Et Finalement..

Chapitre 1 : Et finalement... il va bien falloir que je m'y fasse.

Ily a un an et demi ma vie n'était pas parfaite, mais je l'aimais bienquand même. J'avais deux maisons, dans lesquelles je partageais montemps. Une semaine chez maman, une semaine chez papa. Mes parents nes'adressaient pas la parole, mon petit frère me gavait un peu, maisbon, c'est le lot de beaucoup de jeunes de mon âge. J'allais dans unlycée que j'aimais bien avec des copines que j'adorais. Mon annéede seconde se terminait quand ça s'est produit.

Jem'en souviens comme si c'était hier.

LaCPE m'avait convoquée dans son bureau et je me demandais pourquoi.J'étais bonne élève, pas du genre à faire des bêtises... Quandje suis entrée dans son bureau j'ai été super étonnée d'y voirma mère. Ce n'était pas sa semaine et mes parents étaient très àcheval sur tout ça. Mon frère vivait avec maman depuis déjà unan, il avait choisi aussitôt que possible de vivre chez maman et dene venir chez papa qu'un week-end sur deux. Moi je ne voulais paschoisir entre mes parents alors j'étais restée dans le modèle leplus équilibré possible... La garde alternée.

LaCPE m'a invitée à m'asseoir et je n'étais pas franchementrassurée par la tête que faisait maman. Mais de là à imaginer cequi allait me tomber dessus.

Bref,mon père avait eu accident. Il était en soins intensifs. J'airamassé mes affaires comme un automate et j'ai demandé à maman dem'y conduire.

Laroute m'a parue très longue. Murée dans le silence, l'espoir et latristesse, je n'ai pas décroché un mot à maman qui me jetait desregards angoissés.

Quandelle s'est garée sur le parking de l'hôpital, j'ai été étonnéede la voir sortir de la voiture. En même temps j'étais soulagée.Je ne me voyais pas affronter ça sans elle. J'ai glissé ma maindans la sienne et on s'est dirigé vers l'accueil. Mon cœur battaitla chamade, mais je me disais que ça allait aller. Il était ensoins intensifs, oui, mais il était vivant. Il lui faudrait un peude temps et puis tout reprendrait comme avant.

Dansle couloir menant à sa chambre j'ai vu les parents de papa. Ilsdiscutaient avec un médecin et sur leurs visages la tristesse et lacolère dominaient.

Mamans'est arrêtée et a fait mine de lâcher ma main. D'un souriretriste elle m'a encouragée à avancer. Elle n'avait pas parlé àmamie et papi depuis le divorce et ils ne s'entendaient absolumentpas. Mais j'ai resserré l'étreinte de mes doigts autour des siensalors elle m'a accompagnée.

Lemédecin a repris son explication au début. Papa avait de multiplesfractures, dont il se remettrait avec le temps et beaucoup derééducation. Il a marqué un temps d'arrêt et a dit « SI »... et mon monde s'est écroulé. « Si il se réveille du comadans lequel il est plongé ».

Mabelle mère est arrivée, elle a lancé un regard cinglant à mamanpuis mes grands parents l'ont informée. Elle a fondu en larmes dansles bras de ma grand mère tandis que maman essayait tant bien quemal de me réconforter.

— Tupeux aller le voir si tu veux, m'a dit une infirmière avant d'ouvrir la porte pour que je puisse entrer.

J'aieu un instant d'hésitation. Si je le voyais, comme ça, tout seraitvrai. Là c'était encore un vilain cauchemar mais je savais qu'à laminute ou j'entrerais, ce serait un plongeon cruel vers la véritéla plus affreuse. Je me suis tournée vers maman.

— Situ viens avec moi.

Ellea eu l'air d'hésiter, je me doute bien qu'elle pensait que cen'était sûrement pas sa place. Elle a pris une profonde inspirationet m'a suivie. Mon cœur déchiré lui en sera toujoursreconnaissant. Elle a plongé dans l'enfer avec moi.

Papaétait allongé sur un lit, relié à des tas d'appareils, entouréde bip bip affreux. Son corps était recouvert de bandages et deplâtres, son visage portait des traces de coups et de coupures. Ilétait immobile, inerte. Aucune de ses mèches blondes n'était plusvisible, masquées par les bandages, et ses yeux bleus reposaientsous des paupières closes et violacées. On aurait pu le croire mortsi les appareils n'avaient pas démenti cette hypothèse par lesdessins réguliers de l'électrocardiogramme.