Mexicali et le Raven's Circus

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Je n'ai pas toujours été une maman surprotectrice et susceptible.


Autrefois, j'étais une reine. J'avais toute jeune était liée à Luzco, celui qui obtiendrait le pouvoir de notre petite ville. Notre union avait été décidée par nos géniteurs mais notre amour avait été décidé par nos cœurs. Il fut officiellement celui qui régnait, cependant, je dirigeais officieusement à ses côtés.

Nous avions ensemble appris à gouverner et à se battre, même si ce n'était pas mon droit. Nous prenions main dans la main les grandes décisions pour notre peuple. Luzco était respectueux envers moi, mais il était avide de quelque chose de la même couleur que ses cheveux : le sang. Je n'étais pas mieux que lui.

Entre nous, nous étions égaux, toutefois, ce n'était pas la même histoire pour ceux que nous vainquîmes au combat. Notre petite ville dominée était rapidement devenue un grand empire, en raison de notre génie militaire. Plus cela s'agrandissait, plus nous avions de vies à sacrifier ou asservir. Mais nous n'en avions jamais assez, nous n'étions pas "rassasiés". Alors nous continuions à nous battre et à rapporter toujours plus de territoires, de ressources et de prisonniers.

J'étais une reine sanguinaire et autoritaire, mais j'étais aussi trop sûre de moi, ce qui trahissait une certaine naïveté. J'avais rencontré un jour cet homme étranger, qui racontait une histoire perturbante sur le scellement de l'amour. Je voulais initialement le laisser partir, et je pensais que le laisser "sceller" un amour déjà éternel le ferait déguerpir.


Je ne savais pas à ce moment-là qu'au lieu de me permettre d'être à jamais avec Luzco, ce sortilège m'aurait séparé de lui à tout jamais.


Je perdis tout en à peine quelques jours. Alors que Luzco et moi préparions nos plans pour conquérir tout le Mexique, des guerriers venus visiblement d'un autre monde nous envahirent. Ils étaient bien plus puissants que nous, leurs armes étaient de loin plus sophistiqués que les nôtres. Nous nous étions battus jusqu'à notre dernier souffle, mais rien à faire, ils nous avaient battus.

J'avais perdu Luzco le même jour où notre empire s'écroula. Je l'avais dans mes bras, il avait une blessure beaucoup trop grande pour être effacée par mon pouvoir. Je ne pouvais l'emmener nulle part, les ennemis étaient partout. Plus je regardais où aller, plus je voyais à quel point la situation était désespérée. Luzco finit par se rendre, et mourir devant moi.

Je ne voulais ni vivre sans lui, ni être réduit à l'esclavage par ces intrus. J'avais alors préféré me sacrifier moi-même, mais impossible. Peu l'importe la méthode, la mort ne venait pas me voir. Mon sang était comme infini, et mes plus grandes blessures finissaient par se soigner malgré la létalité. Ce fut à cet instant que je compris que ce n'était pas seulement mon amour pour Luzco qui était devenu immortel, mais mon corps aussi. Sans parler du fait que j'étais la seule de nous deux à être éternelle.


Je n'avais pas pu échapper à la servitude des conquistadors. Ce fut la période la plus humiliante, et la plus triste de ma longue vie. Moi qui avait un pouvoir autrefois immense, je me retrouvais à la place des serviteurs. Je me rendis compte de ce que c'était de perdre, et de payer pour ma défaite. J'eus honte d'être esclave, mais j'eus encore plus honte d'avoir causé à une époque la même chose.

Mais la plus grande douleur était la perte de Luzco, elle ne se terminait jamais et ne s'atténuait pas. Chaque réveil était comme si il était mort la veille. Je n'avais seulement appris qu'à arrêté d'en pleurer le matin.


Ayant marre de servir, je m'enfuis de ma terre natale par le biais d'un bateau de marchandise, direction la métropole. Une fois arrivée, je changeai de nom, et me fis passer pour une espagnole. J'y appris le mode de vie de l'endroit, et me débrouilla pour me fondre dans la masse. J'arrivai, avec le temps, à m'inclure comme si j'avais toujours vécu là. Cependant, j'avais encore une certaine haine envers ce pays, même si les habitants ne semblaient pas au courant de la vie atroce que vivait mon peuple. Je finis par quitter à jamais l'Espagne, sans pour autant franchir les frontières de l'Europe. Je voyageais sur le continent, discutais avec les locaux sans créer de lien fort avec eux, et apprenais comme je pouvais la culture de chaque pays. J'avais fait l'effort d'apprendre la langue de chacun d'entre eux. Cela me permettait en quelque sorte d'oublier ma peine, qui gardait toujours un gouffre dans mon être.


LykofosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant