Riccardo Gaviera est venu au monde pour être le bras armé de son frère. Il n'a jamais eu à faire de choix puisque toute sa vie a déjà été décidée pour lui. Mais de nature indomptable et irréfléchie, celui qu'on surnomme la pieuvre de l'ombre est le...
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– Quel est le secret pour être un bon auteur ? Je fais mine de réfléchir en tapotant mon crayon contre ma lèvre inférieure. En face de moi, confortablement installées sur des fauteuils en cuir, se tiennent quatre femmes tirées à quatre épingles, vêtues de tailleurs, visage maquillé de façon impeccable, cheveux coiffés à la perfection. Elles ont toutes le même sourire de façade à l’exception d’une seule qui pince les lèvres comme si elle avait avalé de l’acide. Elle, je vais la surnommer Lemon. Ça lui va bien : sa tenue est jaune comme l’agrume.
– Je dirais qu’il faut être une bonne menteuse. Vous savez, les manipulateurs les plus habiles vous diront que chaque mensonge doit avoir une part de vérité.
Lemon fait une moue, comme si elle n’était pas d’accord avec moi. Mais j’ai fini par comprendre que c’est sa mine naturelle. Et de toute façon qu’elle soit d’accord ou pas, je m’en moque.
– Vous voulez dire qu’il y a une part de vérité dans votre livre ?
– Oui, c’est aux lecteurs de chercher où s’arrête la fiction et où commence la réalité.
Une autre journaliste lève son bras pour attirer mon attention. Ce n’est pas nécessaire. Je les vois, je les vois beaucoup trop à mon goût.
– Personnellement, je trouve que votre personnage féminin n’est pas normal. Comment peut-elle tomber amoureuse d’un tueur sanguinaire, un psychotique qui ne distingue pas la réalité de la fiction créée par son subconscient ?
Je arque un sourcil. Mon visage est parfaitement égal, mais au fond de moi, c’est un véritable tsunami. Je prends une inspiration avant de répondre de manière faussement détachée.
– Que voulez-vous ? C’est la Dark Romance, il faut un protagoniste complètement détraqué, une protagoniste encore plus détraquée sinon elle appelle la police à la première rencontre et le livre est terminé. Mais entre nous, ni l’auteur de Dark Romance ni les lecteurs ne sont sains d’esprit.
Je termine ma tirade par un clin d’œil, les quatre journalistes se mettent à rire.
Je soupire silencieusement, j’essaye de me la jouer cool et détendue mais ces quatre femmes me rappellent l’époque où je regardais la fenêtre de mon studio étudiant avec l’envie de sauter. Tous ces regards braqués sur moi, ces questions, j’ai envie de creuser un trou et de disparaître.
– Mais Jade, je peux vous appeler ainsi ? J’aimerais savoir quand est prévue la sortie du tome 2 ? Cette fois, je ne fais aucun effort pour cacher ma grimace. Je ne sais absolument pas quoi répondre à ça, deux mois exactement que j’essaye de l’écrire mais je me retrouve constamment confrontée au cauchemar de tout auteur : la page blanche. J’ai un délai à respecter, j’ai déjà signé le contrat pour le deuxième tome et je n’ai pas pondu un seul mot. Enfin si, "Prologue". Ça compte ? Non ? Ok !