L'amour est un fruit qu'on n'oublie pas. Il a un goût nul autre pareil qui vous entraîne au paradis. Et dès lors que c'est fini, la chute aux enfers est douloureuse. C'est ce que j'ai appris lorsque je l'ai rencontrée. Mais vous seuls pouvez décider de me croire. Je ne reste qu'une simple narratrice, à qui le seul rôle est de vous conter des fables.Mais si mon histoire vous intrigue, je vous laisse prendre place dans le théâtre de la vie.
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Notre histoire remonte à il y a quelques années de cela. Nous étions jeunes, immatures. Nous ne savions rien du monde, et encore moins de l'amour. Les seules choses qui nous préoccupent étaient de sortir nous balader dans les forêts. De construire des cabanes et s'y cacher. On se fichait du reste, tant que nous restions ensemble, on était heureuses.
Ma bisexualité m'a éclaté en pleine figure lorsque la puberté a pointé le bout de son nez. Et avec elle, mes sentiments aussi. Au début, j'ai tenté de cacher cette part de moi. Non, pas par honte, puisque cela représentait mon identité, mais parce que j'étais terrifiée qu'elle sache que je l'aimais bien plus qu'une amie. Je ne voulais pas qu'elle se détache de moi à cause de ce que j'étais. Et pourtant, quelques mois plus tard, je l'ai invitée à une fête foraine, sans réfléchir. Cette soirée m'a permis de me rendre compte de mes sentiments, et de m'apercevoir à quel point elle est incroyable. Et c'est à ce moment-là que je me suis déclarée. Je ne vais pas vous mentir, j'étais morte de honte et de peur. Mais contre toute attente, elle a accepté mon amour et me l'a rendu.
J'étais la plus heureuse du monde. Mais qui ne le serait pas ?
Notre premier baiser est arrivé quelques semaines après que notre couple se soit fait. Lors d'une balade à la plage. L'odeur du sel et le bruit des vagues nous apaisaient. Peut-être est-ce cela qui nous a conduit à ce baiser ? Je ne sais pas. Mais cela c'était fait naturellement. Avec douceur. Elle avait fait le premier pas. Ou du moins, elle avait tenté. En y repensant, la voir aussi timide et déstabilisée à l'idée de m'embrasser était assez ironique puisque c'était la plus apte à agir impulsivement et sans regrets. C'est l'un des souvenirs les plus heureux que j'ai d'elle. Ces souvenirs dont je veux me rappeler sur mon lit de mort.
Le second souvenir qui m'est le plus cher est notre toute première fois. C'était une journée comme une autre. Nous étions dans sa chambre, à jouer aux jeux vidéos. Je ne pourrais dire exactement comment cela s'est fait. Mais cela s'est fait naturellement. Avec amour et délicatesse. Derrière le regard d'autrui. Cette après-midi glaciale qui a su réchauffer mon petit cœur restera gravé longtemps dans ma mémoire. Tout comme le jour de notre séparation.
C'était le 14 février. On devait passer la soirée ensemble. Mais au lieu de cela, on a eu notre première dispute. Dispute qui aura été la dernière. Elle m'a reproché des choses qu'elle ne pensait sûrement pas. Une gifle s'est perdue pour épouser mon visage qui était rongé par le chagrin de cette querelle que je croyais insignifiante. Je l'ai questionnée sur les marques dessinées sur ses bras et son abdomen. Ces mêmes marques qui ont pris place dans mon quotidien. Mais ça, c'est une autre histoire.
Cette querelle de collégiens s'est transformée en rupture indéniable. Sans que je ne puisse donner mon accord. Sans qu'on ne puisse en discuter. Ou peut-être je ne souhaitais pas empirer notre situation. Alors j'ai préféré taire ces voix qui hurlaient dans ma tête. Ainsi que mon cœur qui se déchirait de chagrin. Et là. La descente aux enfers a débuté.
L'annonce de son suicide m'est parvenu quelques mois après notre rupture. Le 16 mai. Le jour de son anniversaire. Cette journée restera gravée à jamais dans ma mémoire. Car elle aura scellé mon coeur pour toujours.
Imaginez une personne qui est absolument tout pour vous. Une personne qui, à la simple présence, rend votre existence bien plus légère à vivre. Vous illustrez-vous cette personne ? Bien. Maintenant, imaginez que la vie vous l'arrache brusquement. Sans possibilité de lui adresser un dernier au revoir. Et que la culpabilité de ne pas l'avoir retenu vous rattrape pour vous plonger dans les ténèbres. Imaginez être dans une mer où la tempête fait rage. Et que l'unique phare, l'unique lumière, qui vous guidait s'éteigne à jamais. Aussi, imaginez-vous que votre cœur se fasse arracher violemment et qu'il se fasse pressé jusqu'à ce qu'il ne reste rien d'autre qu'un tas de cendres.
A ce moment précis, j'ai ressenti ce que je suis en train de vous décrire. Et c'est ce que je ressens à l'heure où je vous narre cette histoire. Mon cœur a été volé par cette fille dès notre enfance. Et il a été détruit par son absence. Réduit en charpie par la froideur de son corps. Ce même cœur qu'elle a gonflé de vie. D'amour. D'espoir. De bonheur. Avant de l'emmener voir les étoiles.
J'ai bien trop fait pour pallier son absence. J'ai cherché du réconfort dans l'amour des autres. J'ai essayé de me réparer en buvant leurs paroles mielleuses. Mais je n'ai fait que me perdre dans ce chagrin qui ne partira peut-être jamais.
Alors j'ai décidé de me réfugier dans diverses occupations. Des occupations qui n'étaient pas toutes saines. Et qui m'ont laissé des séquelles.
Puis j'ai découvert l'art de la narration et de l'écriture. Et c'est ce qui m'a amené à vous narrer un fin morceau de mon passé.
Et je finirais sur ces quelques phrases. Mon amour pour cette fille a été, est et sera tellement puissant et fusionnel qu'il s'apparente aux histoires des âmes sœurs. Mes croyances ne viendront pas interférer avec votre vision, mais je ne peux m'empêcher de penser que oui. Elle est mon âme soeur. Que ce n'était pas qu'une simple amourette de collège. Et que ce vide qu'elle a créé ne se refermera jamais.