chapitre 1

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Inceste 

Lili Sanchez, 21 ans, Région Var


Lili a été abusée par son père de ses trois ans à ses quatorze ans. Son père a été condamné pour ces faits. Lili Sanchez est aujourd'hui responsable dans un magasin discount alimentaire dans le Var. Elle est venue témoignée de son parcours de vie. Quand on lui demande comment faire, en tant que victime, pour vivre avec ce qui lui est arrivé, la réponse est immédiate. "La première difficulté, c'est de porter plainte. Ce qui n'est pas si simple non plus . J'ai été victime de l'âge de trois ans à l'âge de quatorze ans. Donc j'ai porté plainte à la veille de mes 17 ans et c'était très difficile , car j'ai mis du temps avant d'être assez forte. j'avais peur et j'étais terrorisée. Malgré tout, ça reste encore difficile aujourd'hui de déposer plainte. Ce n'est pas simple, c'est pas évident, même si on a des associations quand on est victime" reconnaît-elle.

"Souvent, vous êtes le vilain petit canard quand vous commencez à parler"

"La problématique, c'est que c'est de l'intrafamilial pour la majorité des cas : ça reste dans la famille. Souvent, vous êtes un peu le vilain petit canard quand vous commencez à parler. Moi, pour mon cas, je vais dire que j'ai eu beaucoup de chance, car j'ai une maman géniale qui ma cru de suite et qui m'a soutenue dans toute les démarches, car elle était elle-même victime de mon père, il l'a battait. Il n'empêche que le fait d'être à deux, ça m'a quand même bien soutenu. On a eu la chance de rencontrer directement le procureur, sans passer par la gendarmerie. En fait, on a eu vraiment beaucoup, beaucoup de chance sur notre parcours judiciaire, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui pour beaucoup de victimes" poursuit-elle.

Mieux accompagner les victimes et développer les UAPED

Aujourd'hui, Lili SAnchez milite pour que la parole des enfants soit mieux recueillie et se bat pour mieux accompagner les victimes. Elle défend, notamment, le développement des UAPED, des Unités d'accueil pédiatriques enfants en danger. "Ce sont des lieux quand même beaucoup plus adaptés pour accueillir la parole de l'enfant dans les hôpitaux plutôt que dans un commissariat ou dans une gendarmerie. Il ne faut jamais oublier que c'est une victime, qu'elle est blessée. Et quand on est blessé, on va à l'hôpital. On ne va pas forcément dans une gendarmerie ou dans un commissariat", dit-elle.

Comment se rendre compte qu'un enfant est victime ? Comment empêcher ce fléau ? Là encore, avec patience, Lili Sanchez répond qu'il faut refaire de la prévention dans les écoles primaires, rappeler que "ton corps est ton corps, que personne n'a le droit d'y toucher". C'est un des premiers gestes à faire selon elle. Ces explications peuvent s'accompagner de la lecture de livres, il y en a beaucoup, aujourd'hui, qui sont adaptés à tous les âges. Car l'inceste frappe même les tout-petits rappelle-t-elle. "Il y a des enfants qui sont victimes avant l'âge de trois ans, entre zéro et trois ans. Donc ça veut dire en maternelle".

"Quand on est enfant, on ne se rend pas forcément compte que ce que l'on vit n'est pas normal"

"Parfois ce n'est pas forcément les parents, parfois ça peut être le grand-père, ça peut être un oncle, mais ça peut parfois être un grand frère" poursuit-elle. "Donc c'est compliqué de parler parce qu'il y a toute cette période de la prime enfance où on ne sait pas que ce n'est pas normal ce qu'on vit, généralement quand on le découvre, c'est à l'adolescence. Moi je l'ai découvert à l'adolescence en me disant : 'Mais c'est bizarre parce que, à l'école, on ne parle pas de ça'. Puis il y a des choses qui font qu'on s'interroge, on pose des questions même si on n'en parle pas franchement", se souvient-elle. Pour elle, certains signaux d'alarme sont à surveiller : une enfant anorexique, par exemple, ou qui a des addictions, "ce n'est pas forcément d'office cette problématique-là, mais en tout cas, il faut s'interroger sur cette question des violences sexuelles", martèle-t-elle.

Ma mère n'était au courant de rien, je ne voulais pas lui dire car elle était victime de violences conjugales, elle avait très peur de mon père. Peur qu'ils nous tues, un jour après s'en être prit violemment à ma mère et l'avoir pour morte dans sa chambre il s'en ai prit à moi, il m'a violée encore et encore. Ca a été la dernière fois qu'il nous touchait car j'ai appelé une connaissance qui nous à hébergée chez elle.

Un Français sur dix, victime d'inceste ?

D'après un sondage, un Français sur dix confie avoir été victime d'inceste, soit environ 6. 700. 000 personnes. Un chiffre impressionnant, mais peut-être même en dessous de la réalité pour Lili Sanchez. "C'est très difficile de parler, mais peut-être encore plus difficile pour les hommes d'évoquer le fait d'avoir été victime d'inceste ou d'avoir été victime de violences sexuelles dans l'enfance. Non, je pense que c'est beaucoup plus et je pense que déjà six millions, c'est énorme ! Ça représente plus de 10 % de la population, ce qui est quand même un phénomène grave ! Et je pense surtout qu'on n'a pas assez d'outils et d'accompagnement", Lili Sanchez

Après trois ans de travaux, la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) a et fait 82 préconisations pour mieux protéger les enfants contre les pédocriminels. "J'invite tout le monde à lire ce rapport fait avec Édouard Durand NDLR], qui est un des magistrats qui a vraiment appuyé sur la problématique de l'inceste et du stress psycho-traumatique que provoque l'inceste. Je rappelle que l'inceste, ça a les mêmes effets que les enfants qui vivent la guerre. Donc c'est des années et des années pour se reconstruire... quand on arrive à se reconstruire. Moi, j'ai cette chance de pouvoir me reconstruire et de me dire survivante de l'inceste. Il faut savoir que ces six millions de personnes ont un coût pour la société. Elles ont du mal à s'investir dans la société, donc du mal à travailler", explique-t-elle encore.

"Ce n'est pas aux victimes d'avoir honte, elles n'y sont pour rien"

Aujourd'hui, "survivante de l'inceste", comme elle aime à se décrire, Lili Sanchez témoigne. "C'est important d'être là aujourd'hui. On n'a pas à avoir honte ! Ce n'est pas nous qui devons porter la honte ! Ce n'est pas à nous de porter la culpabilité ! C'est à ces hommes et ces femmes qui commettent l'inceste, qui commettent ces violences sexuelles. Il faut que l'enfant prenne conscience, comme la victime à l'âge adulte, qu'elle n'y est pour rien !" car, rappelle-t-elle, les agresseurs savent ce qu'ils font. Ils sont généralement majeurs, majoritairement des hommes et sont aussi, souvent, dans la manipulation "pour vous dire taisez-vous, ne parlez pas". "Moi, j'ai mon père qui m'a menacée de mort à plusieurs reprises. Il a tenté aussi de me tuer quand  j'étais plus jeune.

Aujourd'hui, après être passée par "pas mal d'étapes", Lili Sanchez s'est reconstruite : "pendant longtemps, malgré tout, on se sent responsable. On se dit qu'est ce qu'on a fait ou pas fait pour avoir mériter ça ? Alors qu'en fait, on n'y est pour rien", conclut-elle simplement.

Voilà un prologue chargée d'émotions.



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