Arcane

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def (eng) : compliqué, compris et connu per seulement quelques personnes

1364 mots
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Changer d'école, ce n'est facile pour personne.

Du moins c'est ce qu'on souhaiterait me faire croire.

Pour moi, ce changement d'école, aussi prévisible qu'il soit, fut comme un miracle. Une aubaine, un don du ciel.

Le soir-même où mon père avait appris que j'avais été renvoyé, il avait envoyé un message à toute la famille pour, je cite, « Renouer les liens avant ce changement radical ». Très peu subtile pour dire que ce n'était pas de la dinde qu'on allait servir ce soir mais bien ma dignité probablement.

Cependant assis là, au tour d'une table avec à ma droite une tante que je n'ai jamais vu. En face ma grand-mère qui ferait une crise cardiaque si elle savait la veritable raison de mon transfert. Et à ma gauche mon hypocrite de cousin qui pourrait me faire tuer si il lui révélait, je peinais à comprendre le but de cette réunion de famille.

Ils semblaient tous plus chamboulé que moi par le fait je change d'établissement. Il est vrai que quitter le prestigieux lycée privé de Séoul à mille euros l'année pour le seul lycée de banlieue qui voulait bien de ma personne, c'était difficile à avaler pour une famille de rupin comme la mienne. J'avais été étonné de voir l'air inquiet qu'avait affiché mes tantes et mes grands-parents, comme si il n'avait pas songé une seconde à ce que j'aurais pu faire pour être refusé dans tout les lycées de la ville, si ce n'est celui qui acceptait tout les cas sociaux. Je l'avais moins été lorsque j'avais vu à l'autre bout de la pièce le regard sombre de mon père. Son petit plan pour me faire passer pour le pire des petits fils au près de sa belle-mère avait grandement failli.

— On dirait que tu t'en sors cette fois..

Si par là mon cousin, Minhyuk, entendait que je n'avais pas attiré la fureur de ma grand-mère, il avait vu juste.

— Je ne pensais pas qu'intégrer le lycée le plus malfamé était une réussite.

Il venait de parler à voix haute, d'un ton limpide il avait fait cesser toute les discussion au tour de la table, fallait oser. Il prit d'une main son verre de champagne et le but d'une traite, son regard rivé sur son assiette entamée. Tout le monde s'était tourner vers lui, attendant très certainement la suite de ses pensées. Je n'en faisais pas partie, je n'avais pas besoin de le voir pour remarquer sa mâchoire se contracter, son torses se soulever plus vite que d'ordinaire et la jointure de ses doigts blanchirent sur l'accoudoir de sa chaise. Il n'était pas à l'aise, il n'avait pas su se contrôle face à la possible injustice qu'il aurait pu subir si ça avait été lui et non moi dans cette situation.

Il allait sûrement payé cette insolence, nous le savions tout les deux.

- Qu'a tu dis?

Il releva le regard vers sa mère, une des rares tantes que je connaissais bien. Difficile de ne pas la connaître, cette femme m'avait probablement plus éduqué que ma propre mère. Son fils, Minhyuk, tenta de répliquer. A quoi bon, c'était déjà fichu pour lui. D'un côté, je dois avouer que je me sentais coupable de jubiler de cette situation.

— J'ai dit, je ne pensais pas qu'intégrer le lycée le plus malfamé était une réussite.

Foutu pour foutu..

J'esquissa un sourire face à l'échange visuel plus que tendu qui venait de s'installer entre ma tante et Minhyuk. Ma tante pinça les lèvres, ses yeux lançant des éclairs à son fils. Le silence dans la pièce devenait presque étouffant. Mon père, assis en bout de table, entrelaça ses doigts et se racla la gorge, comme pour signifier qu'il était temps de reprendre le contrôle de la situation.

— Ce n'est pas une question de réussite, intervint-il d'une voix calme mais ferme. Il s'agit d'apprendre de ses erreurs, et de saisir une nouvelle opportunité pour prouver que tu peux faire mieux, ajouta-t-il en me jetant un coup d'œil perçant.

Je sentais qu'il attendait de moi un signe de repentir, une sorte de justification publique pour apaiser l'humiliation qu'il semblait ressentir à travers cette soirée ridicule. Mais je n'allais pas lui offrir ce plaisir. Pas cette fois. J'avais trop souvent plié sous ses attentes, sous ce poids constant de perfection familiale qu'on me demandait d'atteindre.

— Apprendre de mes erreurs, oui, dis-je en croisant le regard de mon cousin. Peut-être que ce lycée me conviendra mieux qu'on ne le pense. Après tout, on ne peut que monter quand on est au plus bas, non ? ajoutai-je, un brin provocateur.

Mon cousin étouffa un rire nerveux, mais aucun autre membre de la famille n'osa réagir. Je vis ma grand-mère poser délicatement sa fourchette, les sourcils froncés, mais elle ne dit rien. Elle semblait peser mes mots, peut-être aussi surprise que les autres par ma réplique, qui semblait refléter une nouvelle version de moi.

— Ce que j'entends, c'est que tu ne prends toujours rien au sérieux, répliqua mon père, l'air exaspéré. Et tu crois vraiment que c'est avec cette attitude que tu vas réussir dans ta nouvelle école ?

Son ton avait légèrement monté, comme une flèche décochée droit dans le mille. La tension grimpa à nouveau d'un cran, mais je ne me laissai pas abattre.

— Peut-être que réussir n'a pas la même signification pour nous deux, lâchai-je doucement. Peut-être que ce que tu appelles échec est en fait ma seule chance de liberté.

La phrase suspendue dans l'air fit l'effet d'une bombe. Ma tante serra les dents, tandis que ma grand-mère prit une longue inspiration. Mon père, lui, resta silencieux, l'expression figée.

— Tu devrais t'arrêter là cher cousin. Me sussura Minhyuk avec un sourire espiègle scotché au visage, comme si il ignorait que c'était a cause de lui que ce repas avait pris cette tournure.

Je le regardai, légèrement amusé par sa tentative de reprendre l'avantage. Mais Minhyuk ne comprenait pas. Il ne comprenait jamais. Ce n'était pas qu'une question de ce dîner de famille, ni même de ce lycée de banlieue que tout le monde semblait juger sans savoir. C'était une question de survie, la mienne.

— Pourquoi ? Tu as peur que je dise quelque chose qui pourrait te mettre dans l'embarras ? répliquai-je, en le fixant droit dans les yeux.

Son sourire se figea un instant, puis il haussa les épaules comme pour minimiser l'impact de mes paroles. Mais je savais que j'avais touché juste. Minhyuk était la parfaite image du petit-fils modèle, celui qui ne faisait jamais de vagues, toujours impeccable aux yeux de la famille. Il n'avait pas besoin de se battre pour être accepté, pas besoin de se défendre face à des attentes impossibles. Tout lui venait facilement.

— Il suffit ! lança brusquement ma grand-mère, sa voix autoritaire brisant l'échange tendu. Nous sommes une famille, et ce genre de conflit n'a pas sa place ici.

Je pouvais sentir toute la pièce retenir son souffle, attendant le prochain mouvement. Mon père détourna le regard, comme s'il avait finalement décidé que cette bataille n'en valait pas la peine. Mais je savais que ce n'était pas terminé. Pas vraiment. Ce dîner n'avait fait qu'effleurer la surface des vérités cachées, des frustrations que chacun d'entre nous portait en silence.

— Vous avez raison, grand-mère, dis-je calmement, mais avec une froideur dans la voix que je ne pouvais plus retenir. Ce genre de conflit n'a pas sa place ici. Pas ce soir, en tout cas.

Je me levai, poussant doucement ma chaise pour signaler que cette mascarade était finie pour moi. Tous les yeux étaient rivés sur moi alors que je me dirigeai vers la porte, mais personne n'osa me retenir. Je pouvais sentir les regards de Minhyuk et de mon père brûler dans mon dos, mais je refusai de me retourner.

Une fois à l'extérieur, je respirai enfin. L'air frais de la nuit m'apporta un sentiment de soulagement que je n'avais pas ressenti depuis longtemps. Je savais que ce changement d'école, aussi mal vu soit-il par ma famille, serait peut-être ma seule chance de recommencer.

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⏰ Dernière mise à jour : Sep 29 ⏰

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