était devenue leur priorité. Sa future épouse devait évidemment être une sang-pur, issue d'une famille noble, bien élevée pour honorer la lignée des Blacks et assez jolie pour assurer une belle descente. Tels étaient les souhaits de ses parents, lui n'avait rien à dire et après tout, il s'en fichait royalement.

L'air de la musique s'empara de ses pensées, elle pénétra dans ses oreilles pour ne plus en ressortir. Les yeux fermés, Regulus essaya de reconnaître le compositeur magique de ce morceau, mais sa connaissance pointilleuse des noms était assez faible malheureusement.

- Tu es ici, chuchota sévèrement Walburga Black, nous te cherchions partout.

Un sourire rieur s'empara des lèvres de l'adolescent, dans une autre vie, sa mère aurait pu être cantatrice et chanté sur ce morceau, sa voix aiguë le prouvait à chaque fois qu'elle hurlait sur lui ou son frère. Son chignon tiré à quatre épingles, rendait sa sévérité opératique encore plus clinquante ; mais la musique ne l'intéressait en rien, et Regulus allait en payer le prix fort.

- Tu viens de rater un beau parti, souffla Walburga, Deirdre de Meeter a réussi à obtenir une valse avec la fille des Vere.

Les yeux de Regulus qui balayaient sans le moindre intérêt la salle de bal, trouvèrent animation par la mention de ses fabuleux personnages. Bien que Deirdre soit l'un de ses pires ennemis, en particulier lorsqu'il convoitait son poste d'attrapeur sur le terrain de Quidditch, il prit un malin plaisir à le savoir en si charmante compagnie.

- Pénélope est une horrible créature, murmura le jeune homme, je suis bien heureux de m'être évaporé dans mon coin une minute.

Il ponctua sa phrase d'un rire nonchalant qui lui valut en retour une petite claque de son impitoyable génitrice. Il l'a reçu avec surprise en se frottant le bras ; même si la recherche d'un parti ne l'intéressait nullement, son intégrité et son honneur devaient être conservés. Et avec Pénélope, cela aurait été l'inverse.

- Mère, je pensais que le physique vous importez tout de même un peu, il serait dommage que votre descendance ressemble à de petits gobelins.

Le regard perçant de Walburga n'effraya point Regulus qui continuait à sourire sadiquement de ses plaisanteries, il avait hérité du caractère des Black, rien ne pouvait le déstabiliser, pas même l'intervention de son très cher père.

- Le plus important, déclara Orion en aide à sa femme, est qu'elle soit issue d'une famille noble et en particulier qu'ils soutiennent les idées du Seigneur des Ténèbres.

Dans un réflexe que le jeune homme jugeait minable, il frotta sa main, comme pour se remémorer son dévouement fatidique.

Tandis que les jeunes gens de la haute société du monde des sorciers dansaient une valse sur l'air entraînant, Regulus se perdit dans les contemplations des moulures du plafond. Cette grande demeure dont il avait oublié le nom de la famille propriétaire, offrait à chaque croisement des corniches, des tableaux représentant les éléments de la mythologie grecque ou latine. Le Serpentard n'avait jamais compris pourquoi dans tout le rejet de la culture moldue, la mythologie avait été épargnée, mais cela le fascinait du plus haut point. À ses longues heures perdues, il appréciait pouvoir se plonger dans un vieux grimoire relatant les histoires les plus passionnées et dangereuses.