Chapitre I

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Jazmin

12 février 2014

Cela faisait bientôt trois ans, écrivais-je dans mon journal. Trois ans depuis cette nuit fatidique. Trois ans depuis que j'avais été contrainte de fuir Manchester, laissant derrière moi le souvenir de ma mère, son corps inerte gisant dans une mare de sang.

Trois putains d'années d'enfer.

Je me retrouvais désormais dans ma ville d'origine à Bogota, en Colombie, sous la tutelle de ma tante, une âme perdue noyée dans les vices de la ville. La richesse et la sécurité que j'avais connues avec ma mère s'étaient rapidement évaporées, laissant place à la misère et à la désolation.

Mes larmes coulaient sur les pages de mon carnet tandis que je repensais à ma vie passée, à ma mère. Une sensation familière d'angoisse et de désespoir m'envahissait.

Alors, une fois de plus, je me retrouvais dans cette salle de bain lugubre, seule avec mes pensées tourmentées. La lame était là, une compagne familière dans ma détresse, prête à transformer mon chagrin en un ballet sombre et intime.

La honte m'envahissait, mais je ne pouvais résister à l'appel de l'oubli. Je voulais juste que ça s'arrête.

Depuis ce jour, depuis le 24 Mars 2011, je ne vivais plus, je survivais.

La vie avait perdu tout son goût à mes yeux. Je préférais me replier sur ma souffrance, m'isolant du monde. Mais j'en avais assez, assez de subir ma propre existence.


Cela faisait quatre jours que je n'avais pas touché cette lame, et j'en étais presque fière. C'était la première fois depuis exactement 2 ans, 10 mois et 23 jours.

Je décidai de sortir faire des courses, une tâche que j'évitais habituellement par peur. À Bogota, je ne me sentais pas du tout en sécurité, contrairement à Manchester où je pouvais sortir la nuit sans problème.

 Mais là, je n'avais pas le choix. Sinon, j'allais mourir de faim.

Ma tante n'en avait rien à faire de moi. Je ne savais même pas si elle se souvenait de mon existence. Elle serait prête à me vendre pour ses drogues, je pense.

Lorsque je suis entrée dans la seule épicerie à vingt kilomètres de là, le regard insistant de l'épicier m'avait donné la chair de poule. J'ai presque cru mourir lorsque sa main a effleuré la mienne pour scanner les articles.

Ce type me dégoûtait, avec ses soixante ans bien tassés. Heureusement, j'ai pu m'échapper dès que j'ai payé. Je me suis enfuie jusqu'à chez moi, mais malheureusement, j'ai percuté un garçon qui était au téléphone et qui avait l'air vachement en colère, le faisant tomber.

Par peur d'une confrontation avec un autre humain que moi-même, je me suis enfuie en le regardant juste dans les yeux, comme un signe d'excuses.

Une fois arrivée chez moi, j'ai refermé la porte derrière moi et j'ai couru me réfugier dans ma chambre, m'affaissant sur mon lit en sanglotant. En relevant la tête, j'ai vu mon matelas imprégné de mes larmes, et je me suis sentie sale et misérable. Mais quelque chose me troublait ce garçon que j'avais renversé une heure plus tôt. J'avais comme l'impression de l'avoir déjà vu quelque part.

Flashback du 31 décembre 2012

Le tribunal était empli de visages inconnus et de regards accusateurs.

Je ne me sentais absolument pas rassurée.

D'un côté, la famille de cet homme, celui qui avait détruit ma vie en tirant trois balles dans la tête de ma mère. 

COUNTERBALANCEWhere stories live. Discover now