Me tsira celle qui sauva le village d'Otala.

L'Ombre d'ÔMA

Alors qu'Ô'Wali se lançait dans une quête désespérée pour sauver son village et libérer Me Tsira de l'emprise de N'voulou, une nouvelle force obscure s'éveillait dans les profondeurs de la forêt. Cette force, connue sous le nom d'ÔMA, n'était ni un esprit ni une créature terrestre. Elle était l'incarnation de l'injustice et du désespoir accumulés au fil des siècles, une entité redoutable qui avait été enfermée par les anciens dans les entrailles de la terre.

ÔMA fut libéré par inadvertance lorsque N'voulou lança sa malédiction sur le village. En se manifestant, ÔMA fit ployer les arbres, assombrir le ciel, et troubla l'esprit des hommes. Il se nourrissait de la souffrance des villageois, grandissant en puissance à chaque cri de douleur, chaque larme versée.

Mais cela ne suffisait pas. ÔMA, avide de davantage de pouvoir, commença à hanter les nuits du village. Chaque soir, une fois la nuit tombée, une peur glaciale s’emparait des habitants, car ÔMA venait enlever un enfant. Les cris des parents déchirés résonnaient dans le village, mais aucune trace des enfants ne pouvait être trouvée. Ils disparaissaient sans laisser de trace, comme si la terre elle-même les avait avalés.

ÔMA, sentant la présence de Me Tsira et de N'voulou, comprit que pour régner sans partage sur le monde des vivants et des morts, il devait les neutraliser. Il entreprit d'approcher Ô'Wali, conscient que ce dernier était la clé pour briser le lien entre Me Tsira et N'voulou. ÔMA, à la fois manipulateur et séduisant, apparut dans les rêves d'Ô'Wali, se présentant sous la forme d'une ancienne divinité bienveillante. Il promit à Ô'Wali un moyen de libérer Me Tsira, mais à un prix lourd.

« Me suis-je sacrifié pour toi, Ô'Wali, pour rien ? » susurra ÔMA dans un rêve, prenant l’apparence d’un vieil ami d'Ô'Wali, disparu mystérieusement il y a des années. « Je t’offrirai la clé de ta délivrance, mais en échange, tu dois me donner ce que tu as de plus précieux. »

Ô'Wali, déchiré par la douleur et l’amour, hésitait à accepter l’offre. Pourtant, l’image de Me Tsira, captive dans les griffes de N'voulou, le hantait. ÔMA joua de cette faiblesse, l'attirant de plus en plus dans ses filets. Chaque nuit, Ô'Wali se réveillait en sueur, ses pensées embrouillées, incapable de distinguer le vrai du faux.

Pendant ce temps, Me Tsira, toujours sous l’emprise de N'voulou, ressentait l’ombre d’ÔMA croître dans l’obscurité. Bien qu’affaiblie, elle tenta d’envoyer un message à Ô'Wali à travers un rêve. Dans ce rêve, elle l’avertit des véritables intentions d'ÔMA, mais sa voix était lointaine, distordue par la puissance de l’antagoniste. Ô'Wali, encore sous l'influence d'ÔMA, peinait à saisir la gravité de la situation.

Les tensions augmentèrent au village. Les malédictions de N'voulou frappaient les habitants, tandis que l'ombre d'ÔMA étendait son emprise sur les esprits les plus faibles. Le vieux Nima, le guérisseur, fut le premier à ressentir cette nouvelle menace. Il convoqua un conseil secret avec les anciens du village pour discuter de l’arrivée d'ÔMA. Conscients du danger que représentait ce nouvel antagoniste, les anciens décidèrent d'une mesure radicale : ils invoqueraient le ndjobi, un rituel sacré utilisé pour apaiser ou neutraliser les esprits malveillants.

Le rituel du ndjobi fut préparé avec soin, les anciens suivant scrupuleusement les traditions transmises depuis des générations. Le soir venu, ils se réunirent autour du grand baobab sacré, entonnant des chants anciens et brûlant des herbes mystiques. Le village retenait son souffle, espérant que cette cérémonie parviendrait à calmer la colère d'ÔMA.

Mais ÔMA était plus puissant et rusé que prévu. Au lieu de s'apaiser, l'esprit détourna la force du ndjobi contre ceux qui l'avaient invoqué. Une par une, les familles des anciens commencèrent à tomber malades, frappées par des fièvres mystérieuses et des cauchemars insupportables. Certains perdirent même des proches, emportés par des forces invisibles. La peur s’empara du village, et les anciens, pris de remords et de désespoir, comprirent qu'ils avaient réveillé une puissance qu'ils ne pouvaient pas contrôler.

L'influence d'ÔMA ne s'arrêtait pas là. Les champs, autrefois verdoyants et prospères, se transformèrent en terres stériles sous son emprise. Les récoltes furent dévastées, les plantes moururent, et les animaux, terrorisés par la présence maléfique, fuirent les environs. Les villageois, privés de leurs ressources, se retrouvèrent à lutter contre la famine en plus des malédictions qui pesaient sur eux.

La nuit du grand orage, ÔMA décida de se dévoiler complètement à Ô'Wali. Sous un ciel zébré d'éclairs, il apparut au bord de la rivière sacrée, sa silhouette massive et tourmentée prenant forme parmi les ombres des arbres. « Ta seule chance de sauver Me Tsira est entre mes mains », déclara-t-il d'une voix grondante. « Mais une fois l'accord passé, il n'y aura pas de retour en arrière. »

Ô'Wali, acculé par le désespoir et hanté par l'amour qu'il portait encore à Me Tsira, se sentit sur le point de céder à la tentation. Mais une partie de lui, faible mais persistante, lui murmurait de résister. Le choix qu'il ferait déterminerait non seulement son propre destin, mais celui de tout le village.

Alors que la situation semblait désespérée, une nouvelle figure fit son apparition dans le village. Une femme, vêtue d'un simple pagne blanc avec des ornements rouges et du kaolin sur le corps, fit irruption au milieu des villageois terrifiés. Elle était une myèné, une femme des eaux, venue des profondeurs des rivières sacrées pour sauver le village. Sa présence imposante et son aura mystique imposèrent le silence. Elle annonça qu'elle apporterait le salut avec un rite ancien et puissant, le ndjembé, qui, contrairement au ndjobi, avait le pouvoir de sceller les esprits malveillants pour toujours.

Le destin du village reposait désormais entre les mains de cette mystérieuse myèné, alors qu'ÔMA, Ô'Wali, et Me Tsira se trouvaient à l'aube d'une confrontation qui déciderait du sort de tous.