Chapitre 54

215 43 14
                                    

Inspectrice Evans

6 janvier

        Je suis debout au chevet de Charlotte Green, plongée dans le coma à la suite d'un AVC qui s'est produit il y a deux jours. Charlotte est comme une ombre, une silhouette à peine tangible dans cette chambre de réanimation. Le lit est entouré de divers appareils médicaux : un respirateur artificiel, des moniteurs cardiaques et un perfuseur. Les tubes et les câbles serpentent autour du lit. Mon regard se pose sur elle, cherchant désespérément un signe d'éveil. Son teint est blafard, presque cireux, un contraste frappant avec les souvenirs de sa vivacité d'antan comme le montre ses photos.

— La malchance semble être mon éternelle compagne dans cette enquête, chuchoté-je en fermant les yeux.

Charlotte est l'une de nos deux témoins encore en vie. Chaque seconde, j'espère qu'elle va ouvrir les yeux, que sa voix faible mais déterminée va m'apporter les réponses dont j'ai besoin. Les médecins sont pessimistes. Leurs expressions sont empreintes de compassion et de résignation chaque fois que je demande des nouvelles concernant une amélioration de son état.

— Luttez, Charlotte. Luttez pour vivre, murmuré-je en serrant sa main froide. J'ai besoin de vous pour résoudre cette enquête.

Je quitte la chambre, dépitée, quand mon téléphone vibre dans ma poche. C'est Andy, mon collègue.

— Salut, Kiara, commence-t-il de sa voix grave. Les suspects dans notre affaire ne veulent plus parler. Nos investigations nous ont permis d'apprendre qu'ils se côtoient au quotidien. Merci aux historiques d'ordinateurs et aux caméras de surveillance d'un bar du comté.

— Bon début.

— Les recherches sur la personne qui a engagé Maître Walsh, l'avocat de Derek et des trois autres gars, ne mènent nulle part. On est dans une impasse. Ah si, nos gars du service informatique ont réussi à trouver un groupe sur le darknet qui se fait appeler la Meute des Alphas. Il se pourrait bien que nos très chers détenus soient membres de cette espèce de confrérie dans lequel le manifeste de Derek est considéré comme une sorte de texte sacré.

Je pince l'arête de mon nez, essayant de contenir ma frustration.

— Continuez de creuser. Nous avons besoin de concret. De faits. De preuves accablantes.

— Cette meute compte plus d'une centaine de membres dans le monde. Nous allons faire notre possible pour découvrir l'identité de ceux qui se trouvent en Irlande et cibler Cork. Malheureusement, ça ne se fera pas en un claquement de doigts. Ça pourrait prendre des semaines voire des mois.

— Commençons par établir un lien direct entre nos détenus et cette Meute des Alphas. Nous devons effectuer des perquisitions.

— Tu sais bien que le juge nous l'a formellement interdit tant que nous n'avons pas de preuves solides.

— Le juge Wyatt qui est aussi un ami d'Eric Sullivan, magnat de l'immobilier, et père de Niall Sullivan, l'un de nos suspects. Le conflit d'intérêts ne saute aux yeux de personne ? pesté-je.

— Aucun juge de district ou de paix n'acceptera de se frotter aux Sullivan sans que nous n'apportions de...

— ... De preuves qui se trouvent certainement chez les suspects ! Et ils le savent tous. Notre enquête est délibérément entravée. Refais une demande auprès du juge Wyatt. S'il la refuse, il se pourrait qu'une info concernant ses accointances avec les prostituées fuite, lancé-je mauvaise.

— Kiara, ricane Andy.

— Walsh n'est pas l'avocat de nos détenus par hasard. Il y a une connexion quelque part, il suffit de la trouver.

Savage loveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant