Chapitre 2

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Comme j'avais traîné aux toilettes, j'étais arrivé presque en dernier et les places du fond étaient, bien sûr, toutes prises.

Je m'assis à une place libre près de la fenêtre, à côté d'une nouvelle que je ne regardai pas.

- Salut. J'aime bien ton style.

Elle me souriait doucement. Je me tournai vers elle.

Elle avait un visage rond, très doux, une peau mate et des traits asiatiques. Son visage était encadré par deux mèches rayées horizontalement de blond, seule touche de couleur sur sa chevelure noir corbeau. Je me détendis un peu.

- Euh, salut. Je m'appelle Alexandre. J'aime bien tes coontails.
- Moi aussi, rit-elle. Merci.

J'eus brusquement honte de n'avoir fait aucun effort vestimentaire. Elle s'était visiblement mise sur son trente-et-un, avec ses bottes à plateforme ridiculement hautes, sa jupe de dentelle et son bustier à carreaux violets. Je m'étais contenté d'un jean noir et d'un vieux t-shirt Black Veil Brides usé à l'os.

Nous bavardâmes un peu, et j'appris qu'elle avait déménagé de Lille avec ses parents, et qu'elle ne connaissait pas du tout la ville.

Le prof entra mollement dans la salle. Il claqua ses livres sur la table pour réclamer le silence -j'allais vraiment le détester, lui.

Il se présenta rapidement, nous servit un discours tout fait sur les enjeux du lycée, et commença à faire l'appel.

J'appris donc que ma voisine ne s'était pas jeté de fleurs vis-à-vis de ses cheveux, mais avait en fait réagi à mon prénom, puisqu'elle s'appelait Alexandra. La coïncidence me fit sourire.

- T'es du coin, toi ? me chuchota-t-elle soudain, visiblement lassée de faire semblant d'écouter le prof.

- Ouais. J'habite à quinze minutes en bus.

- C'est grand, comme ville ?

- Bof. Mais le train est pas cher jusqu'à Lyon. 

Elle ricana.

- C'est pas à, genre, deux heures d'ici ?

- Un truc comme ça, si.

Un silence s'installa. Le prof, monsieur Fernand, continuait son babillage monocorde, visiblement pas chamboulé par les bavardages qui recouvraient presque sa voix.

- J'ai hâte qu'il soit midi, pensais-je tout haut.

- On finit à midi ?

- Ben ouais. On a pas encore notre emploi du temps, c'est la pré-rentrée là.

- Désolée, c'est que mon premier jour sur Terre.


La pendule était très visiblement réticente à l'idée d'avancer, et la pause de dix heures fut accueillie par un soupir de soulagement collectif.

A dix heures deux, je proposais à Alexandra de faire un tour en ville, l'après-midi.

A dix heures cinq, la pluie commença à tomber.

- Bon bah ce sera un autre jour, alors, sourit-elle. Sauf s'il fait meilleur à midi. Mais j'ai bof envie de visiter si tout est mouillé. Je déteste le pétrichor.

Je la dévisageai.

- L'odeur de la pluie sur le sol, m'expliqua-t-elle. J'ai fait un effort, j'ai révisé votre langue avant de me poser sur cette planète.

- Tu sais parler le Martien ? ricanai-je.

- Je le saurai, si je venais de Mars, répondit-elle en levant les yeux au ciel.

Le reste de la matinée passa plus vite, probablement parce que j'étais plus enjoué. Alexandra était vraiment sympa. 

J'avais presque hâte de revenir au lycée demain.


Open eyes don't help to seeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant