Liens Interdits : entre cœur et raison [Tome 2]

5.

Samedi 21 décembre 2024 — Tampa — Floride

L'air est doux en ce mois de décembre, comme souvent en Floride. Hormis les décorations, rien ne laisse présager que Noël approche. La simple évocation de cette fête me fait grimacer, je n'ai jamais vraiment apprécié cette époque de l'année qui est bien trop propice aux mauvais souvenirs.

Si les jumeaux de leur côté adoraient ce moment, ma blonde, elle, était comme moi et n'aimait pas ces traditions. On se retrouvait d'ailleurs souvent à fuir le repas de Noël ensemble pour aller au cinéma ou faire un feu de camp sur la plage. Penser à ces moments fait apparaître un sourire nostalgique sur mon visage. C'était le bon temps, celui où tout allait encore bien.

Assis sur ma moto garée sur le parking de la prison, je souffle un bon coup pour chasser toute trace de Swan de mon esprit. Je suis là pour voir mon frère, pas pour me morfondre sur mon sort.

Surtout que c'est toi qui aurais dû être entre ces murs.

Comme à chaque visite, la culpabilité refait surface et me ronge de l'intérieur. Presque dix ans que je vis avec, mais elle n'a jamais pesé aussi lourd sur mes épaules. Je descends de ma moto, Betty, et alterne entre serrer et desserrer mes poings pour apaiser la tension qui m'envahit. C'est le moment de rester calme. Les murs gris et sinistres de la prison me font face, les barbelés me rappelant la triste réalité de la vie de mon frère derrière ces murs.

Je traverse le portique de sécurité, chaque bip me rappelant que je pénètre dans un monde à part. Les gardiens, habitués à mon visage, me saluent d'un hochement de tête tandis que j'emprunte le long couloir qui mène aux parloirs. Mes pas résonnent sur le sol carrelé, accentuant la lourdeur de l'atmosphère. J'essaie de me concentrer sur ma respiration, inspirant profondément pour garder mon calme, mais la tension reste palpable. Même après dix ans, mon passage entre ses murs me fait toujours le même effet.

Une sensation  constante d'étouffement.

Enfin, la salle des visites se dessine devant moi. J'entre d'un pas assuré même si en réalité je n'en mène pas large. À travers la vitre épaisse, je vois mon frère, Blake, qui m'attend. Son visage, identique au mien, s'éclaire d'un sourire quand nos regards se croisent. Néanmoins, ses yeux trahissent les années de dureté qu'il a enduré et continue toujours de subir. Les dents serrées, je m'assois sur la petite chaise métallique et décroche le téléphone pour parler à travers la vitre qui nous sépare.

— Comment tu te sens aujourd'hui ? j'entame, ma voix légèrement tremblante malgré moi.

— Ça va, tu sais, on fait avec, comme d'hab, répond-il avec un haussement d'épaules. Et toi, comment ça va dehors ?

Je veux lui dire que tout va bien, que je gère, mais les mots me semblent creux, même en pensée. La vérité est que je ne gère rien du tout. La culpabilité, la rage et la tristesse sont devenues mon quotidien. Ne préférant pas l'inquiéter, je lui parle de mon boulot, de mes dernières affaires, de Marco et de la salle de boxe, essayant de lui offrir un morceau de normalité dans son quotidien peu reluisant. Blake m'écoute attentivement, hochant la tête de temps à autre, puis finit par sourire en entendant certaines anecdotes sur le blond.