— Tout va bien ?!
﹒⪩⪨﹒
Mes mains couraient sur les cordes, elles ne les touchaient qu'à peine. Et pourtant de ce frôlement sortait une douce mélodie qui m'enveloppait toute entière. Les notes se réverbéraient dans le silence, douces telle la caresse d'une plume sur ma peau. À mesure que mon touché s'accélérait, les notes se faisaient plus entêtantes, encore plus magiques qu'il y a un instant.
Je me laissai porter par le son que je produisais, mes doigts si léger qu'ils flottaient au-dessus des cordes. Le poids de l'instrument n'était qu'un détail sur mon épaule alors que je me mouvais à son rythme. Rien d'autre n'était aussi important de ma harpe dans ce moment précis. Les bruissements des feuilles n'étaient que détail et il m'était impossible d'entendre la moindre voix dans le couloir.
Dès que mes doigts entraient en contact avec une harpe, il n'était plus question de penser à autre chose qu'aux notes, qu'aux mélodies, qu'aux sons que je pouvais produire. Je n'étais plus, je ne pensais plus, je jouais.
Puis mon doigt pinça la mauvaise corde, brisant le charme. C'est comme si je rouvrais les yeux. J'étais seule, dans un recoin de la salle d'art, coincée entre un piano et une étagère de peinture. Cette salle était mon havre de paix, là où je me retirai à chaque pause que mon emploi du temps daignait me donner.
En début d'année, après moult négociations avec le club de musique, je m'étais dégoté un instrument ainsi qu'un endroit pour en jouer pendant la pause de midi, un minimum à l'abri de regard inquisiteur et de murmures. Maintenant, je passais le plus clair de mon temps à parfaire le moindre mouvement, la moindre touche sur la corde.
J'allais me remettre à jouer quand la porte de la salle, pourtant fermée, grinça un peu trop fort à mon goût. Elle ne s'ouvrit pas pour autant, me laissant raide sur mon tabouret, la harpe soudainement lourde sur mon bras. Pendant quelques secondes, je jaugeai la porte sans un bruit, prête à lâcher l'instrument si une personne entrait.
Pourtant le bruit resta sans suite, aussi je me permis de ramener mes bras le long des cordes, me préparant à recommencer le morceau. Je le connaissais par cœur, jusqu'à la moindre croche pourtant, aussi assidûment que je travaillais, il était rare que j'arrive à le jouer sans m'interrompre pour m'arracher les cheveux au passage.
Lorsque le plus grand des silences m'enveloppa encore, une grande respiration emplit mes poumons, les cordes s'alignèrent sous mes doigts et je recommençai depuis le début. Non loin, la partition me faisait face tel un filet de sécurité.
Les premières portées sonnèrent sans accroche, comme un rêve. En atteignant la quatrième, le rythme s'accéléra et je me lançai avant celui jusqu'à ce que le grincement retentisse encore. Cette fois, il eut une suite si rapide que je n'eus pas le temps de m'arrêter de jouer.
La porte grinça donc puis dans un claquement, la poignée céda, laissant entrer une personne dans la salle.
À vrai dire, il n'entra pas dans la salle mais s'y écroula en travers. J'eus à peine le temps de voir passer un éclair de cheveux noirs avant que son corps entier ne rencontre le sol dans un bruit sourd. Mes doigts quittèrent les cordes et je bondis de mon tabouret pour me précipiter aux côtés de l'intrus.
Il s'était écroulé la tête la première sur le sol, aussi je ne pouvais voir que son dos. Et surtout, je pouvais voir les immenses tâches vertes pâteuses qui recouvrait celui-ci. Dans un grognement il se redressa pour me faire face.
Ses yeux devaient être normalement étroits mais en ce moment, il était rivés au miens et écarquillés sous le coup de la surprise. Pour encore plus accentuer le choc, ses sourcils étaient levés si haut qu'ils disparaissaient presque sous la frange la plus droite que j'ai jamais vue. En réalité, sa coupe entière était étrange : une sorte de mélange entre une coupe au bol trop courte un peu dégradée avec un épi sur le haut de sa tête, le tout noir de jais.
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𝐒𝐓𝐑𝐈𝐍𝐆𝐒 𝐎𝐅 𝐀 𝐇𝐄𝐀𝐑𝐓 | 𝘵. 𝘨𝘰𝘴𝘩𝘪𝘬𝘪 𝘹 𝘳𝘦𝘢𝘥𝘦𝘳
Fanfiction♪・"ꜱᴛᴇᴘ ʙʏ ꜱᴛᴇᴘ, ɪ ʟɪᴋᴇ ᴡᴀʟᴋɪɴɢ ᴡɪᴛʜ ʏᴏᴜ. ɪ ʟɪᴋᴇ ᴛʜɪꜱ ꜱᴏɴɢ ᴛʜᴀᴛ ᴏɴʟʏ ᴡᴇ ᴋɴᴏᴡ" Au détour de ce qui avait pu être la plus banale de tes journées de solitude, il était tombé à tes pieds, littéralement. Aussi incongru que cela pouvait paraître, cet inco...