LABYRINTHUS FILIA
Tel qu'il est mentionné dans l'article dix du paragraphe un point deux de notre manuel théorique, dans nos déplacements sous couverture, il ne faut en aucun cas voyager encombré car si une fuite rapide était nécessaire, il valait mieux courir léger que laisser derrière nous trop d'indices pouvant nous être fatals. Ce paraphe me faisait sourire à chaque fois que je prenais l'avion pour mes voyages d'affaires comme on dit dans la compagnie. J'étais au Tibet depuis vingt-quatre heures et je n'ai pas eu le temps de flâner tel un touriste lambda, j'attendais sagement dans ma petite chambre d'hôtel au centre de Lhassa le coup de fil d'un de mes informateurs internationaux et ainsi, connaitre la marche à suivre pour ma nouvelle mission dans le pays des neiges. Après avoir lu pour la centième fois mon manuel de survie en milieu hostile et bu un verre d'alcool local offert par le barman réceptionniste, le téléphone sonnait le départ de ma mission. Je quittais ma chambre sous le regard curieux de deux femmes de ménage qui me souriaient poliment. Je sortais de l'hôtel miteux quand un chauffeur, cigarette collée aux bordures de ses lèvres, m'invitait en hurlant à monter dans son vieux camion. Prenant place sur la banquette malodorante et rêche, je me sentais observer, une sensation désagréable d'être épié, dénudé par un regard pesant et intense. Je sortais ma tête à l'extérieur de la fenêtre de ma portière et aperçu, flottant bizarrement au-dessus du véhicule, une petite brume sombre qui, de toutes évidences, nous suivait.
La route entre Ganden et Lhassa était d'une atrocité incomparable, c'était aussi et très certainement les amortisseurs fatigués du petit camion qui l'étaient tout autant. Le chauffeur débonnaire stoppa son vétuste véhicule et me déposait à l'entrée d'un Chorten, forme d'expression architecturale tibétaine du vecteur de l'esprit du Bouddha. Je devais marcher sur quelques kilomètres et grimper un chemin étroit afin d'aboutir au pied d'une gigantesque statue antique. Elle trônait au flanc d'une montagne et représentait un garde spirituel d'une époque révolue des premières exploitations bouddhistes de l'endroit. La massive expression de pierre ne faisait pas loin des quarante mètres de haut, une position assise, adossé à la montagne tel un géant oublié de l'histoire se reposant sereinement sur une nature endormie à quatre mille neuf cents mètres d'altitude. Je devais prendre contact ici même, j'avais une chance culottée de n'avoir aucun badaud trainant aux alentours. Le jour était bien choisi, en effet c'était une journée de fête où tous les touristes étaient concentrés vers les sites religieux les plus connus du Tibet. Le lieu était donc paisible, je me laissais bercer par la sérénité qui entourait l'énorme sculpture, à cette altitude j'avais un peu de mal à respirer et, tout en attendant mon contact, je m'asseyais à califourchon pour reprendre un peu mon souffle, il me fallait simplement prendre l'habitude comme les rares habitants du site. Je m'endormais, le peu de marche dans cette partie de notre planète à l'oxygène réduit m'avait fatigué. En fermant les yeux, je distinguais entre mes paupières à demi closes une silhouette au sommet de la statue de pierre. Elle m'observait, je pouvais sentir son regard au-dessus de moi, un mélange de mal-être et de gêne m'oppressait, comme si j'étais un enfant qui venait de se faire prendre après avoir volé un bout de tarte fraichement posé sur le rebord d'une fenêtre. C'est elle qui me suivait depuis l'hôtel.
- Il est amusant de vous observer petite et frêle créature, vous n'êtes pas habitué à cette altitude. Inconfortable hein ?
Une voix douce résonnait dans ma tête. Je n'avais personne à mes côtés sauf cette forme, posée à quelques mètres de haut me toisant depuis la tête de la sculpture. Mon contact était donc arrivé, bondissant de formes en formes, elle atterrissait avec grâce devant moi. Je me redressais et j'époussetais la fine pellicule de poussière et d'herbes qui s'étaient insidieusement déposées sur mes habits. J'avais l'habitude de converser avec des créatures incroyables mais il m'avait été rarement présenté une aussi jolie informatrice de ce rang. Une fine asiatique vêtue d'une toge blanche, ses fins cheveux noirs volaient aux grès d'une fine brise pourtant inexistante ici. Son visage était doux, ses lèvres fines souriaient et ses yeux n'avaient aucune pupille, une couleur noire emplissait la totalité de son regard. Je reconnaissais cette catégorie de créature, c'était un vampire de famille Ëracleiis, des fantômes antiques, un hybride qui ne craignait pas les rayons du soleil. Notre compagnie faisait appel à eux afin de s'en servir comme informateur et gardien si besoin était. Elle était attirante mais j'étais entrainé à lutter contre leur pouvoir d'obsession et d'hypnose. Depuis peu, on savait les nourrir avec du sang synthétisé, et malgré leurs réticences, nous avons pu éviter des morts comme à l'époque des, soi-disant, grandes famines et maladie de notre monde que relatent avec bêtises nos livres d'histoire truffés d'erreurs.
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LABYRINTHUS FILIA
ParanormalQui n'a pas un jour, voulu sauver une jeune fille des griffes d'une créature mythique, aidé par une autre créature tout aussi incroyable ? Un humain comme moi, oui, enfin non, pas tout a fait ... Le narrateur, un agent secret en mission au Tibet, at...