Orion,
Aujourd'hui, je l'ai regardée sortir quelques souvenirs de sa poche. Ils étaient vieux et usés. Usés jusqu'à la corde.
Usés comme ceux que l'on ressort inlassablement. Qu'on serre dans nos mains très fort.
Usés par le temps ou bien par les larmes.
Je l'ai regardé et elle était belle.
Les joues rosées, sa bouche rouge, et puis ses yeux. Ses yeux mélancolies.
Elle était belle, comme si elle avait tout vécu, tout vu, comme une ville que l'on découvre, avec ses coins et ses recoins. Belle, comme ces choses dont on ne peut pas se lasser.
J'aurais pu passer des heures dans ses yeux.
Mais elle les a détourné.
Tournées vers son passé.
Passé auquel je n'aurais jamais accès, je l'ai compris à son regard lointain, à ses mains tremblantes.
Elle m'a raconté l'histoire d'une petite fille, et de l'absence. Elle m'a raconté son grand chagrin d'amour : son père. Les mots durs, les nuits blanches un peu trop noires, puis la confiance dans le caniveau.
Elle m'a raconté, sans les trémolos dans la voix, sans les pleurs ni les cris. Elle a raconté comme raconterait celui qui a déjà passé des heures à y penser, à tourner les événements dans sa tête.
Elle a dit que ce n'était pas grave, que c'était comme ça. Elle l'a dit avec sa tête, mais son cœur criait, Orion. Un cri déchirant. A vous retourner les tripes. J'aurais aimé la prendre dans mes bras. Mais il est des souffrances inatteignables... Sur ce banc, elle était pourtant si loin.
Je l'ai observée, elle et ses souvenirs pliés en quatre, j'aurais aimé voir ce qu'elle voyait.
J'aurais tant aimé comprendre... L'atteindre dans sa solitude.
Mais elle s'est détournée en un clin d'oeil. Et elle a souri. Un sourire à vous donner l'envie de tuer quiconque le ferait s'effacer. Elle a rangé ses souvenirs. Un à un. Avec délicatesse. Le regard dans le vague, j'ai compris qu'elle pouvait se briser si facilement.
Orion,
dis-moi qu'elle guérira, dis-moi qu'il existe quelque part,une consolation rien que pour elle,ton ami qui t'aime,
S.
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Nos cœurs endoloris
PoetrySirius a un problème : cette fille. Cette fille qu'il aime. Cette fille qui fait mal. Alors il fait la seule chose qu'il sait faire, il écrit. Des mots doux. Des mots durs. Il écrit à Orion, comme une consolation, un exutoire. Il écrit comme il aime...