Les oiseaux entonnèrent leur chant mélodieux, mais jamais leurs trilles n'atteignirent les murs de la chambre de Malicia. Les rayons du soleil filaient à travers ses rideaux écarlates, inondant la pièce de leur lumière dorée. Malgré cela, elle s'efforça de garder ses paupières closes, refusant d'accueillir la journée naissante.
Pendant ce temps, sa sœur Rosalie se faisait déjà laver par leur servante. En vérité, Malicia avait été éveillée deux heures avant sa sœur, mais comme chaque matin, elle permettait à Rosalie d'être toujours plus ponctuelle, supposant qu'elle devait l'être davantage pour préserver l'opinion et les préférences qui s'étaient créées autour d'elles.
Elle se démena pour ne pas céder aux larmes, mais son cœur lui serrait la poitrine et la peau de ses doigts torturés pleurait du sang. Son anxiété la consumait, s'infliger cela lui donnait l'impression d'être plus courageuse. Elle avala péniblement sa salive en apercevant son teint blafard se refléter dans son miroir.
Éprouver cette amertume dans sa gorge était devenue une habitude pénible. Même lorsqu'elle se lavait, shampooinait, frottait et rinçait, la sensation de saleté rongeait son corps. On lui glissa dans un ensemble de robe rouge, dont la dentelle transparente sublimait sa morphologie héritée de sa mère et ses muscles façonnés sur ses cuisses, dévoilant les années d'entraînement intensif.
Le rouge sied mieux à ceux qui ont la peau bronzée, tout semblait mieux convenir à sa sœur, c'était là sa pensée.
Elle ne remercia point les femmes qui l'avaient préparée, considérant que c'était leur travail et elle savait au fond que si ses servantes s'étaient occupées de Rosalie à sa place, il n'y aurait pas eu ce malaise étouffant. Ainsi, elle n'avait pas l'intention de témoigner sa gratitude envers cette atmosphère.
Parcourant les couloirs en pierre les plus sombres mais ornés de fleurs en guise de décoration. Sa famille affectionnait les fleurs, en particulier les roses, empreintes de poison, et le poison n'est autre que leurs premières filles, Malicia.
- Pardonnez-moi, Votre Grâce, serait-ce vous, Malicia, là-bas dans l'obscurité ?
Cet homme n'est autre que le fils du majordome du roi Vittorio Serpe. Isacco Ursini a été logé dans l'une des chambres du troisième étage, située dans la quatrième tour du château. Ce brun aux yeux adoucis entoure de ses mains abîmées la mâchoire froide de Malicia.
- Permettez-moi de vous contempler, Votre Majesté. Mais vous pleurez, vous pleurez, Malicia. Est-ce à cause de l'état de votre père ?
Malicia voudrait s'éloigner de ce contact physique, mais la poigne de son ami freine ses mouvements. Elle est en mesure de le mettre à terre, maîtrisant parfaitement les techniques de combat et les exerçant avec expertise, à l'exception d'aujourd'hui.
- Encore des mots, toujours les mêmes mots.
En ce jour du 29 décembre, les territoires et les peuples relevant du royaume d'Islithia devront prochainement, dans les heures à venir, prêter allégeance à un nouveau roi. Néanmoins, Malicia, dépourvue de sexe masculin, n'arbore aucune ressemblance avec un homme. Ce qui la préoccupait était le fait qu'elle deviendrait la première femme à accéder enfin à cette domination tant convoitée, ce pouvoir qu'elle a tant désiré.
- Isacco... Je m'épuise. Je vous en prie, ne me fixez pas du regard. Il me faut aller en personne lui administrer son médicament. Son dernier.
- Pourquoi vous infligez-vous une telle peine ? Vous vous êtes tant occupée de votre père, ne culpabilisez donc plus.
Elle voulut le contredire ; elle ne pleurait pas pour son géniteur. Les morts ne suscitaient jamais ses larmes ; ce sont les vivants qui l'attristent le plus. Elle retint ses paroles. Elle hocha la tête, espérant le rassurer.