RADUCHKA T1 (terminé), T2 (en cours)

T1.Chapitre 1 - Mia

- Vite, Mia! Dépêche-toi, ça va être ton tour!

Le stress tenaille mes entrailles. Je réarrange ma coiffure, vérifie pour la énième fois mon make-up.

- On ne t'entend plus, me nargue le boss me faisant lever les yeux au ciel d'exaspération.

Pour une fois, je garde mes répliques cinglantes pour moi, car ce soir, ma vie tout entière peut basculer.

Ce soir, la mort peut en être un dénouement tragique.

- Le roi et le prince sont arrivés, entends-je Marco informer le patron.

Mon palpitant bondit dans ma poitrine. Je ferme mes poings en sentant mes extrémités trembler. Mes paupières closes, je calme ma respiration en me demandant si j'ai réellement fait le bon choix.

As-tu pris une seule bonne décision dans ta vie?

Je n'ai pas le temps de répondre à ma conscience puisque je sens la présence de Dimitri derrière moi, me faisant rouvrir les paupières. Sa petite silhouette trapue me dévisage d'un air menaçant. Il remonte ses lunettes, qui glissent sur son nez rond, et me dit, d'un ton froid et sans appel:

- Tu dois impressionner le chef de la Bratva. Si tu loupes ton coup, je te bute moi-même. Compris?

J'acquiesce, n'ayant aucune envie de faire la maligne. De nouveau seule, mon attention se reporte sur moi-même, mon esprit divaguant dans la profondeur océanique de mon regard, me lançant ainsi dans une rétrospective de ce qu'a pu être ma courte et misérable existence.

Elle n'a jamais été un long fleuve paisible.

J'ai toujours navigué sur des cascades, trouvant vite ennuyeux de simplement vivre comme tout le monde attendait que je le fasse.

Mes parents m'ont appris les rudiments de la vie. Comment être une bonne personne. Comment devenir une jeune femme ancrée dans la société moderne. Respecter la Loi ! Ne pas se faire remarquer et faire propre sur soi. En somme, comment devenir une bonne petite femme qui plaira aux autres.

Ils avaient un chemin tout tracé pour moi. Faire de grandes études, pour devenir neuropsychologue. Passer donc des années à l'école, puis enchaîner sur un Master et un Doctorat.

"Tu imagines, un Docteur dans la famille? Cela serait tellement respectable et bien vu! Et puis tu seras entouré de personnes bonnes et instruites. Tu te trouveras un mari qui aura une bonne situation. Un Docteur, comme toi, ou bien autre chose! Et tu nous feras de magnifiques enfants ma chérie!" s'étaient enjoués mes parents lorsque j'ai eu mon bac à dix-huit ans.

Vous l'aurez donc compris, ils me destinaient à une vie bien rangée, sans frasques, et surtout dans les clous.

Quand je riais un peu fort, que je criais ou bien que je jouais en étant un peu trop bruyante, ou en faisant "le garçon", comme aimait bien le dire ma mère sur un ton d'exaspération, je me faisais rapidement rabrouer, m'obligeant à me comporter convenablement.

Une torture!

Je devais correspondre à un idéal qu'ils s'étaient imaginés. Mais, m'a-t-on demandé ce que je voulais ? A-t-on pris en compte mes désirs ?

La réponse vous la devinez...

Personne n'a jamais cherché à savoir ce qui me faisait vibrer, quelles étaient mes ambitions.

À aucun moment mes géniteurs n'ont pris en compte mes rêves. Ils ne cessaient de dire que, quand j'aurais dix-huit ans je ferais comme bon me semble.

Mais, c'était un mensonge...

Je me suis tenu correctement, ayant été la première en classe durant toute ma scolarité. Je n'ai jamais fait de grosses bêtises, n'ayant jamais séché les cours, ou fait le mur la nuit. Je ne suis jamais allée à des fêtes sans l'accord de mes parents, et ne suis jamais rentrée après le couvre-feu qu'ils m'autorisaient.

J'ai toujours été la fille parfaite qu'ils souhaitaient, alors que je n'ai jamais été la petite Mia toute sage, propre sur elle, toujours bien apprêtée, avec une coiffure simple et impeccable. Je ne me suis jamais reconnue dans cette fille, maussade et monotone, qu'ils avaient créée. Quand je me regardais dans la glace, mon image ne reflétait aucune des couleurs de l'arc-en-ciel dont était peinturé mon âme.

Mia n'a jamais aimé la musique classique, les sodas sans sucres et les pâtisseries à moindre calorie. Non! La véritable Mia est une rockeuse dans l'âme! Fan de métal, de pantalon en cuir et de botte à sangles et de chant! Adepte des tatouages et des colorations les plus folles, des styles vestimentaires les plus voyants!

Non. Je n'ai jamais été faite pour être cette fille de bonne famille qu'on voulait tant que je sois.

C'est pourquoi je suis partie dès que l'occasion s'est présentée! Je me suis retrouvé à découvrir d'autres pays, à chanter clandestinement dans des petits bars, dans des parcs, avec un groupe de jeunes musiciens baroudeurs. Ils étaient fans de ma voix, et j'étais si heureuse de pouvoir faire vibrer mes cordes vocales en sentant mon palpitant s'affoler dans ma poitrine, en sentant mes veines s'enflammer lorsque j'avais un micro entre les mains.

Nous suivions nos propres règles, sans aucune contrainte et un sentiment de liberté revigorant.

Seulement, rien ne s'est passé comme je l'avais espéré et je me suis retrouvée à errer... Seule... Dans les rues terrifiantes de la capitale Russe. Transit de froid, terrifiée par les passants qui me dévisageaient avec bien trop d'insistance pour que je puisse me sentir en sécurité, pour que je ne prenne pas mes jambes à mon cou lorsque l'un d'eux m'a sifflé et m'a insulté en s'approchant de moi.

Cette nuit est encore très claire dans mon esprit. Après tout, cela ne fait que quelques mois que les choses se sont passées, que ma vie a basculée et a été vendue à la mafia. Cela ne fait que quelques mois que je l'ai rencontré, mon sauveur. Celui qui m'a évité une mort certaine, et a su me donner une chance de vivre.

- MIA! tonne Marco. C'est à toi dans une minute.

Le cœur battant, je me saisis de mon portable lorsqu'il vibre, et ma dose de courage m'envoie un message, me faisant sourire contre mon gré.

Message de Mikhaïl :

"J'ai confiance en toi, Raduga. Je sais bien que tu ne me décevras pas."

Malgré tout ce qu'il s'est passé depuis notre rencontre, je suis tout de même contente de l'avoir rencontré. Après tout, où serais-je sans lui ?

Je repose mon précieux dans mes affaires, me souriant une dernière fois dans le miroir en me répétant que je peux le faire, que je peux gagner ma place ici.

- Je crois en moi! chuchoté-je à mon reflet.

Contrôlant mes tremblements, je m'avance vers le rideau opaque qui me sépare de mon destin.

La tête haute, je ne laisse plus rien paraître de mon trouble, laissant Mia derrière ce rideau, invoquant Raduga pour devenir celle qui les mettra tous à genoux.

Celle qui les fera succomber les uns après les autres.

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