Prologue

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L’inspecteur Graam avait à peine franchi la porte du commissariat qu’une femme se jeta presque sur lui.

— Vous devez être l’inspecteur Graam, dit-elle, essoufflée. Je suis Suzanne Gorsty, la mère de Michael. Il n’a rien fait, je vous le jure. Michael est incapable de faire du mal à une mouche… Alors, commettre un meurtre… C’est impossible !

Toujours les mêmes discours, pensa l’inspecteur avec lassitude.

— Personne n’a dit que votre fils avait commis un crime, répondit-il calmement. Laissez-nous d’abord l’interroger, et nous verrons ensuite.

Sans lui laisser le temps d’ajouter quoi que ce soit, il s’éloigna. Il n’avait ni l’énergie ni l’envie de perdre du temps avec les déclarations passionnées d’une mère convaincue de l’innocence de son enfant. Ce qui l’intéressait, pour l’instant, c’était le principal suspect : un adolescent de 17 ans, en attente dans la salle d’interrogatoire.

La pièce était vide, à l’exception d’une table métallique et de deux chaises disposées face à face.

On ne lui avait pas menti : Michael Gorsty faisait peine à voir. Il semblait complètement anéanti, vidé, comme s’il avait perdu toute raison de vivre. Son regard était absent, perdu au loin. Il avait du sang sur ses vêtements et ses mains. Devant ce spectacle, difficile de ne pas éprouver un pincement au cœur. Mais l’inspecteur Graam n’était pas là pour compatir.

Il s’assit en face du garçon, sortit un dossier de son étui et l’ouvrit calmement.

— Bien, dit-il sans détour. Je suis l’inspecteur Graam de la police de San Diego. Je pense que nous savons tous les deux de quoi il est question ici.

Michael ne répondit pas. Il ne le regarda même pas. Son corps était là, mais tout en lui semblait figé, comme s’il n’avait même pas entendu.

— Bien sûr, tu as le droit de garder le silence. Mais, d’aussi loin que je me souvienne, ceux qui n’ont rien à se reprocher n’ont jamais eu besoin de se taire.

L’inspecteur marqua une pause, espérant une réaction. Aucune. Le garçon restait immobile, muet.

Il décida de poursuivre. Avec l’expérience, il savait que le chagrin, chez les adolescents, pouvait masquer bien des vérités.

— Regarde ceci…

Il lui tendit une photo.

— Tu la reconnais ?

Enfin, Michael bougea. Il prit la photo avec des mains tremblantes, la regarda longuement, puis répondit d’une voix cassée :

— C’est Jennifer Anistork… Jenny…

— Bien, fit l’inspecteur, satisfait de briser le silence. Et celle-ci ?

— Taylor Mooks, monsieur.

Graam hocha la tête.

— Ces deux personnes ont été retrouvées mortes dans les bois d’une propriété privée. Avec eux, il y avait une troisième personne… bien vivante : toi, Michael Gorsty.

Il laissa planer un silence.

— As-tu une explication à donner ?

— Une explication sur quoi, monsieur ?

— Eh bien, sur la mort de Mademoiselle Anistork et de Monsieur Mooks, sur ce qui s’est passé cette nuit-là. Et, si Dieu nous vient en aide, peut-être même sur l’identité de celui ou celle qui les a tués. Et surtout, la question la plus évidente : que faisiez-vous tous les trois dans une propriété privée, interdite d’accès, en pleine nuit ?

Un silence pesant s’installa. Long. Trop long. Puis, enfin, Michael releva la tête. Son regard croisa celui de l’inspecteur.

— Je sais tout, monsieur, dit-il d’une voix calme mais ferme. Absolument tout.

Tu es ma princesse : Un Amour hors de toute limiteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant