Destructive Passion

Chapitre 1

Point de vue de Mia

-Et du coup, tu as validé ton premier semestre à combien de moyenne ?

En entendant la question de ma sœur aînée Eva, je m'arrête immédiatement de faire la vaisselle.
Et si je ne l'ai pas validé, qu'est-ce que je suis censée répondre ? De la manière la plus naturelle possible, je continue de laver mon assiette tout en essayant de trouver une réponse qui ne me foutrait pas trop dans de beaux draps.

-Eh bien...je n'ai pas encore eu les résultats, ils prennent vraiment leur temps, feignis-je.

En réalité, cela fait déjà quelques jours que j'ai mes résultats et je ne suis pas vraiment surprise de ne pas avoir eu la moyenne. Mes quatre premiers mois à la fac ont surtout été consacrés à la découverte de la vie étudiante. Concernant le nombre d'heures que j'ai passées en cours magistraux, mieux vaut ne même pas en parler. Ma sœur aînée marqua une pause, ce qui n'annonçait rien de bon, avant de reprendre :

-Oh, d'accord. Pourtant, j'étais persuadée que vous aviez eu les résultats il y a deux jours.

Sa réponse ne fit que me refroidir davantage, me convainquant que je ne pourrais plus échapper à cette conversation. Qu'est-ce que tu croyais, Mia ? Ta sœur est en contact avec toute la faculté, bien sûr qu'elle sait quand les résultats des premières années sont publiés.
Je finis par me tourner vers elle, pour lui faire face. Je pris une grande inspiration avant de lui dire ce que j'avais sur le cœur.

-Bon, il est vrai que... que j'ai pu voir rapidement les résultats de mon semestre, mais il faut que tu saches...

-Mia, arrête de tourner autour du pot, ça ne te servira à rien avec moi, me coupa-t-elle.

Je me mordis la lèvre, me préparant au pire. Bon, foutu pour foutu...

-En réalité, je n'ai pas validé mon semestre, mais c'était vraiment à un cheveu, je t'assure ! C'est surtout les maths qui m'ont plombé, j'étais presque autour de la moyenne pour tout le reste, mais un deux tout pourri en mathématiques, ça a tout flingué. Et tu sais avec l'introduction aux soirées et tout et bah...bah j'ai pas su gérer mon temps, finis-je par admettre avant d'à nouveau prendre une grande inspiration.

Ça y est, c'est dit.
Malgré que j'ai sûrement fait le plus dur, je sais que ce qui va être suivre ne va pas être agréable. Ma sœur a l'air partagée, peut-être que le coup des soirées n'est pas bien passé. L'année dernière, elle se trouvait dans la même situation que moi, plongée dans ce nouveau monde où l'envie de faire la fête est beaucoup plus forte que celle de bosser. Pourtant, elle a validé son premier semestre avec brio. Voilà ce qui fait qu'elle et moi sommes si différentes.

-Mia je ne suis pas là pour te réprimander ou jouer la police, tu sais que tu peux tout me dire, mais bon sang, tu as pensé à la réaction de maman et papa ? Ils vont être tellement...déçus.

Et voilà, le coup est tombé. Je suis presque surprise qu'elle n'ait même pas cherché à me sermonner. Pas une seule seconde. Elle a préféré aller droit au but, parler de ce que nos parents pourraient penser, comme si elle savait que cela était la seule chose qui pourrait vraiment me toucher.
Ça fait limite plus mal que si elle avait essayé de m'engueuler, comme si elle considérait que mon cas était déjà désespéré et qu'une bonne leçon de morale ne pourrait rien y changer.

Je reste figée, la tête baissée, comme une enfant prise en faute. Je n'ai rien à lui répondre, parce que oui, j'ai déjà anticipé la réaction de mes parents en apprenant la nouvelle. Je les vois déjà, leurs visages marqués par la déception, réalisant que la cadette est loin de suivre l'exemple de sa sœur aînée, même si ils devaient très probablement s'y attendre...

Ma sœur, qui a un an de plus que moi, s'est lancée dans des études d'économie par passion. L'année dernière, elle s'est brillamment démarquée en se classant parmi les dix premiers de sa promotion. Quant à moi, j'ai simplement suivi son exemple, sans vraiment savoir ce que je voulais pour mon avenir. Et maintenant, avec tout juste un neuf de moyenne, je m'apprête à devenir la honte de la famille.

Voyant probablement mon air abattu, Eva s'approche doucement et m'enlace, comme pour essayer de me réconforter.

-Eh...ne tire pas cette tête. Tu n'es pas seule, Mia. Je vais t'aider à remonter la pente, dit-elle en essayant sûrement de me rassurer.

Et malgré ses paroles réconfortantes, je me sens toujours aussi bête. Je me suis toujours sentie incapable de me débrouiller seule, contrairement à elle. Eva est tout l'opposé de moi, l'enfant parfait dont mes parents ont toujours rêvé. Dès son plus jeune âge, elle excellait déjà à l'école, était la fille gentille et souriante avec qui tout le monde voulait se lier d'amitié.

Depuis son entrée à la fac, elle jongle parfaitement entre vie sociale et études. Membre active du bureau des étudiants, elle connaît un grand nombre d'étudiants et arrive même à sympathiser avec les profs. En bref, c'est le genre de personne qu'il est impossible de détester.

Moi, je n'ai jamais été une mauvaise élève, du moins jusqu'à l'université, mais j'étais moins studieuse. Je n'ai jamais été turbulente, mais j'étais moins sage. Moins apte à faire amis-amis avec tout le monde.

C'est comme si j'étais la version ratée de ma sœur.

Malgré tout, je sais que mes parents m'aiment, je ne suis pas à plaindre sur ce point. Mais je suis aussi consciente qu'ils n'attendent pas grand chose de moi. Ils espéraient peut-être simplement que je leur annonce que j'avais validé mon semestre à tout juste dix, ça leur aurait sans doute suffi. Tant qu'Eva est là pour relever le niveau, je peux approximativement faire ce que je veux de ma vie.

Certains pourraient se demander : à quoi bon se plaindre, si je peux presque tout me permettre sans que mes parents aient de grandes attentes ? Je me suis déjà posée cette question, mais malheureusement, je suis quelqu'un qui a besoin d'attention, de reconnaissance. C'est ce qui me donne la confiance en moi pour avancer. Et quand je ne trouve pas cette validation auprès de mon entourage proche, je vais la chercher ailleurs.