2 × PREMIER JOUR

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À l'aube, Aster se réveilla, épuisée. Les premières lueurs du jour perçaient à travers les rideaux de sa chambre, projetant une lumière douce sur ses traits tirés. Elle se leva avec difficulté, ses jambes encore tremblantes de cette nuit tourmentée. Souhaitant se rafraîchir, elle se dirigea vers la salle de bain attenante, évitant soigneusement son reflet dans le miroir. Aster retira ses vêtements de la veille, pièce par pièce, puis ouvrit le robinet de la baignoire sur une température tiède, presque froide. Les journées étaient encore chaudes malgré la fin de l'été et elle espérait que cette fraîcheur calmerait le feu qui brûlait en elle.

Alors qu'elle s'installa dans la baignoire, elle ne pensait pas à la scène troublante d'hier, mais plutôt à ces songes de la veille. Le garçon à la peau dorée s'était invité parmi eux. Continuant de la troubler. Le rouge monta à ses joues. Elle glissa ses jambes, les plaçant de part et d'autre du robinet, l'eau couvrant peu à peu son corps. Aster se laissa glisser, ses cheveux dans l'eau, son visage à moitié immergé, pliant les genoux, relevant légèrement ses hanches pour que le jet puissant du robinet frappe directement sa peau sensible. L'eau, qui se voulait apaisante, éveilla rapidement d'autres sensations. Ses yeux clos, elle ne pouvait s'empêcher de revoir ce regard sombre, celui de l'inconnu. L'image de ses yeux, si proches des siens, s'intensifia dans son esprit. La frontière entre le rêve et la réalité se dissipa, et Aster se perdit dans cette illusion.

Le souffle court, elle imaginait que l'eau qui percute son intimité était la langue de ce garçon, sa présence envahissant chaque recoin de son esprit. Chaque goutte d'eau qui glissait sur sa peau claire la faisait trembler, une vague de désir la submergeant, un désir qu'elle ne parvenait pas à contrôler. Ses mains glissaient sur sa peau, sur ses seins, imitant les caresses qu'elle rêvait recevoir. Sous ses paupières closes, elle voyait ses doigts s'enfoncer dans les cheveux de l'inconnu, l'encourageant à continuer, à la pousser plus loin vers un plaisir qu'elle n'avait jamais connu. Quand enfin elle atteignit un semblant d'orgasme, un gémissement étouffé s'échappa de ses lèvres immergées, un mélange d'étonnement et de soulagement. Aster ouvrit brusquement les yeux, coupant l'eau avant qu'elle ne déborde de la baignoire. Son souffle était irrégulier, son corps tremblant encore sous l'effet de ce qu'elle venait de vivre.

Elle s'accouda contre la paroi, reprenant peu à peu ses esprits, ses cheveux mouillés collant à sa peau. Des bulles flottant paresseusement autour d'elle, épousaient les courbes de son corps à peine visible sous l'eau translucide. Elle resta là, immobile, les pensées en désordre. Une part d'elle était horrifiée par ce qu'elle venait de faire, par la manière dont son esprit s'était laissé emporter par un simple fantasme. Mais une autre part... une part qu'elle ne pouvait nier, était fascinée. Elle soupira longuement, consciente que cette attraction soudaine pour un parfait inconnu n'avait rien de rationnel. Aster savait qu'elle devait oublier ce garçon. Ce qu'elle avait ressenti était excitant, troublant, mais elle savait que cela ne devait jamais dépasser les limites de son imagination. Elle, qui était encore pure, rêvait d'une romance empreinte de tendresse et de respect et elle refusait de se détourner de ce chemin, malgré les tentations qui semblaient déjà se dresser sur sa route.

Aster quitta la salle de bain avec une étrange combinaison d'appréhension et d'excitation. C'était le jour où les cours commençaient, le véritable début de sa vie universitaire. Elle avait pu récupérer son emploi du temps quelques jours plus tôt, et elle l'avait déjà mémorisé, anticipant ses premiers pas dans l'amphithéâtre.

Son premier cours était en début de matinée, de la linguistique, une matière qui l'attirait, elle adorait décrypter les mystères du langage. Pour cette occasion, elle choisit une petite robe blanche et bleue, fluide et légère, qui épousait délicatement sa silhouette. Ses cheveux blonds, naturellement ondulés, tombaient en cascade sur ses épaules, ajoutant une touche de douceur à son allure. Son sac en bandoulière sur l'épaule et un livre à la main, elle fit son chemin vers le bâtiment principal. Le campus était encore relativement calme, les premiers étudiants se dispersant dans les différentes salles. Aster entra parmi les premières, ses pas résonnant sur le sol de la grande salle.

S'installant à une place au centre, elle ouvrit machinalement son livre et se plongea dans : Le saut de l'ange de Lisa Gardner. Bien qu'elle rêve de romance, son genre littéraire préféré restait les thrillers, qui lui offraient cette montée d'adrénaline, ce frisson unique que seules les histoires sombres et tortueuses pouvaient lui procurer. Elle était si absorbée par sa lecture qu'elle n'entendit pas les quelques autres étudiants entrer. Ce fut un commentaire soudain qui la tira de son monde imaginaire.

─ Un thriller de bon matin ? Tu vas réussir à t'arrêter à l'arrivée du professeur ?

Surprise, Aster releva les yeux. Un garçon se tenait devant elle, un large sourire illuminant son visage. Il avait la peau claire, presque laiteuse, et une présence solaire qui contrastait vivement avec l'ambiance pesante de son roman.

─ Je ne voulais pas t'interrompre, mais j'avais envie de parler à quelqu'un et il n'y a pas grand monde. Ajouta-t-il avec un sourire qui se voulait complice.

Elle jeta rapidement un coup d'œil autour d'elle. À part une ou deux autres personnes dispersées dans la salle, ils étaient pratiquement seuls. Se redressant légèrement, elle referma son livre, un sourire timide aux lèvres.

─ Enchantée. Je m'appelle Aster. Répondit-elle, sa voix légèrement hésitante.

Aborder des inconnus n'était pas son fort, mais quand cela venait directement d'eux, c'était tout de suite plus simple. Il se présenta à son tour. Alvin était d'origine allemande, cela se devinait dans ses traits fins et symétriques, témoignant d'une beauté classique, intemporelle. Ses cheveux blonds étaient soigneusement coiffés, ajoutant à son apparence soignée et élégante. Il avait des yeux d'un vert limpide, rappelant à Aster, les vastes prairies de son village natal, ils lui offraient un regard calme, et rassurant, un peu comme une paisible clairière au cœur d'une forêt encore inexplorée. Il était déjà en deuxième année mais n'avait pas validé ce cours, ce qui lui offrait l'opportunité de rencontrer la jeune femme, et ce n'est pas pour lui déplaire.

La conversation s'engagea naturellement entre eux. Alvin avait une énergie contagieuse, sa jovialité mettait Aster à l'aise. Ils parlèrent de tout et de rien, de leurs études, de leurs livres préférés, jusqu'à l'arrivée du professeur. Alors que le cours commençait, ils se turent, mais la présence d'Alvin resta pour la plus jeune comme une brise légère qui rendait l'atmosphère plus agréable. La beauté du jeune homme n'est pas de celles qui brûlent de passion, contrairement à son inconnu de la veille, c'est plutôt de celles qui réchauffent doucement, qui rassurent par leur constance et leur simplicité. Il incarne une sorte de perfection discrète, un charme naturel et sans effort qui séduit par sa douceur et son authenticité.

Le cours se déroula sans encombre, ils prenaient des notes avec application. Puis, vers la fin, Alvin déplaça discrètement son cahier vers elle, y inscrivant une question qui fit sourire Aster : "Tu me donnes ton numéro?"

Elle sentit ses joues se réchauffer, très légèrement, mais finit par écrire son numéro juste en dessous de la question. C'était une rencontre légère, agréable, et Alvin, avec sa gentillesse désarmante, lui apportait une sensation de bien-être. Il semblait prévenant, et Aster se surprit à apprécier sa compagnie plus qu'elle ne l'aurait imaginé. Alors que le cours se terminait, ils sortirent ensemble de l'amphithéâtre. Les étudiants pour le cours suivant commençaient à affluer, remplissant la salle dans un brouhaha qui contrastait avec le calme de l'heure précédente. Alvin continuait à parler avec enthousiasme de la cafétéria du campus, où ils pourraient déjeuner ensemble. Aster, cependant, sentit soudain un regard peser sur elle. Distraitement, elle chercha la source de cette sensation. Puis, elle l'entendit :

─ Mais ce ne serait pas la petite voyeuse d'hier ?

Seule la fleur saitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant