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N E S S A Y E M
✍🏼





















Le lendemain matin, j’étais debout avant même que le soleil n’apparaisse. La nuit avait été longue, agitée, pleine de fragments de souvenirs et de pensées que je voulais chasser mais qui revenaient comme un poison insidieux. Chaque seconde passée dans le noir m’avait semblé une éternité. Quand la lumière de l’aube avait enfin filtré à travers les rideaux, j’avais ressenti un soulagement presque déchirant. Au moins, le jour apportait un semblant de mouvement, une distraction.

Je descendis au salon, toujours silencieuse. Ma tante était déjà debout, occupée à faire du café. Elle ne m’adressa qu’un bref regard, sans rien dire. Peut-être avait-elle remarqué l’ombre qui planait sur moi, mais elle avait choisi de l’ignorer. Parfois, les gens pensent que le silence aide, mais il ne fait qu’amplifier le bruit dans ma tête.

J’attrapai un morceau de pain à moitié rassis sur la table et le grignotai distraitement. Je n’avais pas faim, mais il fallait que je fasse semblant, au moins pour elle. Son regard pesant sur ma nuque me rappelait que je devais jouer ce rôle, celui de la fille qui va bien, qui avance.

Quand je sortis, l’air froid du matin me gifla. Je pris une grande inspiration, espérant que cela ferait taire le chaos en moi. Le trajet jusqu’au lycée me sembla interminable. Chaque pas me rapprochait d’un endroit que je haïssais de plus en plus. Je savais que je n’y avais pas ma place, que ma présence là-bas était une mascarade. Mais où aurais-je pu aller, sinon ?

Quand j’arrivai devant les grilles, je m’arrêtai un instant. Mon corps refusait d’entrer. Mon esprit, déjà saturé, se révoltait contre l’idée d’affronter une journée de plus. Je croisai quelques regards d’élèves qui passaient, riant et discutant. Ils semblaient si légers, si libres. Moi, j’étais un poids mort, traînant ma carcasse dans un monde qui ne voulait pas de moi.

Je poussai un soupir et fis demi-tour. Pas aujourd’hui. Je ne pouvais pas. Mes pieds me portèrent loin du lycée, sans destination précise. Juste marcher, m’éloigner, disparaître, même si ce n’était que pour quelques heures.

Mes pieds tapaient le sol dur en béton, chaque pas résonnant comme une affirmation de ma présence dans un monde où je me sentais pourtant invisible. Mon long manteau noir dansait légèrement derrière moi, agité par le vent froid qui s’insinuait jusqu’à mes os. Mes cheveux blonds s’envolaient dans tous les sens, m’aveuglant parfois, comme s’ils voulaient me forcer à arrêter, à réfléchir. Mais je ne réfléchissais pas. Je marchais, simplement.

Autour de moi, la ville continuait de vivre, sourde et indifférente à mon silence pesant. Ce silence, il m’écrasait, me tenait compagnie et me consumait à la fois. Il y avait bien des bruits ici et là — des voitures qui klaxonnaient, des voix qui s’élevaient au loin — mais tout me paraissait lointain, flou. Comme si ce n’était pas réel, ou comme si je n’en faisais pas partie.

Chaque coup de talon sur le sol résonnait dans ma tête, une mélodie monotone qui accompagnait mes pensées noires. J’avais envie de pleurer, mais rien ne venait. À quoi bon, de toute façon ? J’avais déjà tout laissé derrière moi, y compris les larmes. Il ne me restait qu’un vide, un gouffre dans lequel je tombais en boucle, encore et encore.

Le vent soufflait plus fort, mais je ne ralentissais pas. Mes mains glissèrent dans les poches de mon manteau, cherchant un peu de chaleur, quelque chose à quoi me raccrocher. Rien. Juste du vide, encore. Je regardais mes pieds avancer, le béton défilant sous mes semelles usées, cette routine mécanique qui me donnait l’impression d’être un automate. Une machine qui avance sans but, sans âme.

𝐍𝐞𝐬𝐬𝐚𝐲𝐞𝐦 ✍🏼 | « Plus D'amour A Donner Si C'est Pas Lui » [ CORRECTION] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant