Je laisse l'eau brûlante dénouer mon corps angoissé.
Le vertige doit être noté parmi les émotions fortes qui me font disparaitre de mon monde et resurgir dans l'autre.
Or y compris le vertige, il y a les crises d'angoisse, l'adrénaline de l'excitation, la surprise, la peur...Je dois contrôler ses émotions pour ne pas me retrouver dans une situation incongrue. La dernière fois, je n'ai pas pu contrôler mon excitation durant mon escapade à la montage et je me suis retrouvé propulsé en haut d'un gratte-ciel à Illora, sans me déplaire, la vue était magnifique.
Je sors de la douche et repense à la dernière grosse dispute que j'ai eue avec mon père au sujet de ma mère qui s'était enfui de son hôpital psychiatrique, suite à cela, pour me changer les idées, j'avais décidé de faire couler un bain, mais ma colère et ma peine étaient si grandes que je me suis retrouvé dans un sauna collectif.
Bien heureusement, personne ne m'a vue, la surprise mêlée à la peur d'être vue nue m'avait fait disparaitre la minute d'après. Je secoue la tête, encore troublée par cette expérience.
J'ai probablement pu surgir dans la ville d'Illora des centaines de fois quand j'étais petite, mais le souvenir de mon premier saut remontait à l'âge de 4 ans. Mon père m'avait emmené a une fête foraine ce jour-là, alors qu'il allait me chercher une glace, un Mickey géant avait surgi devant moi et j'ai resurgi dans un entrepôt vide et sombre à Ilora.
Le passage de la lumière à l'ombre m'avait marqué à vie.
Ce fut à ce moment-là que mes crises d'angoisse débutèrent. Jusqu'à mes 12 ans mes crises d'angoisse me permettaient de revenir, les enseignants et autres adultes considéraient ces crises comme résultat d'une mère délirante. Je les laissais raconter ce qu'ils voulaient et ne racontais que la vérité à mon père.
Il l'a toujours su, mais préfère fermer les yeux. Il ne veut pas y croire même si je disparaissais devant ses yeux. Tout ce qu'il voulait c'était une vie de famille normale...Or, le jour de ma naissance dans ce monde fut tout sauf normale.
Ce jour-là, deux personnes ayant eu soif d'argent braquèrent le magasin où se trouvait ma mère, elle avait dû, avec d'autres, se cacher dans le sous-sol du magasin. Une femme qui se trouvait parmi eux l'avait aidé du mieux qu'elle le pouvait avec son accouchement.
Lorsque le braquage s'était arrêté, les deux délinquants s'étaient enfuis et ma mère fut emmenée en urgence à l'hôpital. Cette histoire est la version subjective de ma mère, une version qu'elle n'arrête pas de ressasser... Comment ne pas la croire ? Son cerveau s'est arrêté sur ce moment important de sa vie, alors comment pourrais-je penser qu'elle l'a inventé ?
Or, la version officielle affirme qu'aucun braquage ne s'est déroulé dans les lieux et que ma mère a était retrouvée allongée à bout de souffle dans les rayons du magasin. Cette version évoquait la présence d'un bébé entre ses mains...Mais ma mère aurait accouché sans faire de bruit et sans que personne ne sache ? Mon père soutient la version officielle et en veut a ma mère de ne pas lui avoir dit plutôt sa condition psychologique.
Pour ma part, je soutiens les deux versions. Je veux croire en ma mère, mais je ne veux pas trahir mon père.
"Yeila !"Je me tourne, surprise, en me tenant au rebord de mon lit.
"Papa combien de fois je t'ai dis de ne pas crier comme ça !"
J'entre dans la cuisine. Une bonne odeur de gratin de pommes de terre me mit l'eau à la bouche. Je repense à cet inconnu blessé devant sa voiture et regarde mon père doucement.
"Papa..."
"Hum ?"
"..."
Il se retourne étonné par mon silence.
"Tout à l'heure...J'ai utilisé le vertige pour partir, je continue craignant sa colère, ça a marché, je me suis transporté sur le pont Deschamps d'Illora. J'ai marché et observé les alentours comme à mon habitude... J'étais sur le point de rentrer quand j'ai vu un homme grièvement blessé. "
Il arrête de remuer la purée maison qu'il faisait.
"C'était une blessure par balle sur le côté droit de son abdomen. La balle n'avait touché aucune de ses organes interne, mais sa condition n'était pas bonne, comme s'il... s'était battue jusqu'à épuisement. En me rapprochant, il m'a repoussé." Je ferme les poings.
"Et ? Tu es partie ?"
"Comment j'aurais pu ? Un patient est un patient, qu'importent sa nature et sa condition"
Il soupire.
"Je ne savais pas où se trouvait l'hôpital de ma position, et je ne connaissais pas non plus les environs."
"Tu as pensé à son portable ? Ou à appeler à l'aide dans la supérette ?"
"Il ne voulait pas me donner le numéro d'urgence, et...Je n'ai pas pensé à demander de l'aide dans la supérette... J'étais trop occupée à tenir sa blessure et il me disait qu'il ne voulait rien d'autre mis à part monter dans sa voiture, donc... Je l'ai aidé à y monter et je ne voulais pas...ne pouvais pas le laisser comme ça. J'ai conduit la voiture jusqu'à un hôtel, je suis ensuite partie dans une pharmacie pour acheter les outils nécessaires..."
"Ne me dis pas que...Qu'est-ce qui t'es passé par l'esprit ? Tu aurais pu demander de l'aide à la personne en service dans l'hôtel !"
"Je voulais le faire, mais il m'en a dissuadé, comme s'il... était recherché."
"Tu as sauvé un malfaiteur ?"
"Comment tu sais que je l'ai sauvé ?"
"Tu es ma fille, je t'ai formé depuis que tu as fait tes premiers pas." Il soupire et s'essuie les mains.
[3 Jours plus tard, Paris]
Le passage piéton tourne au vert. Les gens commencent à affluer des deux sens. Je mange ma glace en m'engageant sur le passage, perdue dans mes pensées. Soudain tout autour de moi se brouilla, comme aspirée, je surgis à Illora devant une grande entreprise d'agents de sécurité. J'ouvre la bouche en regardant l'enseigne ExcelBguard.
[ 3 mois plus tard, Illora]
"...Hein ??!!! Comment j'ai pu me retrouver ici ?"
Je tourne encore ébahis. J'étais bel et bien à Illora, les grands écrans, les buildings remplaçaient les espaces verts et les vieilles maisons datant de plusieurs décennies. J'entends du bruit provenant de l'intérieur de l'entreprise, soudain des voitures de police arrivaient avec vitesse devant moi. Je recule, dépassée par les événements. Des agents de sécurité se faisaient arrêter.
"Arrêtez-les !" Hurla un policier.
Un homme s'enfuyait, ses traits de visage étaient déformés par la rage et... Il fonçait droit vers moi. Je recule les sens encore brouillés. Il se fait plaquer par terre par deux hommes en tenue de civil. L'un deux se lève.
"Tu croyais pouvoir t'échapper ?" Il lui écrasa la main.
"Aaarghhh"
Je reconnus le policier. Il leva les yeux et me voit aussi.
"Kylan, les menottes... Kylan ?" Demande son acolyte.
Il ne me lâche pas du regard.
Qu'est-ce que je faisais ici ? Face à lui ?
"Qu'est-ce qui se passe ? Kylan ? Tu vas bien ?" Demande encore son ami, tenant le fugitif.
"Oh..ah tiens. "
Il se lève et s'approche. Je recule, essayant de chercher un endroit où fuir. Je vois une brèche entre deux voitures de police. Je me lance vers cette sortie, mais sa main me retient avant. Je le regarde et observe les policiers autour de nous. Tous les regards étaient braqués sur moi, je ne pouvais pas disparaitre comme ça.
"Toi."
Tant pis ! Je ferme les yeux essayant de faire affluer la peur et l'angoisse à travers ma peau. J'ouvre les yeux pour voir si j'avais réussi. Ce Kylan était toujours devant moi, la main me tenant fermement le poignet. Il attrape mon autre poignet brusquement.
"Qu-..." Il me passa les menottes au poignet.
"Arrêtez-là."
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Resurgir - Tome 1
Science FictionYeila Conor mène une vie double vertigineuse. À chaque changement d'émotion, elle bascule dans un monde parallèle. Elle y rencontre Kylan River, un homme énigmatique, sa perception de l'amour et de la réalité bascule. Kylan dévoile à Yeila des secre...