Texte pour le concours 3 de @Etoile511 :

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Je m'appelle Symé, je suis une petite fille de 6 ans et demi, et mon arrière-grand-père vient de m'annoncer que ce soir, c'était soirée "Je me souviens" !

La soirée "rigolade", la soirée"étoiles filantes", la soirée "fin des vacances"...

Je vous explique le principe : on s'allonge sur des couvertures dans le champ en bas de la maison de Grand-Pé et on regarde les étoiles pendant environ une demi-heure.

Quand j'étais plus petite, je ne voulais pas le faire, alors il a trouvé une contrepartie : pour chaque étoile filante que je vois, il me raconte une anecdote de sa vie...

                              ***

Il est 20h30, je m'efforce de descendre jusqu'au champ sans marcher sur la couverture qui traine à mes pieds. L'herbe est trempée, heureusement qu'on a pris des couettes, cette fois-ci...

Grand Pé s'installe à côté de moi et me murmure :
- "Alors, Symé, prête à te transformer en chasseuse d'étoiles ?"

- "Ouiiiii !" hurlait-je, en me redressant, le poing brandi vers le ciel.

Des oiseaux s'envolent de leur perchoir, un sapin un peu tordu.

- "Chut... C'est leur maison, ici, laisse-les se reposer, ma petite chasseresse." me calme Grand Pé en me tapotant la tête.

Je me rallonge et laisse le vent caresser mon visage. Une fourmi grimpe sur ma main : je la regarde se balader sur mes doigts, puis je la dépose doucement sur les brins d'herbe. Une chouette hulule au loin, j'essaie de l'imiter doucement. Elle me répond. Je ris, partagée entre la sérénité du moment et l'allégresse de faire partie de ce monde merveilleux.

Je laisse mes yeux dériver vers le ciel nocturne illuminé de toute part. Et je vois un trait blanc filer à toute allure dans la Voix Lactée.

Je lance à Grand Pé, toute excitée :
- "Et de une !"

                              ***

Après une demi-heure restés à regarder les étoiles, Grand Pé me demande :
- "Tu as vu deux étoiles filantes, Symé, c'est bien ça ?"

- "Mais Grand Pé ! J'en ai vu une troisième il y a une minute !"

- "... Symé... Tu sais, je suis très âgé... Et tu sais ce qui arrive aux personnes très âgées ? Elles partent au ciel, pour surveiller les gens qu'elles aiment de là-haut... Elles deviennent des étoiles filantes... Ça va m'arriver et ça t'arrivera aussi..."

- "À moi aussi, Grand Pé ? Je vais devenir une étoile filante ?" lui demandais-je, un peu interloquée.

Il me répond d'une voix douce qui me rassure :
- "Oui, à toi aussi, et à tous les êtres humains... Devenir une étoile filante, ça s'appelle "mourir"... Mais, moi, ça va m'arriver bientôt, alors que toi, tu as encore toute la vie à vivre, Symé... Cette vie que la mort rend si précieuse..."

- "... D'accord." soufflais-je après avoir pris le temps de réfléchir un peu.
"Et maintenant : les anecdotes ! Trois, Grand Pé !" réclamais-je d'un ton enjouée.

Grand Pé acquiesce en souriant :
- "Tu as raison, Symé. Comme d'habitude."

"La première, hum...
Je me suis marié avec deux femmes : deux catastrophes... Ma première femme est partie, tandis que la deuxième est restée...
Ma première femme, Flore, était très belle ! Je l'avais rencontrée à l'université et, même si nos études nous avaient séparés, nous nous sommes retrouvés notre diplôme en poche.
Nous nous aimions, alors nous nous sommes mariés... Grave erreur : quelques jours plus tard, elle est tombée par hasard sur un camarade avec qui elle avait été en couple à l'université... Elle m'a trompé pendant 2 ans sans que je ne me rende compte de rien...
Un jour, elle a débarqué en le tenant par la main et m'a annoncé qu'elle allait divorcer."

- "Oh ! C'est pas gentil !" grognais-je en fronçant les sourcils.

- "Non, Symé, c'est la vie, on aime, on n'aime plus, on a des problèmes, des joies. La vie est un arc-en-ciel, Symé, il faut de la pluie et du soleil pour en voir les couleurs...

Bon, je reprends : Après le divorce, j'étais perdu... C'est à ce moment-là que j'ai rencontré ta Grand Mé...
En ce moment, c'est une étoile filante et je la rejoindrais bientôt...

Ta Grand Mé était serveuse dans un bar sur la plage. Quand je l'ai rencontrée, elle n'était pas très jolie, mais ce qui m'a attiré, c'est son esprit : elle était philosophe... Mais avec le temps, elle est devenue acre, grognonne et méchante ! Mais ta Grand Mé n'est pas partie comme ma première femme : elle est -malheureusement pour moi- restée jusqu'à sa mort..."

- "Une autre, Grand Pé !" réclamais-je d'une voix enjouée.

- "D'accord, une de quand j'étais petit !
C'était un jour d'été, et tu sais bien qu'en été, en dessert, on mange... ?"

- "Des glaces ! Miam !"

- "Oui ! Ce jour-là, donc, mon père était allé chercher les glaces... Il faut savoir que notre congélateur -situé au dessus de notre réfrigérateur- était... Un peu spécial.
Il y avait de l'eau qui coulait le long des bacs. Avec la température glaciale qui régnait là-dedans, l'eau gelait et il était donc très compliqué de sortir le bac à glaces...
Mais, rendus affamés par la chaleur, nous y arrivions toujours sans trop de catastrophes... Jusqu'à ce jour.

Mon père, arrivé devant le congélateur, souffla sur ses mains et roula des épaules comme un athlète en échauffement. Il ouvrit d'un coup sec la porte du congélateur, puis agrippa le bac à glaces. Il y avait plus d'eau gelée que d'habitude, peut-être est-ce ce qui a changé la donne ? Toujours est-il qu'il tira. Sans résultat. Interloqué, il continua à faire pression sur le bac.
Tout à coup, alors qu'il tirait toujours, le frigo vacilla et mon père, qui, dans sa hâte d'ENFIN goûter ces délicieuses glaces, ne l'avait pas remarqué, tira de plus belle. Et c'est ainsi que le frigo lui tomba dessus...

Ce jour est un très bon souvenir pour moi, car j'avais beaucoup ri et que mon père n'avait rien de cassé. Tu comprends, Symé, il est tout à fait possible d'être heureux, même quand une catastrophe vient de se produire !"

- "Oui, tu as raison, Grand Pé !" acquiescais-je.
"Et la dernière anecdote, qu'est-ce que c'est ?"

- "Ah, laisse-moi réfléchir... Ça t'irait que je te parle de mon école ?"

- "Oh oui !" répondis-je, enjouée.

"C'était en automne, la maîtresse venait de nous donner un devoir pour le lendemain : nous devions donc le faire le soir. Mais j'avais prévu d'aller au skatepark avec mes amis. Donc, je me suis dit que je pourrais le faire après.

Mais quand je suis rentré à la maison, j'ai surpris mon père et ma mère en train de se disputer. Très fort. Je suis allé discrètement dans ma chambre et j'ai pleuré en entendant les bruits de vaisselles cassées et les cris de mes parents. Bien entendu, le devoir m'était sorti de la tête, car j'étais sûr que mes parents allaient divorcer...

Le lendemain, je racontais toute l'histoire à mes amis avant de rentrer en classe. Aussitôt assis, la maîtresse nous a demandé de sortir nos devoirs pour faire la correction ensemble. Déclic.
Je n'avais pas fait mon devoir. La maîtresse commence à ramasser les copies. Plus le temps de copier sur un ami. Ses talons claquent sur le sol. Elle arrive à mon bureau et me demande :
- "Eh bien, Arthur ? Sors ton devoir !"

En panique, j'ai marmonné une excuse bidon qui m'est passé par la tête :
- "Ma musaraigne a mangé mon devoir !"

Les rires se déchaînent et la maîtresse me fixe d'un regard glacial
J'ai été puni, bien sûr, mais j'étais content car j'ai découvert le soir même que mes parents n'allaient pas divorcer !"

- "Oh, alors, ça va ! Mais tu n'étais vraiment pas triste d'être puni ?" insistais-je.

- "Non, vraiment pas. Tu sais, Symé, on se souvient plus des moments tristes et négatifs, alors, il faut profiter de tous les moments joyeux de ta vie !"

- "D'accord, Grand Pé, je profiterai des moments joyeux... Comme maintenant !"

Voili voilou, j'espère que ma pitite histoire t'as plu, Etoile511 !

°~ Souris. Tu te sentiras mieux. ~°

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