I Z Y A N
🚬
Le vent soufflait doucement, soulevant les feuilles mortes sur le trottoir dans une danse sans but. Elles tournaient, se heurtaient, s’éloignaient, avant de retomber mollement sur l’asphalte. Le ciel, d’un gris pâle, étirait son voile monotone au-dessus de la ville, sans éclat, sans nuance. Il ne pleuvait pas, mais l’air portait cette humidité qui colle à la peau, un avant-goût d’averse qui ne vient jamais.
Je marchais lentement, les mains enfoncées dans les poches de mon manteau, le regard perdu sur le sol fissuré. La ville était calme, presque trop. On était en fin d’après-midi, ce moment étrange où le jour commence à s’effacer sans vraiment laisser place à la nuit. L’heure où les gens rentrent chez eux, où les cafés se vident, où les rues prennent une teinte plus froide.
Fethi m’attendait au bout du parc, assis sur un banc, le dos courbé, les coudes sur les genoux. Il ne bougeait presque pas, si ce n’est pour écraser du bout du pied une feuille tombée là par hasard. Je m’approchai, sans précipitation.
— T’as une sale gueule, lui lançai-je en m’asseyant à côté de lui.
Il eut un léger sourire, mais il ne me regarda pas tout de suite. Son regard fixait l’horizon, un point invisible que je ne pouvais pas voir.
Fethi — Toi aussi, répondit-il finalement.
Un silence s’installa. Le vent fit bruisser les branches nues des arbres au-dessus de nous. Un groupe de pigeons s’envola soudainement, dans un battement d’ailes bruyant, puis le calme retomba.
— Ça faisait longtemps qu’on n’avait pas traîné ici, dis-je en regardant autour de nous.
Le parc n’avait pas changé. Les bancs usés, la fontaine qui ne fonctionnait plus, les lampadaires aux ampoules clignotantes. Même l’odeur de terre humide et de feuilles en décomposition était la même.
Fethi — Ouais, répondit Fethi, toujours aussi absent.
Je ne posai pas de questions. Il y avait des jours où parler ne servait à rien. Aujourd’hui, c’était un de ces jours.
Je levai les yeux vers le ciel. Un ciel sans couleur, sans lumière. Juste un grand vide suspendu au-dessus de nos têtes.
Et pour une raison que je ne comprenais pas, ça me serra la gorge.
Fethi tourna légèrement la tête vers moi, son regard toujours perdu quelque part dans le gris du ciel. Puis, dans un souffle à peine audible, il murmura :
Fethi — T’as pas une clope ?
Sa voix était basse, fatiguée, presque détachée, comme si la question n’avait pas vraiment d’importance. Comme si, au fond, il savait déjà la réponse.
Fethi fume depuis bien longtemps. À force, c’est devenu une addiction mortelle.Je glisse une main dans ma poche, sentant le carton du paquet sous mes doigts. Un geste automatique, presque mécanique. J’en sors une cigarette et la lui tends sans un mot.
Il l’attrape lentement, l’observe un instant avant de la porter à ses lèvres. Un geste qu’il a répété des milliers de fois, toujours avec cette même lassitude. Comme si chaque bouffée n’était qu’un compte à rebours invisible, un poison qu’il connaissait trop bien mais dont il ne pouvait plus se passer.
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𝐍𝐞𝐬𝐬𝐚𝐲𝐞𝐦 ✍🏼 | « Plus D'amour A Donner Si C'est Pas Lui » [ CORRECTION]
Non-FictionNessayem est une adolescente marquée par les cicatrices invisibles laissées par son père, un homme cruel qui a brisé son enfance. Après avoir fui cette vie de violence, elle trouve refuge chez sa tante, pensant que la paix l'attend enfin. Mais à mes...