Le Bloop

𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝐈𝐈

Encore secouée par son cauchemar, Pernelle mit un certain temps à émerger. La lumière du matin filtrait à travers les volets de sa chambre, projetant des motifs de barres dorées sur le parquet usé. La chambre était plongée dans une semi obscurité, reflet de son esprit, toujours tiraillé entre le souvenir de ceux qu'elle avait perdu et sa passion pour l'océan. Elle observa le plafond, perdue dans ses pensées.

Le village de Crestmer était pittoresque, niché entre les montagnes verdoyantes et les eaux turquoise de l'océan. Les petites maisons aux façades colorées s'étiraient le long de la côte, chacune d'elles semblant raconter une histoire ancienne. Les volets de bois, souvent décorés de fleurs sauvages, ajoutaient une touche de vie à ce cadre idyllique. Pernelle aimait parcourir les ruelles pavées, où les odeurs de sel et de fleurs marines se mêlaient dans un parfum enivrant.

En ce matin, le ciel était d'un bleu éclatant, et la mer scintillait sous le soleil, comme un miroir reflétant une infinie profondeur. Bien que le paysage fût d'une beauté à couper le souffle, Pernelle ne pouvait s'empêcher de ressentir un pincement au cœur, un rappel constant de la tragédie qui l'avait frappé. Son regard se posa sur l'horizon, là où le ciel rencontrait l'eau, et elle se remémora les jours passés en famille, sur ces plages dorées, insouciants et heureux.

Il était temps de se lever. La journée l'attendait, tout comme ses collègues, qui allaient la plonger dans le monde fascinant des abysses. Elle soupira, luttant contre le poids de la mélancolie qui l'enveloppait. Les océans, bien qu'anciens et mystérieux, ne lui faisaient pas que du bien. Ils étaient le théâtre de sa douleur, mais aussi de son amour pour la science. Elle était devenue océanographe il y a cinq ans non seulement pour comprendre ces vastes étendues d'eau, mais aussi pour donner un sens à la tragédie qui avait englouti sa famille.

Avec un effort, Pernelle s'extirpa de son lit. Elle se dirigea vers la salle de bain, chaque pas résonnant comme un rappel de la réalité. L'eau chaude de la douche la réconforta, tombant sur sa peau comme une caresse apaisante. Elle laissa les gouttes s'écouler, emportant avec elles une partie de sa tristesse, du poids de ses souvenirs. Elle se lava avec soin, prenant le temps de s'ancrer dans le présent, de se rappeler pourquoi elle aimait tant son métier. Les recherches sur la biodiversité marine, l'exploration des écosystèmes, les merveilles cachées sous la surface... Tout cela lui apportait une paix qu'elle n'avait pas connu depuis longtemps.

En sortant de la douche, elle s'habilla d'une blouse légère, adaptée à la chaleur du jour qui s'annonçait. Elle coiffa ses cheveux bruns en une queue de cheval pratique, et un dernier coup d'œil dans le miroir lui révéla des yeux d'un bleu profond, brillants d'une détermination nouvelle. Sa passion pour l'océan la réchauffait comme un bonbon sucré, et elle était prête à plonger dans son travail, à nouveau.

En quittant son appartement, l'air frais du matin la frappa, l'odeur salée de l'océan emplit ses poumons et lui rappela à quel point elle était chanceuse de travailler à proximité de ces vastes mers. Les rayons du soleil caressaient délicatement son visage, et elle ferma les yeux un instant, savourant cette sensation. Crestmer était une petite communauté soudée, où chacun connaissait le nom de l'autre, et les rires des enfants jouant sur la plage résonnaient au loin. Le village était un havre de paix, où le temps semblait s'écouler plus lentement. Les habitants étaient des pêcheurs, des artisans et des scientifiques, chacun contribuant à l'atmosphère chaleureuse et accueillante qui caractérisait l'endroit.

Pernelle poussa la porte du laboratoire d'océanographie avec une excitation mêlée de nervosité. L'odeur familière de l'eau salée et des algues marines l'accueillit comme une brise légère, éveillant en elle un sentiment de réconfort. Elle avait toujours trouvé refuge dans ce lieu, un sanctuaire où les découvertes scientifiques s'entremêlaient à sa passion pour l'océan. C'était un endroit où le bruit des vagues et le murmure des recherches se conjuraient pour donner vie à des merveilles insoupçonnées.