Avant son déclin, Avela était un village isolé et paisible, niché au cœur de collines et de forêts, offrant de magnifiques paysages. Un fleuve traversait la petite ville, ce qui permettait aux voyageurs de découvrir Avela. En effet, lorsque ces derniers s'égaraient, ils suivaient le cours d'eau. C'était une simple bourgade où, à première vue, tout le monde se connaissait. Les habitants y trouvaient tout ce dont ils avaient besoin : l'église et le cimetière, le cabinet du Dr Corylus, la boulangerie, la taverne Quercus, la forge, quelques modestes fermes, et même une bibliothèque. Un grand puits, au centre de la place principale, assurait l'approvisionnement en eau pour toute l'agglomération. Les rues étaient parsemées de pavés, il n'y avait pas de trottoirs et les maisons semblaient parfois pencher sur le côté. L'une d'elles hébergeait la famille Castana.
Bien avant de se marier avec le renommé Victor et d'emménager à la capitale, Béatrice Castana enseignait la lecture aux enfants du village. Elle s'installait sur la grande place, entourée de cinq ou six élèves. Elle leur apprenait à lire tant bien que mal durant son temps libre sans rien demander en échange. Lukas Coudrier faisait partie de ces enfants et adorait ces cours. Malheureusement, Victor Sativa passa par Avela lors de son périple et rencontra Béatrice. Elle proposa de moins en moins de réunions jusqu'à ne plus être disponible. Elle épousa le voyageur, fit ses bagages et l'accompagna sur la route. Lukas fut surtout déçu pour sa petite sœur Elona. Au départ de la jeune épouse, elle était justement en âge de pouvoir assister à ces enseignements. Il décida alors de l'initier lui-même à l'apprentissage de la lecture. Il avait choisi de lui donner les cours à la grande clairière, un lieu parfait pour cela, au sommet d'une colline entourée de la forêt d'Yces. Le terrain, tranquille, était éclairé par le soleil toute la journée.
Un mercredi, Elona et Lukas prirent le chemin habituel afin de s'y rendre. Arrivés sur place, ils étaient tous deux essoufflés, les joues rosies par l'effort. Ils s'adossèrent à leur arbre favori, sous les rayons du soleil. Lukas sortit du sac le livre et, alors qu'il s'apprêtait à jouer son rôle de professeur, il s'aperçut que, pour la première fois, sa petite sœur ne semblait pas enthousiaste.
- À quoi penses-tu, Elona ?
- À Maman. Elle est très malade ? demanda la fillette d'un ton inquiet.
- Eh bien, le Dr Corylus assure que ce n'est rien d'alarmant et qu'avec de bonnes plantes, elle guérira très vite.
Malgré les mots réconfortants de son frère, Elona ne paraissait pas consolée. Lukas leva la tête et admira le spectacle qu'offrait cette prairie. Une étendue d'herbes ornée de fleurs principalement jaunes, avec quelques touches de couleurs différentes par-ci par-là, diffusait une odeur délicate et agréable. Encerclés par la forêt, ils étaient comme coupés de la civilisation. Le ciel sans nuages laissait passer les rayons du soleil. L'atmosphère était calme et apaisante, la douce mélodie des oiseaux était en harmonie. Le jeune garçon se sentait connecté avec la nature. Une brise caressa ses cheveux blond cendré, ses paupières recouvrèrent ses yeux bleu-vert. Lorsqu'il les rouvrit, il demanda :
- Est-ce que Maman t'a déjà raconté le déroulement de ta naissance ?
- Ma naissance ?
La petite fille pencha la tête sur le côté et lança un regard interrogateur à son frère. Ce geste le fit sourire.
- Le jour où tu es venue au monde, expliqua-t-il.
- Non, je ne crois pas.
- Tu sais que Maman aime énormément cet endroit ? Dès qu'elle en a la possibilité, elle monte jusqu'ici. Même lorsqu'elle était enceinte de toi, elle venait régulièrement, malgré les recommandations du médecin pour qu'elle reste tranquille. Un jour, quand Papa rentra du travail, il s'inquiéta de ne pas trouver Maman à la maison. Il supposa qu'elle était au cabinet du Dr Corylus pour accoucher. Il se précipita pour la rejoindre, pourtant, une fois arrivé, il comprit qu'il s'était trompé. Ni l'infirmière ni le Dr Corylus n'avaient aperçu Maman de la journée. Ils se mirent alors à sa recherche. Papa eut soudain l'idée de venir ici en compagnie du docteur et ils ont découvert Maman adossée à ce chêne, toute transpirante. Le travail avait commencé, tu allais bientôt pointer le bout de ton nez.
Il bouscula gentiment sa petite sœur avant de reprendre son récit.
- Le médecin était resté avec maman, le temps que Papa aille chercher l'aide d'Annie, l'infirmière. Cela a duré quelques heures. Ensuite, Maman t'a donné le nom d'Elona en l'honneur du chêne. Elle a expliqué que cet arbre lui avait envoyé des ondes positives. Je ne sais pas si tu te souviens, mais la première fois que nous sommes venus, tu as été instinctivement t'installer près de ce chêne.
Elona admira le vieil arbre, et lui appliqua une caresse reconnaissante.
- Bien ! Commençons le cours ! Jeune fille, ouvrez votre livre ! s'exclama Lukas.Quand la leçon fut terminée, les enfants descendirent en ville afin d'effectuer quelques courses, à la demande de leur mère. Alors qu'ils venaient acheter le bon pain préparé par Hugon à la boulangerie, ils trouvèrent Jeanne, l'épouse, qui semblait mécontente et se plaignait auprès d'un client. Ce dernier ne comprenant qu'à moitié les propos de celle-ci, il posa un regard gêné vers Hugon, qui expliqua qu'une jeune femme était passée plus tôt et avait déclaré qu'elle et ses sœurs allaient s'installer à Avela.
- Une jeune femme ? Tu veux dire une sirène ! Elle t'a enchantée, tu étais comme hypnotisé par sa beauté ! l'interrompit Jeanne.
Le boulanger devint rouge écrevisse et semblait vouloir être n'importe où sauf auprès de sa femme. Jeanne aperçut enfin Elona et Lukas.
- Toi, jeune homme, j'espère que tu n'auras d'yeux que pour ta femme. Quant à toi, jeune fille, ne te laisse pas embobiner par les belles paroles des hommes !
La baguette payée, ils se rendirent chez l'apothicaire, puis à l'épicerie. La propriétaire de la boutique, Savannah, conversait avec une cliente. Lukas crut comprendre qu'elles faisaient également référence à une jeune femme qui voulait s'installer dans les parages. Elaïa, la fille de la gérante, se dirigea vers le frère et la sœur.
- Tiens, Lukas, la commande de ta mère.
Elle lui tendit un sac et Lukas lui donna l'argent.
- Apparemment, quatre femmes vont venir s'établir ici. Je ne sais pas pourquoi cela semble contrarier ma mère, expliqua la jeune fille.Avela était une petite ville, il n'y avait rien d'étonnant à voir les habitants jaser sur d'éventuels nouveaux occupants. Sarah avait fait le tour du bourg afin de se présenter et d'avertir qu'elle et ses sœurs, Anastasia, Diana et Lua, emménageraient très prochainement. La jeune femme était vraiment très belle et lumineuse, elle dégageait une aura bienveillante. Elle avait su charmer la plupart des résidents. Seules quelques rares personnes se méfiaient. Il est vrai que, lorsqu'une sorcière se manifeste et affirme qu'elle va aider le village à traverser les temps difficiles qui s'annoncent, cela peut entraîner certains soupçons. Finalement, on pouvait être assez surpris que la majorité des villageois fussent si réjouis par cette nouvelle, et qu'ils ne se posassent pas plus de questions sur ses dames mystérieuses qui ne se cachaient pas d'être des sorcières.
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Avela
ParanormalAvela est un village paisible dont la tranquillité est subitement interrompue par quatre sorcières. Elles prétendent être envoyées par la capitale afin d'aider le village à faire face aux énergies néfastes dont les rayonnements se propagent à traver...