La fille du Sang de la Lune

17 ans plus tard

Liv se frayait un chemin dans les couloirs du lycée pour atteindre son casier. Elle était pressée, car elle avait encore une fois dû faire ses corvées avant de venir à pied jusqu'ici. Les gens chez qui elle logeait ne prenaient pas la peine de l'amener, même par mauvais temps. Ce matin, pourtant, ils avaient bien remarqué qu'elle avait peu de temps avant de rejoindre les cours, mais ils considéraient que ce n'était pas leur problème. Elle n'avait qu'à se dépêcher de ranger et de nettoyer la cuisine au lieu de traîner.

Liv atteint enfin son casier au bout de quelques minutes. La cohue d'élèves avait été dure à franchir. La première sonnerie retentit juste au moment où elle ouvrait son casier. Au moment où elle ôta sa main contenant les livres de philosophie pour le premier cours de la journée, quelqu'un le lui ferma d'un coup sec.

"Hey Panda ! Tu viens à la soirée samedi soir ?"

Elle avait gagné ce surnom au fait qu'elle eût toujours les yeux cernés. Entre les cours, la maison à s'occuper et les sorties imprévues, elle n'avait que peu de temps pour se reposer. Cela lui convenait malgré tout, être hors de la maison était son moment de liberté, même si pour cela, elle sortait en cachette.

"Salut Mathéo, elle se passe chez qui cette soirée ?"

Mathéo était un loup en devenir assez charmant. Grand, brun et des yeux bleus marins, il avait tout pour plaire et surtout, ils n'avaient pas peur des jumeaux même si c'étaient ses futurs Alphas. C'est pour cela qu'il osait s'approcher de Liv, la seule humaine des environs.

"Chez Elsa."

Liv fit la grimace. Cette fille était une peste. Liv ne la supportait pas, elles avaient eu quelques différences par le passé.

"Oui, je sais... Mais réfléchis-y ! Ça devrait être cool comme soirée."

La deuxième sonnerie retentit. Ils allaient vraiment être en retard en cours.

"Et merde." Fit Liv.

Tous les deux se dirigèrent vers leur salle de classe respective. Mathéo fit un signe de tête à Liv et elle rentra dans sa classe.

"Encore et toujours en retard, Mademoiselle Liv."

La professeure de philosophie avait effectivement l'habitude que la jeune fille arrive après la deuxième sonnerie. Elle la laissa se diriger vers le fond, sans en dire davantage. Elle savait chez qui elle vivait et connaissait son histoire dans les grandes lignes, mais cela ne l'empêchait pas de lui faire des remarques déplaisantes.

Le cours parut interminable. Liv aimait bien la philosophie, mais les trois heures d'affilée restaient tout de même longues. Ce qu'elle préférait, c'était le cours de littérature. Les livres lui permettaient d'échapper à sa vie quelques instants. Pendant le cours de philosophie, elle a pu réfléchir à la proposition de Mathéo. Il avait raison. C'était une occasion de plus pour sortir de cet enfer qu'était le lieu où elle vivait.

Mathéo était son seul véritable ami. Au lycée, les autres garçons l'ignoraient, comme si elle n'existait pas, mais leur comportement changeait lors des fêtes, si les jumeaux n'étaient pas présents bien évidemment. C'était marrant comment les loups obéissaient déjà aux futurs alphas. Ils ne devaient pas s'approcher de Liv, c'était une humaine après tout. Une humaine qui était la bonne à tout faire chez les parents des jumeaux. À cette pensée, Liv sentit une pointe de colère monter en elle. Elle essaya de se concentrer sur la professeure, mais de nouveau ses pensées divaguèrent.

Quant aux filles, certaines étaient totalement jalouses de Liv. Elle vivait sous le même toit que les futurs alphas ! Combien de filles rêvaient d'être à sa place ? *Ouais, enfin elles ne savent pas ce que je vis depuis toutes ces années...* La colère monta en elle, et elle essaya tant bien que mal de la contenir. *Inspire, expire, pense à autre chose Liv, sois plus forte que la colère*. Elle sentit en elle le calme revenir au moment où la sonnerie sonna la fin du cours. Elle prit ses affaires et sortit de classe.

Il était déjà l'heure de midi, Liv se dirigea donc machinalement vers le réfectoire. Une fois de plus, elle constata qu'elle était partie sans prendre son repas avec elle. Heureusement que ce matin même, elle avait eu le temps de manger un pancake qui avait survécu aux six loups ce matin. Mathéo l'attendait comme à son habitude à une table, vers le fond. Il avait d'autres amis, ce n'était pas le plus populaire des garçons, mais il avait quand même un nombre de camarades importants. Cependant, le midi, il mangeait avec Liv, ne voulant pas la laisser seule. C'était leur petit rituel depuis maintenant 11 ans.

Il sourit quand il vit Liv s'asseoir en face de lui. Il lui tendit un bout de son sandwich. Liv secoua la tête pour lui dire non.

"Mange ! Tu sais très bien que je vais te forcer, et tu n'aimerais pas ça..."

Liv rigola et attrapa le bout de sandwich que Mathéo lui tendait, tout en le remerciant. Heureusement qu'il était là. La vie serait vraiment insupportable en son absence.

Ils étaient devenus amis depuis la première année d'école de Liv. Ils avaient 6 ans. Les jumeaux étaient en train de l'embêter dans la cour de récréation. Un des deux l'avait bousculée, faisant tomber les affaires d'école de Liv. L'autre lui avait piqué son goûter, le seul repas de Liv de la journée. Mathéo avait assisté à la scène. Il n'aimait pas qu'on s'en prenne à plus petit que soit et de plus, une fille. Il avait déjà horreur de l'injustice. C'était donc naturellement qu'il était venu à son secours. Cependant, un des jumeaux avait répliqué et Mathéo s'était retrouvé avec le nez cassé. Liv s'en voulait énormément, mais ils étaient devenus inséparables depuis ce jour-là. Mathéo s'était retrouvé plus d'une fois avec le nez cassé. Malgré cela, il était toujours resté auprès de Liv, prenant sa défense. Les années passées, les jumeaux faisaient semblant de l'ignorer à présent. Ils avaient compris que rien ne pouvait dissuader Mathéo de lâcher Liv. Cela ne les empêchait pas de lui sortir des répliques cinglantes, mais cela n'atteignait pas Mathéo.

"Alors, tu as réfléchi ? Dis-moi que tu viens !"

Liv finit de mâcher ce qu'elle avait dans la bouche. Elle regarda d'un air mutin Mathéo.

"Oui, c'est bon, je viens !"